Changements climatiques: quand les vins se réinventent
Les changements climatiques ont une influence sur le monde du vin. Voici quelques tendances qui se sont dégagées de la conférence Tasting Climate Change/Goûter aux changements climatiques, accompagnées de suggestions de bouteilles à découvrir.
La quatrième édition de la conférence Tasting Climate Change/Goûter aux changements climatiques s’est tenue à Montréal les 22 et 23 janvier derniers. Pour l’occasion, plus de 500 participants et conférenciers se sont rassemblés pour discuter de changements climatiques, de leur influence sur les vins et de ce que les producteurs et consommateurs peuvent prendre comme actions pour réduire leur empreinte écologique et s’adapter aux changements en cours.
Pour Michelle Bouffard, l’instigatrice de cette conférence internationale, ce rendez-vous est la preuve que les solutions existent. À travers quatre conférences et neuf tables rondes, les acteurs de l’industrie du vin sont amenés pendant deux jours à réfléchir sur des questions aussi diverses que la santé des sols et l’avancée de maladies fongiques, mais aussi de la pertinence des certifications et les pratiques d’emballage, en passant par les types de viticultures telles l’agriculture régénératrice et l’agroforesterie. Voici quelques tendances qui se sont dégagées de cette édition.
La montée en force des cépages hybrides
Issus du croisement entre espèces de vignes européennes et américaines, les cépages hybrides sont bien adaptés pour résister aux conditions météorologiques extrêmes et aux maladies. Ils représentent une solution prometteuse pour maintenir la production de vin dans un environnement changeant. Leur capacité à prospérer dans des climats plus frais ou plus chauds, tout en consommant moins d’eau, en fait de précieux alliés. De plus, ces hybrides offrent une palette de saveurs et d’arômes diversifiée qui enrichissent le patrimoine viticole mondial.
Au Québec, les hybrides ont la cote depuis les années 1980. On retrouve d’excellents exemples de bulles, de blancs et de rouges faits de frontenac, marquette, vidal, saint-pépin ou encore de seyval. Le Domaine Bergeville, situé dans les Cantons-de-l’Est, a opté pour les hybrides en raison de leur génétique locale résistante, mais aussi de leur caractère unique qui contribue à former l’identité des vins du Québec.
Encore plus de certifications
La question des certifications demeure encore un sujet d’actualité chaud. Dans les dernières années, les consommateurs ont pu voir de nombreux logos apparaître sur les bouteilles. Certes, il n’est pas toujours aisé de s’y retrouver, mais ces certifications contribuent tout de même à augmenter les ventes et, conséquemment, à changer les pratiques.
Un premier type de certification englobe toutes les étapes de la production, de la vigne à la bouteille – ce sont les certifications «durables». On aurait tort de croire que ces initiatives ne sont que du green washing. Ces programmes couvrent les aspects écologiques de la production viticole, mais aussi les enjeux économiques et sociaux telles les conditions de travail des employés. Des initiatives régionales comme le programme New York Sustainable Winegrowing et nationales comme la certification Sustainable Winegrowing New Zealand produisent des résultats mesurables et tangibles.
L’agriculture régénératrice
Depuis plusieurs années, on retrouve des certifications qui se réfèrent spécifiquement à la viticulture, soit les méthodes de productions des raisins dans le vignoble. Si nous sommes assez familiers aujourd’hui avec l’agriculture biologique et en biodynamie, d’autres labels voient le jour, comme celui de l’agriculture régénératrice. Il s’agit d’une approche de l’agriculture visant non seulement à minimiser les impacts négatifs sur l’environnement, mais aussi et surtout à améliorer activement les écosystèmes dans lesquels elle opère. Cette méthode se concentre sur la régénération des sols, la conservation de l’eau, la biodiversité et la séquestration du carbone. Pour en savoir plus, n’hésitez pas à visionner l’excellent documentaire Kiss the Ground.
À la Société des alcools du Québec (SAQ), on retrouve des vins de plusieurs vignobles en agriculture régénératrice. Ce logo ne se retrouve pas à tout coup sur les étiquettes de tous leurs vins, mais pour recevoir une certification, l’ensemble des parcelles d’un domaine doit adopter ces pratiques. Bonterra Organic Estate aux États-Unis et la famille Gassier en France sont deux exemples de vignobles pratiquant l’agriculture régénératrice.
Des emballages plus écoresponsables
De plus en plus, on se penche sur la question de l’embouteillage du vin. Plusieurs options plus écoresponsables que la traditionnelle bouteille en verre de 750 g s’offrent aujourd’hui aux vignerons et vigneronnes désirant minimiser leur bilan carbone. Pour certains, comme Dean Stoyka, l’œnologue de Stratus Vineyards, en Ontario, le changement prend la forme de bouteilles allégées pesant 370 g, soit la moitié moins que la bouteille habituelle. À elle seule, cette mesure a permis à cette maison de réduire de 16% son empreinte écologique. D’autres vignobles, comme ceux de Miguel Torres, se font les fervents défenseurs de la réutilisation des bouteilles.
Autre phénomène à surveiller: le «vinier», comme l’appelaient nos parents, qui revient sur les tablettes. Reste à restaurer sa réputation, puisqu’on avait malheureusement l’habitude d’y emballer des vins médiocres, ce qui n’est pas plus la norme aujourd’hui. On retrouve des vins de plus en plus qualitatifs, et même bio, dans ces boîtes. D’ailleurs, de réputés vignerons, qui plus est des chouchous du Québec tels Brigitte Jeanjean et Alain Brumont, ont récemment opté pour ce format qui permet de réduire les émissions de gaz liées au transport, mais aussi la quantité de déchets produits.
Le Pive Gris Rosé. Vin rosé, 3L. Languedoc-Roussillon, France. Code SAQ: 13731371 | 54$
Félicitations à Michelle Bouffard et à tous les conférenciers et conférencières qui ont su inspirer l’auditoire en se lançant dans des discussions parfois difficiles, mais essentielles.
Bonnes dégustations!
Marieve Isabel
Rédactrice
Club de vins Jessica Harnois