BBQ Québec: une belle histoire de famille

Les cuisiniers et mordus de barbecue s’y approvisionnent depuis longtemps, mais peu savent que derrière la populaire enseigne BBQ Québec se cache une belle histoire de famille qui célèbre cette année ses 10 ans.

Les parents de Max et Jean-Philippe Lavoie étaient propriétaires d’une quincaillerie à Saint-Jean-Chrysostome, en Montérégie. C’est là que les deux frères ont appris l’entrepreneuriat. «À l’époque, toutes les quincailleries vendaient des barbecues pour vendre des barbecues, mais il n’y avait pas d’expertise. Je m’en suis rendu compte quand j’ai cherché une pièce pour mon barbecue brisé: il n’y avait rien de disponible», raconte Max. C’est comme ça qu’il a fait venir en cachette de son père, qui ne voulait pas vendre «de barbecues chers», des modèles de meilleure qualité. Tout est parti en quelques jours. «Ça venait confirmer qu’il y avait un besoin», dit Max, qui s’est alors mis à rêver d’offrir du service, des conseils, des accessoires, des livres et des produits alimentaires en lien avec les barbecues.

Pour les frères Lavoie, la limite de ce qui peut se faire sur le barbecue n’est jamais atteinte! Photo: Facebook BBQ Québec

Une idée devenue PME

C’est ainsi que l’aventure a commencé: dans la quincaillerie familiale d’abord, puis avec un local à Longueuil, et ensuite avec d’autres boutiques à Laval et Montréal, deux franchises, plus de 1600 points de vente, une boutique en ligne et bientôt une centaine d’employés.
Il faut dire que pour les frères Lavoie, souvent invités dans les médias, l’art du gril, c’est du sérieux: ils ont participé à plusieurs compétitions à travers le monde et sont montés sur le podium à quelques reprises. «Au Québec, nous sommes créatifs et travaillants, et c’est ce qui fait notre signature», estime Max. D’ailleurs, pour eux, la limite de ce qui peut se faire sur le barbecue n’est jamais atteinte: ils proposent une multitude de cours en ligne, et encore après 10 ans, ils annoncent ce printemps une dizaine de nouveautés, dont une plancha en acier inoxydable à mettre sur la majorité des barbecues et qui permet différents modes de cuisson, des sels au sriracha et à la truffe noire qui viennent s’ajouter à leur collection, ainsi qu’un fromage à griller.

«Il n’y a que 4% des entreprises qui survivent aux premiers 10 ans», souligne fièrement Max, qui peut se targuer d’avoir atteint son objectif initial de «mettre le Québec sur la "carte barbecue" du monde». Mais la mission des frères n’est pas terminée, puisque désormais, le duo veut «changer le monde, un barbecue à la fois». Rien de moins.

Une maison de 1767 chargée d’histoire

Une demeure qui a soufflé ses 250 bougies, un ancien propriétaire bien connu et des rénovations dans le respect du charme d’époque: la maison Saint-Pierre, à Mirabel, c’est tout ça. Tour du propriétaire.

Saint-Benoît, qui fait maintenant partie de Mirabel, possède une riche histoire, intimement liée à celle des patriotes. Le village était le foyer de l’intelligentsia de la résistance patriote au nord de Montréal. On y retrouvait notamment le député Jean-Joseph Girouard et le colonel Raizenne, capitaine de la milice.

Pendant l’été 1837, les patriotes de Saint-Benoît se sont organisés et ont décidé de former un camp armé. Croyant à tort faire face à un bastion rebelle imprenable, le général Osborne a envahi la petite municipalité, qui a été pillée et rasée par les flammes.

On raconte qu’à peine trois maisons s’en sont sorties indemnes. La demeure du 10120, rang de La Fresnière est l’une des survivantes.

La maison de pierre bâtie en 1767 était autrefois située au coin du rang de la Fresnière et de la rue Chénier. Après avoir acheté le domaine en 1967, Claude Leveillée a subdivisé les lots et l’a déménagée à l’endroit actuel pour sa mère. De l’aveu de l’auteur et interprète, Saint-Benoît-de-Mirabel a été une source d’inspiration. Il y a d’ailleurs vécu 50 ans.

Malgré les rénovations, les différentes époques cohabitent en harmonie. Photo: Centris

Difficile de croire que la demeure remonte au 18e siècle au premier coup d’œil. Il faut dire que les propriétaires ont rénové les lieux au fil des ans. Malgré les modifications, les différentes époques cohabitent en harmonie. L’âme des lieux, son cachet, a été préservée.

Coup de cœur pour les poutres en bois apparentes au plafond. Photo: Centris

On aime particulièrement les poutres en bois apparentes au plafond, les moulures, les murs de pierre et les panneaux de verre qui délimitent l’espace sans empêcher la lumière naturelle d’entrer. La chambre principale, avec son plafond cathédrale et son foyer, est aussi réussie.

Une nouvelle page d’histoire s’écrira sûrement bientôt puisque la maison est à nouveau en vente.

Schwartz’s, toujours vivant

Cela fait près d’un siècle que les visiteurs entrent chez Schwartz’s, rue Saint-Laurent, à Montréal, pour déguster des sandwichs à la viande fumée. Quel est le secret de cette longévité?

Les années de pandémie ont fait la vie dure à plusieurs restaurants, qui ont dû fermer leurs portes, mais Schwartz’s, l’une des plus anciennes adresses au pays, est toujours là. «La reprise est très bonne, peut-être même que les choses vont mieux qu’avant», a expliqué Frank Silva, directeur général de l’institution lors du 3e Colloque sur l’identité culinaire québécoise, qui a eu lieu le 23 février dans le cadre de Montréal en lumière.

Il était question, entre autres choses, pendant cette journée de conférences, du sandwich à la viande fumée, parce que le mets fait assurément partie de l’identité culinaire montréalaise et québécoise. «Tous les plats qui sont ancrés dans notre héritage sont liés au côté ouvrier de la ville», a dit Amélie Masson-Labonté, spécialiste en histoire alimentaire, questionnée sur l’identité culinaire de Montréal. Elle a donné en exemple le hot-dog steamé, le pouding chômeur, le bagel, le pâté chinois et… le smoked meat.

Le sandwich à la viande fumée fait partie de l’identité culinaire montréalaise et québécoise. Photo: Facebook Schwartz's Deli

Les secrets de la longévité

C’est en 1928 que l’enseigne a été ouverte sur la «Main» par Reuben Schwartz, un immigrant roumain. Depuis, les propriétaires se sont succédé, mais une chose est toujours restée la même, croit Frank Silva: «la qualité de la viande». Cette dernière attire les Montréalais depuis toujours, alors que ce serait plutôt «l’ambiance et la réputation» qui piqueraient la curiosité des touristes, qui représentent 80% des visiteurs pendant l’été.

Photo: Ken Eckert, Wikimedia Commons

«Beaucoup de clients venus de l’étranger entrent au resto et ne savent même pas ce qu’on y mange: ils viennent à cause de la réputation et des réseaux sociaux», a dit le directeur, qui ne compte donc pas de sitôt changer l’apparence de la place. D’ailleurs, il reçoit souvent des clients qui venaient quand ils étaient enfants et qui reviennent chercher l’ambiance d’autrefois.

Au 3895, boulevard Saint-Laurent, les touristes sont revenus, et la cinquantaine d’employés aussi. Schwartz a 95 ans, et semble bien prêt à atteindre son centième anniversaire.

Les mangeurs de nuit, Marie Charrel

Chaque roman de Marie Charrel nous raconte une histoire passionnante, documentée, et avec une qualité de langue provoquant plaisir de lire et émotion. La plus récente œuvre de cette journaliste du journal Le Monde ne fait pas exception à «sa» règle. Les mangeurs de nuit est un roman génial, à mettre entre toutes les mains.

Vous le savez, je m’en suis fait une mission personnelle, je crois énormément à la littérature québécoise et je fais tout en mon possible pour en faire la promotion. Cependant, mon amour des livres d’ici ne souffre d’aucun chauvinisme! Partout dans le monde, des auteurs écrivent des romans et certains méritent grandement qu’on s’y attarde. En ce qui me concerne, Marie Charrel est une de ces auteures qui attire l’attention pour la qualité et la variété de ses romans, et aussi par la richesse de son écriture.

Ces dernières années, Marie Charrel nous a raconté la vie fascinante de la peintre Yo Laure dans Je suis ici pour vaincre la nuit, le parcours trépidant d’une jeune femme qui doit approcher Jean Seberg et les Black Panthers dans Une nuit avec Jean Seberg et elle nous a charmés avec les danseurs de flamenco, l’histoire des jumeaux Rubinstein pendant la Seconde Guerre mondiale, dans Les danseurs de l’aube.

Comme Québécois, je me rappelle le magnifique livre de Sylvie Laliberté, Quand j’étais Italienne, qui raconte raconte les stigmates qu’a laissés sur leurs enfants l’emprisonnement de plusieurs Italiens pendant la Seconde Guerre mondiale sur la seule justification de leurs racines italiennes. Cette horreur de notre passé m’avait complètement bouleversé. Avec son nouveau roman, Marie Charrel nous raconte une histoire qui se passe en Colombie-Britannique et qui retrace les malheurs de la communauté japonaise pendant cette même guerre. Quatre mille kilomètres de distance, mais les mêmes sentiments d’injustice, les espoirs d’une vie meilleure déçus et la honte de tes origines qui te collent à la peau.

«Après le coucher du soleil, les mangeurs de nuit grignotent l’obscurité de leur bouche gourmande; ce sont des points lumineux que l’on voit danser dans les bois.» - Page 38

L’histoire

Sur le bateau qui mène Aïka, une jeune femme japonaise, vers sa nouvelle vie en Amérique, celle-ci regarde la photo de son fiancé qu’elle épousera à son arrivée au Canada. Tous les rêves sont permis, tout est possible… sauf, peut-être, ce qui se cache derrière cette photo. La déception sera totale: un mari bien différent de celui dont elle a fantasmé sur la photo, sa richesse inexistante, son entreprise ayant fondu au soleil et le château ayant pris des airs de maison plutôt décrépite. Son idéal canadien s’écroule.

Elle découvre un mari rêveur qui n’a pas les moyens de ses rêves. Une fille, Hannah Hoshiko, naît de cette union. Cette enfant aura une relation très proche avec son père, peuplée de contes et de légendes, et subira l’indifférence cruelle de sa mère. Elle portera, comme ses deux prénoms en elle, deux cultures, japonaise et canadienne.

«Les histoires. Mon père affirmait qu’elles sont des filles du vent, pareilles à des petites fées errant dans l’immensité du ciel, perdues, jusqu’à ce qu’elles rencontrent un conteur disposé à les libérer par ses mots.» - Page 190

Quelque part dans la forêt vit un homme, Jack, loup solitaire en harmonie complète avec la nature. En tant que creekwalker, il parcourt les ruisseaux et les rivières de la forêt pour compter les saumons. Depuis le départ de son frère pour la guerre, il vit seul, protège sa forêt et s’imprègne des légendes autochtones, de leur mode de vie et de leur spiritualité.

Puis, il croise sur son chemin une légende, un ours blanc, une créature qui n’existe que dans les mythes anciens. Une vision? Non, sûrement pas, car il découvre, tout près, une jeune fille, inconsciente, blessée gravement par les griffes de cette bête «imaginaire».

Émaillées dans tout le récit, nous suivrons dans les journaux locaux les péripéties de quatre voleurs dévalisant les maisons de la région. Qui sont ces quatre personnes, habillées drôlement, qui subtilisent vêtements, outils et denrées et qui se cachent dans la forêt? Et on se demande, avec raison, quel est le lien avec le récit principal. Faisons confiance à l’auteure, en pleine maîtrise de son intrigue…

Dans cette forêt canadienne qu’elle décrit superbement, les solitudes de Jack et de Hannah s’uniront dans une relation trouble, marquée par leur propre histoire, le sentiment d’être exclus, d’être rejetés, de n’avoir pu sauver ceux qu’ils aimaient tout en partageant leurs cultures et les légendes qui les peuplent.

Mon avis

Ce roman est une pure merveille! Chaque page apporte son lot de poésie, de ravissement devant une nature qui attire et qui fait peur, habitée par des légendes, des mythes qui hantent autant la forêt que l’esprit des personnages… Et le nôtre! Le fantastique, même s’il n’apparaît pas dans le roman, frôle allégrement le front du livre et laisse une trace furtive, grâce à la magie de l’écriture de Charrel.

Marie Charrel nous transporte avec son regard plein de tendresse vers ces deux personnages, leurs difficultés à s’adapter au monde dans lequel ils ne veulent pas vivre. Ou du moins, celui qui les a rejetés.

Bien sûr, il y a un mystère qui se dissimule derrière ce passé pas si éloigné et qui a laissé des traces dans le cœur des enfants orphelins, déracinés de leur passé, de leur pays. L’auteure nous raconte ces sagas familiales en y ajoutant une dose de mystérieux, où elle lance aux lecteurs des pistes vers la découverte graduelle d’une vérité bien cachée.

Les mangeurs de nuit est un grand roman. Un roman de l’exclusion, du rêve peuplé de légendes, avec des personnages solitaires, solidaires et résilients. De la première à la dernière page, le lecteur sera enveloppé par une histoire prenante, bien documentée, sans aucune longueur et dans une langue superbement écrite. Tout pour plaire! Je vous le conseille sans aucune restriction et je vous encourage à découvrir les autres romans de cette talentueuse auteure qui saura vous émouvoir, par l’histoire qu’elle raconte et la beauté de ses personnages. Plus humains que nature!

«Peu importe ce que la vie t’arrache: tu pourras toujours le lui reprendre avec les mots.» - Page 66

Bonne lecture!

Les mangeurs de nuit, Marie Charrel. Éditions de l’Observatoire. 2023. 296 pages

Braemar: une maison singulière à Westmount

La maison Braemar se dresse sur le versant d’une colline de Westmount depuis 176 ans. La luxueuse demeure est l’un des rares cottages Regency encore debout dans la région de Montréal. Visite guidée.

Avec sa galerie couverte, ses grandes fenêtres et sa construction en retrait, dans un environnement boisé, la résidence du 3219, The Boulevard incarne à merveille le style architectural Regency. Celui-ci remonte à l’époque où le prince de Galles est devenu prince régent, avant d’occuper le trône sous le nom de roi George IV, de 1811 à 1830. Il se rattache au courant pittoresque et favorise la relation avec la nature.

Avec sa galerie couverte, ses grandes fenêtres et sa construction en retrait, dans un environnement boisé, cette résidence incarne à merveille le style architectural Regency. Photo: Centris

La villa à la façade pastel ne détonnerait pas dans le sud des États-Unis. À Westmount, dans un pays balayé par le froid et la neige chaque année durant plusieurs mois, elle ne passe pas inaperçue. Il ne s’agit toutefois pas de l’unique cottage Regency dans la province. On en retrouve encore quelques-uns, surtout dans l’est du Québec.

C’est à l’architecte d’origine allemande William Footner que l’on doit sa conception. Ce dernier a notamment réalisé les plans du marché Bonsecours et ceux des trois bâtiments de l’entrepôt Robert-Gillespie à Montréal.

Vue des façades principale et latérale de la Maison Braemar en 1977 ou 1978. Collection Centre Canadien d'Architecture/Canadian Centre for Architecture, Montréal. Photo: © Aline Gubbay

En 1846, William Footner acquiert un immense terrain avec John Eadie, actuaire au siège social de la Saving Bank de Montréal. Les deux acolytes se partagent le lot et se font construire chacun une riche demeure, avec dépendances et aménagements paysagers. Clarevue a été démolie depuis longtemps, mais la seconde résiste au passage du temps.

Plusieurs hommes d’affaires prospères de Montréal ont habité les lieux à un moment ou un autre. En 1866, Eliza Lane Ross en a pris possession. La dame d’honneur de la reine Victoria aurait nommé la maison ainsi en l’honneur du village écossais situé près du château de Balmoral.

Le hall d'entrée de la luxueuse demeure bourgeoise érigée en 1847. Photo: Centris

Les détails néo-géorgiens de l’entrée, des avant-toits et des galeries ont été ajoutés en 1924 par les architectes Barott et Blackader, à la demande des résidents.

Les planchers du rez-de-chaussée, essentiellement en pin rouge, ont été notamment restaurés, tout comme les grandes fenêtres. Photo: Centris

En 2011, la soprano et philanthrope Sharon Azrieli est tombée en amour avec Braemar, qu’elle a acheté pour 1,5 million de dollars. Au fil des ans, avec de la patience (et beaucoup d’argent), elle lui a redonné son lustre d’antan. Les planchers du rez-de-chaussée, essentiellement en pin rouge, ont été notamment restaurés, tout comme les grandes fenêtres. La porte d’entrée et l’escalier principal, qui avaient été déplacés, sont revenus à leur emplacement premier.

Les travaux au sous-sol ont en outre permis de découvrir la cuisine d’origine et son foyer. Photo: Centris

Les travaux au sous-sol ont en outre permis de découvrir la cuisine d’origine et son foyer. Dans quelques pièces, comme la magnifique bibliothèque, le charme d’autrefois se marie à des couleurs vives.

Dans quelques pièces, comme la magnifique bibliothèque, le charme d’autrefois se marie à des couleurs vives. Photo: Centris

La propriété cherche à nouveau preneur. Si vous avez 25 millions qui traînent, la maison pourrait être à vous.