Photo Patricia Brochu

Expériences gourmandes pour les cinq sens

Au fil des décennies, le concept traditionnel du restaurant a commencé à se diversifier. On a vu apparaître des lieux, passagers ou bien implantés, synonymes d’expériences sensorielles, ludiques ou artistiques. Cette approche est de plus en plus d’actualité, alors que le confinement de la dernière année s’est accompagné de l’essor de la restauration à distance. Pour convaincre les clients de revenir s’attabler, il faut dorénavant plus qu’un bon repas. Et cela, certains restaurateurs l’ont bien compris. Cap sur la nouveauté!



Si on remonte grossièrement le fil de l’histoire de la restauration québécoise, on constate que les restaurants à thème, comme l’Auberge du dragon rouge, synonyme de plongée dans l’époque médiévale, ou bien le restaurant japonais Mikado, où on peut prendre place sur des tatamis pour déguster ses sushis, existent depuis longtemps. D’autres établissements de catégorie supérieure, à l’image de l’Europea à Montréal, et de La Tanière à Québec, proposent à leurs visiteurs de véritables circuits gastronomiques empruntant à l’histoire et à la culture du Québec.

À Montréal, le restaurant L'Auberge du dragon rouge propose une plongée dans l'époque médiévale. Photo: Facebook L'Auberge du Dragon Rouge - page officielle

Depuis quelques années également, les concepts de style pop-up, qu’il s’agisse de La Cabane, pendant le temps des sucres, dans le Vieux-Port de Montréal, du bar Pinkaroo de Monsieur Cocktail, pendant le Carnaval de Québec, ou encore du Shack du homard proposé par le restaurant estival Parasol, ont prouvé que les gens étaient prêts à sortir de leur zone de confort et à tester de nouvelles choses.

Le Shack du homard proposé par le restaurant estival Parasol. Photo: Facebook Parasol

Rien de tel qu’une petite visite gourmande et musicale aux Premiers Vendredis pilotés par l’Association des restaurateurs de rue du Québec (et dont on attend le retour avec impatience, du 3 au 5 septembre), qu’un repas gourmet mitonné par l’équipe de Menu Extra dans les vignes de Pinard & Filles, ou à plus petite échelle, qu’un duo tartares-crèmes glacées à la petite oasis éphémère du foodtruck Côtes-à-Côtes, à Fossambault-sur-le-Lac, pour nous sortir de notre quotidien.

La petite oasis éphémère du foodtruck Côtes-à-Côtes, à Fossambault-sur-le-Lac. Photo: @Les Festifs

Des restaurants de destination

Ce constat est d’autant plus vrai au sortir d’une année de confinement, au cours de laquelle les Québécois se sont habitués à consommer autrement, notamment en cuisinant davantage et en commandant des plats et des formules de restaurants livrés chez eux. Un certain nombre d’entre eux s’attendent désormais à ce que leur visite au restaurant ne soit plus seulement synonyme de bonne bouffe et de bon service. Ils veulent y vivre une expérience unique et s’y bâtir des souvenirs.

Une nouvelle donne avec laquelle des restaurateurs sont plus à l’aise que d’autres, c’est vrai, mais qui devrait prendre de l’ampleur dans le futur. Comme l’indique Alexandre Brosseau, propriétaire du Soubois et du tout nouveau Bazart, qui a ouvert ses portes le 21 juillet à Montréal, «l’expérience a changé. Il faut proposer un concept de destination avec quelque chose en plus de l’offre traditionnelle».

Ce dernier a transformé son supperclub Soubois en cabaret-spectacle à l’automne 2020, puis s’est lancé, avec son équipe Spkeasy et celle de Produkt, dirigée par Alex K, dans le très ambitieux projet du Bazart, qui se présente comme un parcours découverte destiné à faire rayonner les talents de la scène culinaire et artistique.

Visite immersive du Bazart

Bâti à même les murs du New City Gas, un des principaux lieux montréalais de concerts de musique électronique et d’événements d’affaires, le Bazart est tout d’abord une véritable invitation au voyage. Dès que l’on passe le seuil de son entrée discrète, située au fond d’un stationnement de la rue Wellington, on tombe dans un décor impressionnant qui emprunte, sans mauvais goût, à la fois aux terrasses provençales, aux palais du Maroc, aux lignes épurées crétoises et aux lounges de Playa del Carmen. Dépaysement assuré.

Le Bazart est tout d’abord une véritable invitation au voyage. Photo: Patricia Brochu

Le dépaysement est encore plus prononcé parce que le Bazart est un lieu assez vaste pour accueillir un grand bar extérieur, un restaurant avec une capacité de 200 couverts, une petite boutique d’artisanat, une toute première galerie d’art NFT (art numérique) et une autre à ciel ouvert offrant un panorama époustouflant sur la ville. Tout, des orangers grimpant aux murs du bar, aux fines cordelettes cascadant depuis le plafond du restaurant, en passant par les luminaires, miroirs et objets artisanaux est propice à l’imaginaire et, effectivement, à l’expérience avant même de boire un verre ou de se mettre à table.

Le voyage se poursuit néanmoins dans l’assiette, puisque le Bazart a réuni une très belle brochette de chefs, sommeliers, mixologues et serveurs issus des meilleures tables montréalaises pour parachever un concept aussi unique que complet. La cuisine du Bazart se spécialise en mezze et en grillades sur charbon à partager, réalisés le soir de notre visite par le chef Massimo Piedimonte, anciennement au Mousso. Des entrées aux desserts, le menu se conjugue, comme le décor, avec une élégante vision côtière et tropicale. Trempettes, tartares, salades, poissons et fruits de mer, viandes, finales sucrées, vins; tout était sous le signe de la fraîcheur, de la couleur et de la saveur. De quoi voyager par les papilles sans prendre l’avion.

Des entrées aux desserts, le menu se conjugue, comme le décor, avec une élégante vision côtière et tropicale. Photo: @Sophie Ginoux

Évidemment, une expérience dans ce genre d’établissement de destination a un coût, mais il n’est pas nécessaire d’y goûter tous les plats, vins et cocktails pour en profiter pleinement. Et nous ne serions pas surpris d’apprendre que d’autres endroits de ce type, misant sur la réunion de plusieurs disciplines artistiques et faisant appel à tous nos sens, voient le jour à l’avenir à travers le Québec. Parce que c’est d’expériences à présent que nous nous nourrissons hors de notre domicile. À découvrir!