Manoir MacPherson: incursion dans l’univers de Riopelle

Alors que les événements entourant le centenaire de Riopelle battent leur plein, on a voulu en savoir plus sur le domaine seigneurial de l’Île-aux-Grues, qui a appartenu au célèbre peintre jusqu’à sa mort. Suivez le guide!

Le manoir MacPherson offre une vue magnifique sur le fleuve et sur le mouvement des oies blanches depuis plus de deux siècles et demi. Sa construction, du moins celle du corps central, remonte à 1769. Le bâtiment en bois couvert d’un toit à deux versants en bardeaux de cèdre fait alors office de bureau au seigneur, qui s’y rend uniquement à l’automne pour percevoir les cens et les rentes, et chasser. En plus de la résidence, le domaine seigneurial regroupe des dépendances, une grange ainsi qu’un pavillon de chasse.

En 1802, la propriété passe aux mains de Daniel MacPherson. Ce dernier y emménage de façon permanente avec sa famille et érige une aile du côté est. Vingt-six ans plus tard, il cède les lieux à son fils John, qui réalise à son tour des travaux d’agrandissement entre 1829 et 1847. Influencé par le style néoclassique, il ajoute une deuxième rallonge pour harmoniser la maison, dote le toit d’un larmier cintré et construit une fausse souche de cheminée du côté ouest.

Les dépendances au manoir Lemoine à l'Île-aux-Grues. Photo: Alphonse Proulx, 1955. BAnQ

L’avocat, écrivain et historien James MacPherson Le Moine en hérite en 1873 et s’en sert comme résidence d’été. C’est sous sa gouverne que le domaine subit ses plus grandes transformations. À l’intérieur, on déplace des cloisons et on ajoute de nouveaux ornements. L’extérieur, lui, suit désormais le courant pittoresque: une galerie-véranda permet notamment d’admirer le paysage et l’architecture s’intègre bien à son environnement.

Manoir McPherson Lemoyne, Île-aux-Grues. Photo :George A. Driscoll, vers 1950, BAnQ

Le manoir MacPherson demeure dans la famille du même nom durant plus de 130 ans. Jean Paul Riopelle en fait l’acquisition en 1995 et y réside jusqu’à sa mort, sept ans plus tard. On raconte que l’artiste pouvait contempler le vol des oies blanches durant plusieurs heures à travers les fenêtres de la résidence, au printemps et à l’automne.

Le domaine étant une propriété privée, il n’est pas accessible au public. Il nous reste les toiles de Riopelle pour nous imprégner de l’ambiance des lieux.

La lavande s’invite dans les cuisines

Les champs de la Maison Lavande, à Saint-Eustache, accueillent des centaines de visiteurs chaque été. Mais même si la récolte des fleurs mauves a lieu chaque année fin juillet ou début août, la lavande n’a malgré tout pas encore dit son dernier mot et s’invite dans les cuisines.

Pique-nique, relaxation, marche dans les allées et photos: quand les vastes champs de la Maison Lavande sont en fleurs, toutes les raisons sont bonnes pour aller y flâner. Mais si on a passé tout droit la saison de la floraison, qu’à cela ne tienne: à 30 minutes de Montréal, la Maison Lavande reste ouverte jusqu’au 20 août afin de faire profiter de son bistro et de son site postfloraison.

La lavande est reconnue pour sa beauté, mais aussi pour son odeur florale et boisée. C’est sûrement la raison pour laquelle elle est souvent associée à la parfumerie, aux produits cosmétiques ou à ceux pour la maison. D’ailleurs, on dit que son nom viendrait du mot «lavo», qui signifie «laver» en latin, puisque la fleur était autrefois utilisée pour parfumer l’eau des bains.

Pique-nique, relaxation, marche dans les allées et photos: quand les vastes champs de la Maison Lavande sont en fleurs, toutes les raisons sont bonnes pour aller y flâner. Photo: Véronique Leduc

Le goût de la lavande

La lavande est fort polyvalente en cuisine. Certains parlent d’une saveur aux accents de menthe et de romarin, alors, pourquoi pas?

Mais attention: Nancie Ferron, de la Maison Lavande, précise que ce ne sont pas toutes les variétés qui sont comestibles et qu’il vaut mieux utiliser la lavande avec parcimonie en cuisine.

Fraîche ou séchée, la fleur de lavande apporte une touche délicate d’originalité à plusieurs desserts, en plus de joliment les décorer. Meringues, sorbets, tartes ou crèmes brûlées; infusée ou parsemée sur le dessus des plats, la lavande, parce qu’elle est encore peu utilisée, sait surprendre.

D’ailleurs, c’est ce que met de l’avant le bistro de la Maison Lavande grâce à son yogourt glacé, sa sucette glacée au coco et à la lavande, ses scones lavande, citron et chocolat blanc ou lavande, framboise et chocolat blanc… La lavande des champs voisins y est aussi mise en valeur dans des boissons: limonade, café glacé (oui, à la lavande) ou thé aux perles.

Meringues, sorbets, tartes ou crèmes brûlées; infusée ou parsemée sur le dessus des plats, la lavande, parce qu’elle est encore peu utilisée, sait surprendre. Photo: Véronique Leduc

Mais ce n’est pas tout. Miels, caramels, confitures et gelées sont en vente, même une fois la saison passée, sur la boutique en ligne de la Maison Lavande. Et la fleur mauve sait aussi sortir des plats sucrés. Pourquoi ne pas goûter le confit d’oignons ou la soupe à la lavande?

La lavande est fort connue en Provence depuis longtemps, mais l’est ici aussi depuis quelques années grâce au travail de gens comme Nancie Ferron et Daniel Joannette, entre autres. Comme elle est plus connue de l’autre côté de l’océan, elle est davantage utilisée par les chefs français. On dit même qu’elle fait partie des secrets de la cuisine provençale. Mais elle tend tranquillement à faire sa place en cuisine ici aussi et, timidement, certains chefs du Québec commencent à l’utiliser. Surveillez les menus, et si vous la voyez, osez!

ArchitecTours: architecture et histoire en balade

Les ArchitecTours sont de retour. Les populaires visites guidées d’Héritage Montréal, qui mêlent architecture et histoire, vous amènent cette fois à la découverte des parcs de Montréal.

Depuis plus de 40 ans, Héritage Montréal a pour mission de protéger et de promouvoir le patrimoine architectural, historique, naturel et culturel de la métropole. C’est dans cette optique que l’organisme a mis sur pied les ArchitecTours il y a déjà 35 ans.

Cet été, les parcours pédestres invitent à explorer cinq parcs montréalais, d’Hochelaga-Maisonneuve à Outremont, en passant par Villeray, Saint-Laurent et Le Plateau-Mont-Royal.

Grâce aux guides bénévoles, on découvre «les effets de l’implantation des parcs sur un quartier, son architecture et son aménagement ou, à l’inverse, comment un quartier existant a influencé la conception de ces espaces verts».

Le parcours au parc Morgan permet d’apprendre comment le mouvement d’urbanisme City Beautiful a influencé l’aménagement de l’Ancienne-Cité-de-Maisonneuve. Photo: Facebook Héritage Montréal

Au parc Beaudet, par exemple, les marcheurs explorent le cœur de l’ancien village de Saint-Laurent. Le parc Morgan permet quant à lui d’apprendre comment le mouvement d’urbanisme City Beautiful a influencé l’aménagement de l’Ancienne-Cité-de-Maisonneuve. D’ailleurs, saviez-vous que les parcs se sont taillé une place dans la ville à la fin du 19e siècle en raison de la forte industrialisation que connaissait Montréal à l’époque?

Les promenades de deux heures, en français ou en anglais, ont lieu les samedis et dimanches jusqu’au 1er octobre. Pour connaître l’horaire précis des visites, il faut consulter le site d’Héritage Montréal.

L’achat des billets en ligne est obligatoire, puisque aucune inscription ne peut se faire sur place. Un billet au prix courant coûte 23,75$. Les aînés et les jeunes de 35 ans et moins devront quant à eux débourser 20,50$.

Juillet rouge au matin de Stéphanie Gauthier

Après avoir été charmés par son dernier roman, Inacceptable, quelle prévision littéraire pouvions-nous faire pour le cinquième roman de Stéphanie Gauthier? Eh bien, voilà, Juillet rouge au matin est un excellent polar, qui devrait permettre à Stéphanie Gauthier de prendre sa place au «firmament» des bons écrivains et écrivaines de romans policiers au Québec.

L'histoire

Mardi, le 2 juillet, à la sortie d’un café du boulevard Saint-Laurent, un homme et une femme sautent dans une voiture Uber. Quelques minutes plus tard résonnent dans une ruelle typique de Montréal quelques coups de feu. Les occupants du taxi et le chauffeur sont tirés à bout portant.

À quelques rues de là, Romain et Alberto patrouillent ensemble sur le Plateau Mont-Royal. Dès la réception du message, Romain désire être le premier policier sur les lieux, et ce, même en conduisant très dangereusement. Puis le drame arrive. En grillant un feu rouge, l’auto de police frappe de plein fouet un cycliste, qui meurt sur le coup.

Voilà le ciel rouge de juillet annonçant une enquête très complexe, alors que les personnes qui savent ce qui s’est passé sont mortes ou dans le coma. Aucun indice, aucune piste, rien pour démarrer une enquête, juste des humains avec leur quotidien d’amour, de famille, de couple, de joie et de malheur.

Camille Blackburn et son oncle Pierre sont chargés de l’enquête sur la fusillade. En plus, Camille est préoccupée par la descente aux enfers que vit son mari, car c’est lui le policier qui a renversé le cycliste. Conséquence possible, il sera probablement accusé de conduite dangereuse ayant provoqué la mort.

Au fil de l’enquête, on apprend que le conducteur du taxi est un jeune homme tranquille, cependant reconnu pour exprimer certaines opinions racistes. L’homme, Frédéric Valois, est marié et père de deux jeunes adultes. Il a la réputation d’être un coureur de jupons. Et finalement, la femme, Sara Davidson, est conseillère en communication dans un organisme communautaire. Trois victimes, trois milieux différents, et en apparence, aucun lien ne les unit. Une grande question demeure: était-ce une tuerie complètement gratuite ou, au contraire, est-ce que seule une des victimes était visée, les autres étant des «dommages collatéraux»?

Mon appréciation

L’auteure réussit à tenir ses lecteurs dans le vague en parsemant l’intrigue d’indices, et de pistes qui peuvent se révéler fausses… ou pas. Patiemment, les policiers interrogent les familles et les relations de chacune des victimes. À chaque chapitre consacré à un personnage, on soulève le coin de la couverture en glanant un bout de vérité dans un champ d’incertitudes. Jamais l’auteure ne nous laisse avec le sentiment que nous19 sommes tout près de la résolution de l’enquête. L’art de la construction du récit et les règles du polar sont très bien maîtrisés.

Sans dévoiler une partie de l’intrigue et sans divulgâcher le dénouement de l’enquête, il faut souligner un aspect important du style de Stéphanie Gauthier: dans ce roman, pas de criminel notoire ou de grands tueurs professionnels. L’auteure met en scène des personnes ordinaires, des gens comme vous et moi qui, tout à coup, basculent dans l’exceptionnel. Ce qui était invraisemblable il y a dix minutes devient tout à coup la réalité, un gouffre dans lequel on chute.

J’ai beaucoup aimé la structure du roman utilisée par Stéphanie Gauthier. Pendant les quatre jours que dure l’enquête, à travers les interrogatoires des personnages qui connaissaient les victimes, l’auteure nous offre des indices avec parcimonie, juste assez pour alimenter notre envie de connaître la vérité: savoir qui a tué les trois occupants du taxi et, surtout, pour quelles raisons ces meurtres ont été commis.

Quel que soit notre sens de la déduction de lecteur de polars, je ne me suis jamais senti proche d’une résolution des crimes. Arrivée aux derniers chapitres, l’auteure nous révèle ce qui s’est passé réellement. Morceau par morceau, le casse-tête prend forme, toutes les ficelles de l’intrigue s’attachent et l’auteure nous surprend avec une finale imprévisible. En prime, dans les dernières lignes du roman, elle nous offre un revirement ultime, un revirement surprise comme les amateurs et amatrices de polars apprécient.

Avec ce roman haletant du début à la fin, Stéphanie Gauthier réussit son pari, et nous, comme lecteurs, on se doit d’accepter de s’être fait balader pendant quelques centaines de pages.

Son imagination, sa capacité à présenter une galerie de personnages crédibles, sa maîtrise des codes du polar, son écriture simple et efficace, nous révèlent une auteure qui a atteint une belle maturité d’écriture. Avec ses deux derniers romans, Inacceptable (2020) et Juillet rouge au matin, elle m’a convaincu de devenir un lecteur régulier de ses futures œuvres.

Alors, même si le ciel de juillet est rouge, la découverte de cette auteure et de son roman vous fera sûrement passer des moments agréables de lecture, sous le soleil d’un été de toutes les couleurs.

Bonne lecture!

Juillet rouge au matin, Stéphanie Gauthier. Éditions Robert Laffont, 2023. 372 pages

Maison Trestler: un joyau de 225 ans

Une architecture d’exception, un passé mouvementé, et même une histoire de fantôme: pas de doute, la maison Trestler, à Vaudreuil-Dorion, vaut le détour. Visite d’une demeure bicentenaire qui se démarque.

En 1776, l’Allemand Jean-Joseph Trestler débarque au Canada avec les chasseurs de Hesse-Hanau. Ce corps de troupe mercenaire vient prêter main-forte aux loyalistes alors que débute la guerre de l’Indépendance américaine. Une fois le conflit terminé, Joseph Trestler s’installe à Montréal.

Vers 1786, il achète une propriété dans la seigneurie de Vaudreuil, où il ouvre un magasin général. Il fait vite fortune, notamment grâce à la potasse et à la fourrure. Il construit sa maison de pierres en trois étapes. La partie centrale s’érige dès 1798. L’aile ouest, qui comprend une voûte et un entrepôt, s’ajoute en 1805, puis apparaît l’aile est, qui loge deux chambres (aujourd’hui un salon), un an plus tard. L’année de construction de chaque partie est d’ailleurs inscrite sur une pierre d’angle.

La maison Trestler vers 1925. Photo: Edgar Gariépy Photographie Artistique & Industrielle, BAnQ.

La résidence de plan rectangulaire, à un étage et demi, se coiffe d’un toit à deux versants couvert de bardeaux de cèdre. On reconnaît son esprit français à ses murs en moellons, ses fenêtres à petits carreaux et à ses cheminées doubles placées au-dessus des murs pignons. Elle se distingue toutefois en raison de son nombre inhabituel d’ouvertures — 13 portes et 41 fenêtres — et de sa silhouette allongée.

La maison Trestler en 1978-1979. Photo: BAnQ, Fonds La Presse

La porte centrale avec son imposte en éventail, les lucarnes à fronton et les 11 portes françaises témoignent de leur côté de la prospérité de Joseph Trestler. À l’époque, son domaine comprend aussi une fabrique de potasse, une grange, des étables, des écuries et des hangars.

La maison Trestler en 1978-1979. Photo: BAnQ, Fonds La Presse

La propriété reste entre les mains de la famille jusqu’en 1927, année où l’homme d’affaires Gustave-Henri Rainville en fait l’acquisition. Celui-ci transforme passablement l’intérieur, en ajoutant notamment un escalier de style Tudor. Elle est ensuite vendue à Donald Taylor, président de St-Raymond Paper, en 1951.

La maison Trestler en 1978-1979. Photo: BAnQ, Fonds La Presse

Vingt ans plus tard, Judith et Louis Dubuc achètent la maison et lui redonnent son lustre d’antan. La Fondation de la Maison Trestler en devient propriétaire en 1984. La demeure est ouverte au public depuis.

La Fondation de la Maison Trestler en devient propriétaire en 1984. La demeure est ouverte au public depuis. Photo: Facebook Maison Trestler

On raconte que Catherine, la fille cadette de Joseph Trestler, déshéritée pour s’être mariée contre le gré de son père à un commis du magasin, hante les lieux. Pourtant, son histoire finit bien: à la suite de la mort de sa mère, elle revendique son droit à l’héritage et gagne son procès, obtenant du même coup 20 000$.