La chronique Voyage de Marie-Julie Gagnon

Auteur(e)
Photo: Mélanie Crête

Marie-Julie Gagnon

Auteure, chroniqueuse et blogueuse, Marie-Julie Gagnon se définit d’abord comme une exploratrice. Accro aux réseaux sociaux (@mariejuliega sur X et Instagram), elle collabore à de nombreux médias depuis une vingtaine d’années et tient le blogue Taxi-brousse depuis 2008. Certains voyagent pour voir le monde, elle, c’est d’abord pour le «ressentir» (et, accessoirement, goûter tous les desserts au chocolat qui croisent sa route).

72 heures à Dakar

Dakar me captive, m’étourdit, m’enivre. La capitale m’apparaît chaque fois sous de différents visages. Histoire d’avoir un atterrissage plus doux dans le chaos de la ville, j’ai eu envie d’explorer la scène culturelle, avec la complicité de Voyageurs du Monde, lors de mon récent séjour au Sénégal.



Mes escapades dans la capitale ne sont jamais de tout repos. Lors de ma toute première, en 2003, je m’étais intéressée à l’épineuse question des talibés, ces enfants qui fréquentent des écoles coraniques et mendient pour leur marabout, dans le cadre d’une série de reportages réalisés en Afrique de l’Ouest sur différentes questions humanitaires. Au fil des ans, j’ai fait la tournée des marchés, visité la maison de Léopold Sédar Senghor, premier président de la République du Sénégal, gravi les marches qui mènent au monument de la Renaissance africaine et pleuré toutes les larmes de mon corps en pénétrant dans l’une des maisons où étaient gardés des esclaves sur l’île de Gorée. J’ai appris à négocier, tant pour acheter des aliments au marché qu’une paire de sandales, et à repousser les rabatteurs de tout acabit. J’ai testé les cars rapides, ces minibus jaune et bleu arborant des motifs multicolores et considérés comme des cerceuils roulants à cause de leurs nombreux accidents, pris des clandos (taxis clandestins) et des taxis-brousse.

Un car rapide, considéré comme un cercueil roulant à cause des nombreux accidents. Photo: Marie-Julie Gagnon

Le Sénégal ne se visite pas avec une liste de choses à cocher, en enchaînant les visites. Mieux vaut planifier peu et lâcher prise devant les imprévus – il y en a toujours. Se laisser porter par les rencontres, ne pas regarder sa montre trop souvent et se coller au rythme local facilite grandement l’adaptation.

Pour les derniers jours de mon voyage, j’avais toutefois envie d’un peu de ouate. D’éliminer le maximum d’embûches pour me concentrer sur ce qui m’intéressait vraiment: plonger dans la vie culturelle locale. C’est là que Voyageurs du Monde, spécialiste du voyage sur mesure, est entré en scène. Je ne recherchais pas le luxe: seulement les éléments qui constituent la base de mon bien-être depuis l’enfance. Ma définition du confort est bien différente quand je voyage en Afrique. Donnez-moi une chambre sans trop de bestioles, une douche qui fonctionne (c’est encore mieux s’il y a de l’eau chaude), une bonne aération (je ne dis pas non à la «clim», mais activée avec parcimonie), du papier de toilette (j’en traîne toujours sur moi) et l’accès à de l’eau potable (j’évite les bouteilles de plastique au maximum) et je serai comblée.

L’hôtel Djoloff. Photo: Marie-Julie Gagnon

J’ai cette fois-ci dormi à l’hôtel Djoloff, qui m’a offert tout cela et plus encore. Au troisième étage, le restaurant me permettait de souper tranquillement dans un lieu calme et tamisé après une journée d’exploration. Au petit matin, le buffet du déjeuner se prenait sur une terrasse sur le toit, où l’air circule bien. Il y avait même une machine à espresso!

 

Le restaurant du Djoloff. Photo: Marie-Julie Gagnon

Comme un ami

Ce qui me demande le plus d’énergie dans ce pays aux 1001 systèmes de transports parallèles? Me rendre d’un point A à un point B. La location d’une voiture avec chauffeur a grandement simplifié mes déplacements – et permis de garder mon énergie intacte pour mes recherches. Grâce au programme «Like a friend», qui nous jumelle à un habitant qui connaît bien sa ville et les thématiques qui nous intéressent, j’ai fait la connaissance de Sidiya Ba, un entrepreneur culturel passionné de mode et de culture. Ce dernier a agi comme entremetteur et m’a emmenée dans des galeries d’art que je n’aurais sans doute pas découvertes autrement.

Sidiya Ba devant le Studio Quatorzerohuit. Photo: Marie-Julie Gagnon

Coup de chance: le hasard a fait que j’étais sur place pendant la douzième édition de Partcours, période particulièrement foisonnante pour les amateurs d’art. «Plusieurs artistes profitent de l’événement pour faire leur vernissage, m’a expliqué Sidiya. Les expositions se terminent habituellement en décembre, mais plusieurs sont prolongées jusqu’au début d’année.»

Studio Quatorzerohuit. Photo: Marie-Julie Gagnon

Si j’ai plus qu’atteint mon objectif – j’ai pu visiter une bonne dizaine de musées et galeries –, ce sont surtout de nos discussions à propos de tout et de rien dont je me souviens, notamment autour des délicieux poissons et fruits de mer du sympathique restaurant Noflaye Beach, dont France Gall a jadis été copropriétaire.

Restaurant Noflaye Beach. Photo: Marie-Julie Gagnon

Sidiya m’a par exemple raconté avoir entendu toutes sortes de clichés à propos de son pays natal lorsqu’il étudiait le marketing et la communication numérique en France. «Un étudiant m’a déjà demandé si nous vivions dans les arbres en Afrique. Je lui ai dit oui, viens, tu vas te balancer dans les arbres! Il est venu et a été émerveillé. Il a dit qu’à partir de maintenant, il parlerait du Sénégal autrement.»

Impossible d’oublier ces anecdotes de piroguiers qui promettent d’emmener des Sénégalais en Europe, mais tournent en rond sur l’océan avant d’accoster dans des stations balnéaires du pays comme Saly et Ngor en pleine nuit, en criant aux passagers de s’enfuir le plus vite possible parce qu’ils ont été repérés.

Omar, notre chauffeur, m’a pour sa part raconté des histoires à glacer le sang à propos de l’attirance – pour ne pas dire l’obsession, dans certains cas – de certaines femmes étrangères âgées pour de jeunes hommes sénégalais. On connaît la situation des hommes qui recherchent de très jeunes femmes, mais quiconque a travaillé dans l’industrie touristique peut témoigner aussi du phénomène inverse.

Dans une société où certains codes m’échappent encore même en la côtoyant de près depuis deux décennies, j’ai franchement apprécié de me laisser prendre par la main par l’agence. Faire affaire avec des professionnels du voyage n’est pas un signe de faiblesse: c’est s’offrir l’assurance de pouvoir profiter pleinement du séjour plutôt que de passer son temps à gérer des questions logistiques.

Je rêve déjà d’un prochain séjour pour poursuivre l’exploration de cet univers culturel en pleine ébullition. Peut-être lors d’une prochaine biennale?

La plupart des frais de mon séjour à Dakar ont été assumés par Voyageurs du Monde, qui n’a eu aucun droit de regard sur cette chronique.

Mariée à un Sénégalais depuis 21 ans, Marie-Julie Gagnon s’est rendue sur le continent africain à plusieurs reprises. Dans cette série de trois chroniques, elle partage ses observations et son ressenti lors de son plus récent voyage en décembre 2023. Première chronique: «Paradis perdu?» Lisez-la ici. Deuxième chronique: «Zone d'inconfort?» Lisez-la ici.