Jouer avec sa nourriture
Qui a dit qu’il ne fallait pas jouer avec sa nourriture? Certainement pas les initiateurs des projets qui suivent!
Pour certaines personnes, jouer avec la nourriture n’est pas synonyme de gaspillage, mais plutôt d’inspiration, de respect de la matière, de découverte et d’art. Voici, en vrac, quelques idées inspirantes à consommer sans modération.
Design culinaire
Pour la designer culinaire néerlandaise Marije Vogelzang, la nourriture est un «outil» qui peut avoir un véritable caractère social. Ainsi, elle propose des installations artistiques qui, à l’aide de la nourriture, dévoilent la nature humaine. La designer travaille avec les aliments, certes, mais toujours, selon elle, pour parler de l’humain. «J’essaie d’utiliser une approche créative pour aider les gens à réévaluer leur relation avec la nourriture, mais aussi pour les pousser à échanger les uns avec autres.»
Pour son projet «Black confetti», Vogelzang a recréé les recettes exactes préparées pendant la Seconde Guerre mondiale. Les survivants qui étaient invité à ce repas ont ainsi retrouvé certains souvenirs forts.
Pour «White funeral meal», elle a élaboré un banquet et un décor tout blancs pour célébrer la mort.
Quant à son projet «Veggie Bling Bling», des bijoux ont été fabriqués par des enfants à partir de légumes. Étrangement, ceux qui lèvent habituellement le nez sur ces aliments se mettent alors à les déguster avec appétit.
Pour «Eat Love Budapest», la designer a proposé à des femmes hongroises de se laisser nourrir par des femmes gitanes cachées derrière un rideau. Si, «dans la société, les gitanes sont habituellement en position de recevoir, ici, ce sont elles qui donnent et la nourriture crée un lien fort qui fait se rassembler les peuples» explique Marije Vogelzang. Pour clore sa conférence, le printemps dernier, la designer a affirmé: «If you break bread together, you won't break each others neck» (Si vous rompez du pain ensemble, vous ne romprez pas le cou les uns des autres.) Inspirant non?
Art culinaire
Le duo d’artistes allemands Lernert & Sander travaille sur différents sujets, mais s’est penché sur la nourriture avec le projet «Cubes». Ainsi, pour un magazine, ils ont photographié 98 aliments frais et crus coupés en cubes parfaits de 2,5 cm. L’image est frappante et met l’emphase sur la beauté et la diversité des aliments que nous consommons. Elle nous fait aussi nous questionner: est-ce que les aliments perdent de leur nature sans leur forme initiale? Savons-nous les reconnaître même sous forme de cubes? Et vous, combien pouvez-vous en identifier?
D’ailleurs, le web permet de se rincer l’œil facilement côté «food art», comme on l’appelle en France (!). Les images cocasses d’aliments transformés en objets du quotidien par l’Allemande Sarah Illenberger sont tout simplement fascinantes. Même chose pour les magnifiques dégradés de couleurs faits à partir d’aliments de l’Américaine Brittany Wright.
Vous pouvez continuer à vous amuser grâce à ces quelques suggestions, entre autres.
Expérience culinaire
Chez nous, dans le domaine du jeu alimentaire, In the Mouth fait beaucoup parler depuis quelques mois. Le concept? Des soupers collectifs organisés autour d’un menu créé à partir de la biographie culinaire des participants. «Expériences gastronomiques improbables» assurées! Les participants doivent remplir un questionnaire à propos de leurs goûts et de leurs souvenirs alimentaires 48 heures avant le rendez-vous au Centre PHI, à Montréal. Sur une grande table centrale se retrouvera ensuite pêle-mêle ce que les réponses des participants auront inspiré au chef qui fait fi des conventions en matière d’accords alimentaires. «Mangez ce que vous êtes», dit In the Mouth.
Design culinaire, art culinaire, expérience culinaire. Ces disciplines sont bien différentes, mais ont un point commun: celui de s’amuser avec la nourriture et de voir les aliments sous un nouvel angle. La tendance est là, forte et encore en ascension. La table est mise pour la découverte. Ne reste qu’à se servir.