Si la rhubarbe m’était contée

Elle se déploie dans un coin de nombreux jardins, demande peu ou pas d’entretien, se retrouve dans nos assiettes depuis des siècles, goûte l’été et revient chaque année : quand il est question de manger local, la rhubarbe répond toujours présente.

On croit que la rhubarbe est originaire d’un climat froid: elle aurait été remarquée pour la première fois en Sibérie, en Mongolie et au Tibet, mais aurait été cultivée par les Chinois depuis plus de 3000 ans. Puis elle aurait été introduite en Europe pour ses vertus médicinales, avant d’être intégrée dans notre alimentation vers la fin du 18e siècle. D’ailleurs, son nom latin évoque cette origine puisque rheubarbarum signifie «racine barbare» ou «étrangère».

Celle qui est souvent considérée comme un fruit de par l’utilisation qu’on en fait (dans les desserts surtout) est plutôt un légume. Elle serait parfaite pour accompagner les plats salés de poissons ou de viandes en apportant un peu de sucre et d’acidité, comme le fait la canneberge dans certaines recettes. De plus en plus de chefs d’ici remplacent l’acidité du citron par ce choix local.

La rhubarbe, qui est souvent considérée comme un fruit de par l’utilisation qu’on en fait (dans les desserts surtout), est plutôt un légume. Photo: Depositphotos

Les tiges, ou pétioles, de la plante se récoltent tout l’été, même si elles sont à leur apogée au printemps. Mais attention, pensez-y à deux fois avant de planter de la rhubarbe dans votre jardin: la vivace peut vivre jusqu’à 100 ans!

Pas de jardin? Pas de problème: les tiges de rhubarbe sont aussi disponibles en épicerie. D’ailleurs, saviez-vous que le plus important producteur de rhubarbe au pays se trouve à Saint-Eustache? Il s’agit des Fermes Serbi, qui fait pousser la variété Victoria, la plus populaire au monde.

SoBo, un titre énigmatique

SoBo est le quatrième roman de Jean Charbonneau, sept ans après son dernier opus et presque qu’une décennie après Tout homme rêve d’être un gangster, qui lui a valu le prix du meilleur premier roman policier de Saint-Pacôme en 2013.

Une page couverture tout aussi énigmatique que le titre. Un drapeau américain qui commence à se décolorer et un drôle de petit chien. À première vue, rien d’inspirant, sauf une interprétation personnelle hasardeuse de la chute vertigineuse de notre voisin d’en dessous.

SoBo, c’est South Baltimore, quartier nettement défavorisé de cette ville du nord-est des États-Unis. SoBo, c’est une image frappante de l’état de la nation américaine, marquée par la pauvreté, le racisme, la drogue et les petites mafias locales. Mais Baltimore, c’est aussi le site de la prestigieuse Université John Hopkins.

C’est à cette grande université qu’Olivia Langston vient d’obtenir le poste dont elle rêvait depuis longtemps. Cette Américaine vivait à Montréal avec son mari Joseph, traducteur pigiste. Conjointement, ils ont décidé de s’établir à SoBo pour la vie de quartier, mais aussi pour les prix plus abordables des logements. Pendant que sa conjointe sera au travail, Joseph pourra faire ses contrats de traduction à la maison. Il aura comme compagnon Pedro, le chihuahua du couple, nommé ainsi en l’honneur de l’ancien lanceur des Expos, Pedro Martinez.

Sauf que Joseph, du haut du toit de la maison, s’intéressera à ce qui se passe sur la Randolph Street. Il observera les habitants de son quartier, véritable microcosme de la société américaine. Il fera connaissance, avec plus ou moins de plaisir, avec chaque personne qui habite la rue. Et cette habitude pourrait lui jouer de mauvais tours.

Un roman choral

Commençons par une petite promenade pour rencontrer les habitants du quartier.

Voici Antoine, 16 ans, que tout le monde appelle To. Un père haïtien, une mère blanche, il est un «demi-black» dans une communauté à dominance blanche au cœur d’une ville majoritairement noire. Son meilleur ami, Lil Em, a de grandes tendances vers la délinquance.

Un peu plus loin réside Floyd Amoun, maniaque de sécurité, qui possède un arsenal de caméras pour voir ce qui se passe à l’extérieur.

Pas très loin, vous ne pouvez éviter Margot Kosnik, car elle, elle ne vous manquera pas. Raciste jusqu’au bout des ongles, elle est née dans le quartier, y a toujours vécu et connaît tout le monde.

Si vous croisez un homme, les yeux hagards, le cerveau enfumé par la drogue, soyez certain que vous avez devant vous Frank Lombard, Frizzy pour les voisins du quartier.

Enfin, il ne faudrait pas oublier Barb Butkus, la Crack Lady. Sous des dehors d’aimable grand-mère, elle a fait de sa maison un véritable carrefour giratoire de la drogue.

Finalement, patrouillant dans la rue, le policier Johnny Berlin, fier dans son uniforme noir et avec plein d’idées préconçues sur la vie et les gens de son milieu.

C’est à travers ces yeux que vous suivrez leur vie au quotidien; car SoBo est un roman choral donnant la parole à tous les personnages. Chacun d’entre eux décrira ce qu’il voit, mais surtout, ce qu’il ressent. Chaque point de vue possède son intérêt, chaque perception reflète les personnes qu’ils sont, mais tous seront soit victime, soit coupable et parfois les deux, de crimes de violence, de racisme, d’intimidation, d’envie et de jalousie.

Le couple de Joseph et d’Olivia entraînera une vision différente. Joseph, le Québécois francophone voulant s’intégrer dans la vie de quartier comme il le ferait sur le Plateau Mont-Royal, s’attire rapidement des ennuis. Et Olivia, Bostonnaise de naissance, probablement démocrate et humaniste, peut poser un regard idyllique, parfois même un peu naïf, sur son nouveau coin d’Amérique.

Tout est en place pour assister à la tragédie du quotidien d’une rue, d’un quartier en proie aux tensions sociales, aux crimes de toutes sortes, au combat pour définir son identité et, ultimement, vivre à sa façon le fameux rêve américain… qui se transforme souvent en cauchemar!

Mon appréciation

J’avoue que, dans les premiers chapitres, j’ai été un peu déséquilibré par la structure du roman. Je cherchais un fil conducteur dans le récit, une action qui se développe pour y accrocher les personnages. Mais au fur et à mesure de ma lecture, je me suis rendu compte que le fil que je devais trouver c’était un fil de trame, celui qui nouait le tissu social de cette communauté.

Jean Charbonneau possède une plume très efficace, qui trace à grands coups de mots et de sentiments un portrait de la société américaine à tendance républicaine. Non, on ne voit pas les grands politiciens à SoBo, mais on ressent leur influence. L’auteur réussit, avec ses différents narrateurs, à rendre vraisemblable chacune de leurs paroles, chacune de leurs pensées. Je me suis même surpris à faire des liens entre le roman et les actualités américaines. Quand la fiction nous ouvre la porte de la réalité…

Lire SoBo, c’est lire une retranscription trempée dans le réel de ce qu’est la vie dans les quartiers en phase d’embourgeoisement. Le roman noir possède cet avantage de montrer aux lecteurs les failles profondes de la société qu’il décrit, de peindre une réalité sociologique factuelle, tout en racontant une bonne histoire.

Jean Charbonneau nous offre ici un roman différent, qui nous décrit le visage d’une Amérique en perte d’identité, minée par le racisme, la violence et la pauvreté. Les personnages qui nous la racontent en font une description tellement crue, qu’il nous reste juste à espérer que le fameux «God bless America» se réalise vraiment.

Bonne lecture!

SoBo, Jean Charbonneau. Éditions Druide. 2023. 420 pages

Bonne fête, L’épicerie!

1000 bougies sur un gâteau, c’est beaucoup, et c’est ce qui décore celui de l’émission L’épicerie.

Mille épisodes en 21 saisons: c’est ce qui est affiché au décompte de l’émission L’épicerie, diffusée sur Radio-Canada depuis 2002. Le magazine d’information connu de plusieurs se veut pratique et léger et propose aux téléspectateurs des enquêtes sur divers produits, des tests de goût et des reportages en lien avec les tendances alimentaires.

Témoin d’un secteur en perpétuelle évolution, L’épicerie a vu changer les Québécois dans leur rapport à l’alimentation. «On est passés du Petit Québec au Alfred le Fermier; du Maxwell House à l’espresso; de la Labatt 50 à la bière de microbrasserie», disait en 2020 au magazine Caribou Denis Gagné, qui était alors à la barre de l’émission depuis près de 20 ans.

Témoin d’un secteur en perpétuelle évolution, L’épicerie a vu changer les Québécois dans leur rapport à l’alimentation. © Radio-Canada

Depuis, il a cédé sa place à Myriam Fehmiu, qui coanime avec Johane Despins, présente de son côté depuis 750 épisodes.

Même après toutes ces années, les sujets en lien avec l’alimentation ne manquent pas selon Myriam Fehmiu, invitée à Bonsoir bonsoir! pour parler de cette 1000e émission. «Il y a toujours de nouveaux angles, de nouvelles actualités et de nouvelles personnes pour nous en parler, et c’est pour ça que ça reste toujours trippant.»

Denis Gagné a cédé sa place à Myriam Fehmiu, qui coanime avec Johane Despins. © Radio-Canada

 

1000 épisodes, ça se fête!

Afin de souligner l’occasion, l’émission a décidé de présenter un épisode spécial au sujet des gens du milieu qui travaillent dans l’ombre et qu’on croise souvent sans les voir. L’épisode, qui a été diffusé le 14 juin dernier, est désormais disponible en ligne.

Bonne nouvelle pour les amateurs de polar!

Bonne nouvelle pour les amateurs de polar! Depuis trois ans, occasionnellement, l’auteur du blogue Polar noir et blanc, Richard Migneault, publiait sur Avenues.ca une critique de polar. Dorénavant, ce rendez-vous avec nos lecteurs sera mensuel. Vous aurez donc le plaisir de le lire ici, dans notre rubrique Livres de la semaine, et nous nous en réjouissons.

Richard est un passionné et un expert du polar. Passion qui lui a fait signer lui-même plus de 700 des 1400 chroniques parues sur son blogue au cours de 13 années où il a animé cette page Web à laquelle collaboraient une quinzaine de chroniqueurs. Le 14 juin, Richard mettait fin à cette belle aventure, mais le blogue, toujours accessible, reste une source de références et de chroniques polar incroyable que vous pouvez continuer de consulter.

Photo: © Maxyme G. Delisle

Richard Migneault, qui a fait carrière comme directeur d’école, consacre sa retraite à sa passion pour la lecture et les livres. Il est d’ailleurs coauteur et directeur de plusieurs collectifs de nouvelles parus aux Éditions Druide qui ont eu un beau succès de librairie, comme Crimes à la bibliothèque, Crimes à la librairie, Crimes au musée (voir notre texte) et quatre titres pour inciter les jeunes à lire: Mystères à l’école, Les nouveaux mystères à l’école, Les petits mystères à l’école et Les nouveaux petits mystères à l’école. Richard a également codirigé avec Émilie Guilbeault-Cayer le collectif De racines et de mots, un ouvrage qui explore le thème de la persistance des langues en Amérique du Nord et dont nous avons parlé sur Avenues.ca.

Nous sommes ravis d’accueillir Richard dans notre équipe de collaborateurs réguliers et nous sommes persuadés que vous prendrez un vif plaisir à lire ses critiques et à le suivre dans cet univers unique qu’est le polar. Sa première chronique régulière paraîtra cette semaine et vous pouvez déjà lire sa dernière chronique occasionnelle sur Avenues.ca portant sur le dernier Stephen King et lire ou relire ses textes précédents ici.

Bonne lecture!

Maison et atelier Rodolphe-Duguay: un univers de création

À Nicolet, la maison et atelier Rodolphe-Duguay révèle toutes les facettes de la relation entre deux artistes, le peintre-graveur du même nom et l’écrivaine et poétesse Jeanne L’Archevêque. Visite d’un lieu où art, culture et histoire se marient.

Construite en 1835, la jolie maison blanche aux volets bleus se campe dans un décor champêtre, entourée d’arbres. C’est toutefois quelques années plus tard, en 1854, que l’histoire de la résidence devient intéressante. Cette année-là, Calixte Duguay (le grand-père de celui qui deviendra un des maîtres de la gravure au Canada) achète la propriété. Il la lègue plus tard à son fils, Jean-Baptiste, le père de Rodolphe. L’artiste a vu le jour entre ses murs.

Construite en 1835, la jolie maison blanche aux volets bleus se campe dans un décor champêtre, entourée d’arbres. Photo: Facebook Maison et atelier Rodolphe-Duguay

D’esprit néogothique à l’origine, la demeure a été transformée au courant du 19e siècle. Elle est depuis un exemple de maison québécoise d’inspiration néoclassique. Comme les autres habitations rurales de l’époque, elle combine notamment un plan rectangulaire, des éléments placés symétriquement sur la façade, un retour de la corniche sur les murs pignons, une galerie couverte et des lucarnes à pignon à l’avant.

L'atelier offre une lumière naturelle indirecte aux artistes grâce à ses grandes verrières. Photo: Facebook Maison et atelier Rodolphe-Duguay

À son retour de Paris en 1927, Rodolphe Duguay construit avec son père un atelier à l’image de celui qu’il louait dans la Ville Lumière. Jeanne L’Archevêque a également son mot à dire sur l’endroit qui servira de lieu de création pour le couple. C’est d’ailleurs elle qui le baptise L’Ermitage.

Rodolphe Duguay, peintre. Photo: Gaby (Gabriel Desmarais), Mai 1965, BAnQ

Le nouveau bâtiment en bois offre une lumière naturelle indirecte aux artistes grâce à ses grandes verrières. Il reprend aussi le parement de planches de bois peint en blanc et la couverture en tôle de sa voisine, à laquelle il est relié par un passage couvert. Près de cent ans plus tard, l’atelier est encore préservé presque tel quel.

Reconnue en 1977 comme lieu patrimonial, la Maison et atelier Rodolphe-Duguay accueille désormais des expositions, des ateliers et d’autres activités. Elle permet surtout d’en apprendre davantage sur la vie et l’œuvre d’un peintre-graveur méconnu.