La chronique Savourer avec Véronique Leduc

Auteur(e)
Photo: Daphné Caron

Véronique Leduc

Véronique Leduc a été journaliste en tourisme pendant des années pour divers médias avant de se spécialiser en agrotourisme et culture culinaire. Elle a participé à divers collectifs liés au tourisme et a publié les livres Épatante Patate et La famille agricole. Parce qu’elle avait envie d’avoir plus d’espace pour parler de ceux et celles qui nous nourrissent, elle a aussi cofondé, il y a 10 ans, le magazine Caribou. Elle est rédactrice en chef des numéros papier qui abordent différents thèmes liés à la culture culinaire du Québec. Elle est fascinée par les humains et les histoires qu’ils ont à raconter. Elle a pour la première fois raconté son histoire à elle en 2021 dans son livre Infertilité Traverser la tempête. Elle signe les articles Savourer et Saveurs du jour sur Avenues.ca depuis 2015 et nous offre ici sa chronique Savourer.

Mettre la table

Si vous flânez souvent sur Avenues.ca, vous m’avez sûrement déjà lue. Je suis celle qui signe les textes Savourer et les Saveurs du jour, et ce, depuis la naissance de ce beau média en 2015. Ça fait beaucoup de textes, ça, mais c’est la première fois que je me présente officiellement, pour cette première chronique.



Sept ans et demi de textes hebdomadaires, moins quelques vacances ici et là et un an de congé de maternité, ça fait plus de 300 textes. Et jamais pendant toutes ces années je n’ai eu de panne d’inspiration: au contraire, mon plus grand problème est souvent de choisir entre deux ou trois idées de sujets!

Au fil des ans, je vous ai parlé de nouvelles tendances, de crème glacée à la moutarde(!), de planche de beurre et de café à l’huile, des meilleures adresses gourmandes de la côte est américaine ou de la Gaspésie et de mes découvertes culinaires au Japon, à Hawaï ou en Turquie. J’ai écrit sur la souveraineté alimentaire, l’alimentation locale, les livres de cuisine et (BEAUCOUP) à propos du homard (il faut croire que les passions transparaissent dans le travail).

Au fil des ans, je vous ai parlé de beaucoup de choses... et souvent du homard! Photo: David Todd McCarty, Unsplash

Je n’ai jamais eu, pendant toutes ces années, de panne d’inspiration, parce que pour moi, manger, c’est plus que manger.

Manger parle de nos origines, de notre classe sociale et de notre histoire. Je reste toujours fascinée par des aliments ou des plats comme le bagel, le pâté chinois, la soupe à l’oignon, le smoked meat ou le cannelé. Des spécialités qui à elles seules, si on s’y intéresse, racontent une riche histoire.

Au Québec, quand on sort des bars, on se tourne vers une poutine. Au Japon, on se régale d’un ramen. En Turquie, on se jette sur des moules farcies. Pourquoi et comment les «plats réconforts» peuvent-ils autant varier d’un endroit à l’autre?

Pour avoir beaucoup voyagé, j’affirme sans aucun doute que l’alimentation fait partie de la culture d’un peuple au même titre que sa langue et son art. Cela fait d’ailleurs 10 ans que j’ai cofondé le magazine Caribou, qui porte exclusivement sur la culture culinaire québécoise. Alors, je sais à quel point notre alimentation fait partie de notre ADN!

Cela fait 10 ans que j’ai cofondé le magazine Caribou, qui porte exclusivement sur la culture culinaire québécoise. Photo: Facebook Caribou

Manger, c’est aussi voter. La formule est peut-être galvaudée, mais elle est tellement vraie! Bien sûr, il faut pouvoir se le permettre, mais pour moi, entre des fraises de la Californie et des fraises d’ici, même si ces dernières sont le double du prix, le choix est facile. Parce qu’on peut savoir comment elles sont cultivées, parce que je veux goûter le terroirr québécois, parce que je veux soutenir l’économie d’ici. Je suis convaincue que nos choix alimentaires ont le pouvoir de nous redonner le pouvoir sur divers aspects de nos vies.

Manger, c’est aussi rencontrer. Les livres Épatante patate et La famille agricole, que j’ai publiés et qui m’ont offert l’immense opportunité de voyager à travers le Québec à la rencontre de ceux qui nous nourrissent, me l’ont prouvé. Derrière chaque aliment consommé, il y a des humains qui travaillent à planter, cultiver, élever, transformer. Ils sont là parfois grâce à une longue histoire familiale, d’autres fois parce qu’ils ont eu envie de changer de vie et de se lancer dans autre chose. Mais toujours, ils sont passionnés. Ils se doivent de l’être, parce que produire de la nourriture comporte son lot de défis.

Derrière chaque aliment consommé, il y a des humains qui travaillent à planter, cultiver, élever, transformer.

Manger, c’est se questionner et évoluer. On disait avant aux femmes enceintes qu’une petite quantité d’alcool pouvait être consommée, qu’il fallait boire une pinte de lait par jour et qu’il fallait absolument manger du foie… On a pensé que les produits ultratransformés étaient l’avenir et que les pesticides étaient la solution. Au fil des époques, les recommandations alimentaires, notre façon de cultiver, de consommer et même de manger, évoluent et témoignent de questionnements, de nouvelles données scientifiques et de tendances sociologiques. Et tout ceci n’est jamais ennuyeux.

Manger, c’est partager. Cette expression que j’aime particulièrement le dit bien: «If you break bread together, you won’t break each other’s neck» (Si vous rompez du pain ensemble, vous ne vous romprez pas le cou les uns les autres), et il est vrai que plusieurs expériences montrent que de partager un repas ensemble permet de mieux comprendre l’autre et de s’en rapprocher. Et à mon avis, il n’y a pas meilleure façon de passer la soirée que de partager un long apéro avec les amis. Les modes alimentaires vont et viennent, mais ce qui reste, c’est le plaisir de manger ensemble.

Et c’est peut-être ce qui est le plus beau de l’acte de manger: apprendre, découvrir, partager et manger. Ensemble.

Voilà, la table est mise: je continuerai, plusieurs fois par mois, à partager avec vous mes découvertes grâce aux saveurs du jour, puis, une fois par mois, vous pourrez lire ma chronique (et mes articles Savourer restent toujours disponibles). J’espère que vous aurez plaisir à me suivre dans mes questionnements et mes réflexions gourmandes. Parce que si le plaisir de manger est infini, les sujets qui y sont liés le sont aussi.

Bon appétit!