La chronique Vins et alcools avec Jessica Harnois

Auteur(e)

Jessica Harnois

Sommelière et animatrice, Jessica Harnois a travaillé pour les plus grands établissements au monde, a occupé le poste de sommelière en chef à titre d’acheteuse de vins pour les Services SAQ Signature, a été responsable du Courrier vinicole et de la prestigieuse Cave de garde de la SAQ, en plus d’avoir été présidente de l’Association Canadienne des Sommeliers Professionnels et Vice-Présidente de l’APAS (Alliance Pan-Américaine des Sommeliers). Avec l’agence d’animation Vins au Féminin, elle a conceptualisé le jeu Dégustation Vegas qui démocratise le vin. Vous pouvez la voir à la télé, l’entendre à la radio et la lire dans plusieurs magazines.

Le Liban dans votre verre

Au Québec, on connaît peu les vins du Liban. Pourtant, ce pays est l’un des plus anciens producteurs de vin du monde. Les premières traces de la production vinicole dans ce pays remontent à plus de 6000 ans. À la Société des alcools du Québec (SAQ), l’offre de vins libanais s’agrandit tranquillement. D’ailleurs, le Liban fait partie des 25 pays représentés à la Grande Dégustation, qui se tiendra à Montréal du 19 au 21 octobre 2023.


Brève histoire du vin libanais

Si la production de vin au Liban est ancienne, les contacts des derniers siècles avec l’Italie et la France ont aussi joué un grand rôle dans le développement de cette filière. Les Phéniciens, des commerçants maritimes, ont propagé le commerce du vin à travers la Méditerranée, partageant leur savoir-faire. Plus tard, sous l’occupation romaine, le vin libanais a continué à prospérer. Le temple de Bacchus à Baalbek témoigne de l’importance du vin dans la culture romaine et de son rôle dans le Liban antique.

Puis, au vingtième siècle, lors de la Première Guerre mondiale, l’arrivée de 62 000 soldats français, chacun ayant droit à sa ration quotidienne de 1,5 litre de vin (vous avez bien lu!), a solidifié l’industrie. Aujourd’hui, le pays connaît un renouveau vinicole, initié dans les années 1990, combinant tendances modernes et traditions ancestrales.

À la recherche des cépages autochtones

Comme dans plusieurs autres pays, l’industrie viticole libanaise a souffert des guerres, durant lesquelles des milliers de pieds de vigne furent arrachés. Les conséquences se font encore sentir de nos jours à travers la perte de plusieurs variétés de raisin. Heureusement, certains cépages autochtones, comme l’obaïdeh, le merwah et le meksasi, ont survécu. On les retrouve peu en Amérique du Nord, mais cela pourrait changer, puisque la tendance, un peu partout dans le monde, est aux cépages autochtones. Ces derniers reviennent en force non seulement parce que les consommateurs ont soif de nouveauté, mais aussi parce que ces cépages semblent bien s’adapter aux changements climatiques.

Les vignerons libanais cultivent également des cépages internationaux comme le cabernet sauvignon, le merlot et la syrah. C’est surtout par ces cépages rouges qu’ils sont connus. Les vins costauds, épicés et gorgés de soleil côtoient des vins bien fruités et souples, y compris même du pinot noir. Des blancs et des rosés sont aussi cultivés, mais en plus petites quantités.

Des plateaux montagneux bien protégés

La vallée de la Bekaa, au cœur de l’industrie viticole du Liban, bénéficie d’un climat méditerranéen idéal pour la viticulture, avec des étés chauds et des hivers doux. Elle est la principale des quatre régions viticoles du pays. Bordés à l’ouest par le mont Liban et à l’est par le mont Anti-Liban, la vallée et ses hauts plateaux sont protégés à la fois de l’humidité méditerranéenne et des vents chauds provenant du désert. Les maladies de vigne y sont donc rares, et l’irrigation, non nécessaire, puisque les montagnes fournissent l’eau.

Fait étonnant, tous les ans, il neige sur ces vallées où le mercure se maintient en moyenne au-dessus des 10 °C. Le tapis de neige peut parfois atteindre 25 centimètres! Grâce à lui, les insectes sont contrôlés de façon naturelle, sans pesticides, et sans que les vignes n’en souffrent.

Château Ksara

Emblème du vin libanais, Château Ksara rime avec finesse et élégance. Les plateaux sur lesquels Ksara cultive ses vins s’élèvent entre 1000 et 1800 mètres d’altitude, ce qui procure une belle fraîcheur aux vins, qui prennent de la maturité lentement tout au long de la saison chaude. Ils sont ensuite vieillis bien à l’abri. En effet, sous le château, de mystérieuses grottes souterraines ont été découvertes par des enfants qui pourchassaient un renard. Depuis, plus de deux kilomètres de celliers y ont été aménagés dans des conditions de garde idéales. Voici deux coups de cœur à découvrir à la SAQ.

Emblème du vin libanais, Château Ksara rime avec finesse et élégance. Photo: Facebook Château Ksara

Château Ksara Blanc de Blancs 2022

Cet assemblage de sauvignon blanc, chardonnay et sémillon présente un nez délicat, sur la noisette et l’agrume, qui se transforme en explosion de saveurs fruitées en bouche, sur la poire mûre et juteuse. Une touche de salinité complète un corps tendu et apporte une belle sapidité à l’ensemble. C’est un des rares vins blancs libanais à la SAQ et un excellent rapport qualité-prix.

Un des rares vins blancs libanais à la SAQ et un excellent rapport qualité-prix. Photo: SAQ.com

Château Ksara Blanc de Blancs 2022. Vin blanc, 750 ml. Code SAQ: 10210677. 19,85$

Château Ksara 2018

Voilà un vin libanais qui, à l’aveugle, vous laisserait croire que vous êtes dans les bordeaux. Il a son style propre, bien sûr, mais l’assemblage est classique: 60% de cabernet sauvignon, 30% de merlot et 10% de petit verdot. Le vin séjourne 18 mois en barriques neuves et usagées, sans que le fruit n’en devienne relégué au deuxième plan. Au contraire, la finale même regorge de fruits rouges et noirs, avec quelques notes de réglisse et cacao. C’est un vin qui pourra vieillir facilement 10 ans dans votre cellier, et un coup de cœur assuré.

Un vin qui pourra vieillir facilement 10 ans dans votre cellier, et un coup de cœur assuré. Photo: SAQ.com

Château Ksara 2017. Vin rouge, 750 ml. Code SAQ: 857698. 24,45$

Château St. Thomas

Fondé par Saïd Touma dans les années 1990, le vignoble du Château St. Thomas est aujourd’hui dirigé par Joe-Assad S. Touma, le fils de Saïd, accompagné de ses trois sœurs et de leur mère. Au Liban, les femmes ont encore trop peu de place dans l’industrie viticole, et c’est avec fierté que M. Touma parle de son père, maintenant décédé, et du rôle que jouent les femmes de sa famille au vignoble. Le Château St. Thomas, tout comme le Château Ksara, a plusieurs vins à la SAQ, y compris ces deux excellents produits.

Le Château St. Thomas, tout comme le Château Ksara, a plusieurs vins à la SAQ, y compris ces deux excellents produits. Photo: Facebook Chateau St Thomas - Lebanon

Château St. Thomas Pinot Noir 2017

Quelle surprise de trouver parmi les vins du Château St. Thomas offerts à la SAQ un pinot noir! On y sent à la fois la chaleur de cette région méditerranéenne, mais aussi la fraîcheur de l’altitude. Ça ne ressemble à rien, sinon… à un pinot noir du Liban, plus près, quand même, des pinots noirs d’Oregon que de ceux de Bourgogne. Cassis, noyau de cerise, épices comme la cannelle et le gingembre, et légères notes tertiaires de cuir en font un vin tout à fait charmant, à un très bon prix.

Un vin tout à fait charmant, à un très bon prix. Photo: SAQ.com

Château St. Thomas Pinot Noir 2017. Vin rouge, 750 ml. Code SAQ: 13387275. 19,55$

Château St. Thomas 2016

Malgré son prix un peu plus élevé, ce rouge est le vin libanais le plus vendu au Québec. Il met en vedette le merlot, accompagné de cabernet sauvignon et de syrah. Pas étonnant que ce soit un classique de la maison, puisque Joe-Assad Touma a fait sa thèse d’œnologie sur le merlot libanais. Le nez est très expressif et riche. En bouche, les arômes sont chauds et les tanins, veloutés. Sortez les mezzés et savourez le Liban!

Malgré son prix un peu plus élevé, ce rouge est le vin libanais le plus vendu au Québec. Photo: SAQ.com

Château St. Thomas 2016. Vin rouge, 750 ml. Code SAQ: 927830. 27,75$

Bonnes dégustations!

Jessica et son équipe