Photo: Marie-Julie Gagnon
1 février 2017Auteure : Marie-Julie Gagnon

Abou Dhabi, entre traditions et modernité

Abou Dhabi n'a plus rien à voir avec le modeste village de pêcheurs qu'elle était en 1930. Laboratoires technologiques, véhicules futuristes, hôtels ultra-luxueux... La capitale des Émirats arabes unis déconcerte.



Visiter Abou Dhabi déconcerte. Fondée en 1791, la capitale des Émirats arabes unis depuis 46 ans semble avoir conservé bien peu de traces du passé. On a du mal à prendre ses repères entre les hôtels ultra-luxueux et les buildings qui poussent comme des champignons. Résolument tourné vers l’avenir, le plus grand des sept émirats se définit au rythme de ses activités économiques et touristiques. Dire qu’en 1930, Abou Dhabi n’était qu’un modeste village de pêcheurs!

«Nous créons actuellement les futurs sites historiques», me répond Glenn Johnston, vice-président des communications corporatives et directeur des relations publiques du Moyen-Orient, de l’Asie et de l’Australie des hôtels Jumeirah de Dubai et Abou Dhabi quand je lui fais part de mes impressions. Voilà qui résume assez bien l’effervescence ambiante. Les regards sont résolument tournés vers l’avenir. Abou Dhabi semble chercher son identité sur tous les fronts.

Photo: Marie-Julie Gagnon
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De l’art à la techno

Parmi les premiers producteurs d’hydrocarbures dans le monde, l’émirat représente à lui seul 60% du PIB total du pays.

Depuis 2007, les étrangers peuvent visiter l’opulente mosquée Sheikh Zayed, la seule accessible aux non-musulmans.

À la suite d’un accord intergouvernemental entre la France et l’émirat signé en 2007, le Louvre conçu par l’architecte français Jean Nouvel ouvrira enfin ses portes en 2017. Le plus grand musée en construction au monde ne sera pas le seul à attirer les amateurs d’art, puisque le Guggenheim, dont le design est signé Frank Gehry, sera son voisin sur l’île Saadiyat. La cité des arts, le musée maritime et le musée national Cheikh Zayed feront également partie du nouveau district culturel.

Masdar, à une trentaine de kilomètres d’Abou Dhabi, se veut pour sa part un laboratoire technologique hors du commun. On a l’impression d’atterrir dans un univers à mi-chemin entre The Jetsons et Tatooine, de Star Wars. L’architecture des bâtiments est à la fois moderne et inspirée des traditions. Les plus grandes compagnies du monde se côtoient dans cette ville qui tente d’inventer l’avenir en misant sur l’énergie verte. Des voitures sans conducteurs? Déjà le passé à Masdar. On accède à la ville à bord de petits véhicules futuristes depuis 2010 dans cette ville créée en 2008!

Masdar compte des cafés, des restaurants et des boutiques. «Nous tentons de créer un environnement où votre première option est de marcher», explique Stephen Severance, responsable de la stratégie et de l’innovation. Les intentions du gouvernement sont claires: en construisant la première ville à empreinte carbone nulle au monde, l’émirat doit devenir le leader des énergies renouvelables.

Masdar. Photo: Marie-Julie Gagnon
Masdar. Photo: Marie-Julie Gagnon

On s’habille comment?

Mettre les pieds pour la première fois au Moyen-Orient entraîne bien des interrogations. Difficile de se faire une idée de la réalité sur place. La population des Émirats arabes unis étant à 80% musulmane, à quel point une femme occidentale doit-elle adapter sa garde-robe sur place? Je l’avoue, jamais, depuis mon voyage en Inde, je ne m’étais autant questionnée sur le contenu de ma valise.

J’ai rapidement réalisé que je m’étais pris la tête pour rien. On compte 80% d’expatriés à Abou Dhabi. On croise autant de femmes portant la burqa que d’Occidentales légèrement vêtues. Personne ne semble se formaliser de ce perpétuel choc des cultures.

À la mosquée, toutefois, les codes doivent être strictement respectés. Même Rihanna a été expulsée, en 2013, parce qu’elle avait refusé de s’y conformer! Les jupes et les pantalons doivent presque toucher le sol et les femmes doivent couvrir leurs cheveux. Des abayas noires sont prêtées à celles qui n’ont pas de foulard et il est nécessaire de retirer ses chaussures.

Alors qu’on me demande à deux reprises de replacer une mèche de cheveux rebelle sous mon foulard, je remarque une touriste asiatique arborant des têtes de mort sur le sien. Personne ne semble s’en formaliser. Quelques minutes auparavant, une femme voilée se mirait dans son iPad comme s’il se fût agi d’un miroir. Vous avez dit entre traditions et modernité?

Photo: Marie-Julie Gagnon
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Du désert aux faucons

Après un tour de chameau beaucoup trop bref et un peu de «dune bugging» — qui consiste à dévaler les dunes en 4X4 — dans le désert Al Khatim, je visite Heritage Village, reconstitution d’un village dans une oasis. L’endroit, l’un des rares à permettre de plonger dans le passé, présente certains aspects de la vie traditionnelle dans le désert.

C’est toutefois en visitant l’Hôpital des faucons d’Abou Dhabi que j’ai l’impression de m’approcher de l’essence même de la culture des émirats. Margrit Gabriele Muller, la directrice, explique l’importance de l’animal dans la vie des hommes du désert, encore utilisé aujourd’hui pour la chasse. «Nous ne parlons pas d’oiseaux, nous parlons des enfants des Bédouins», résume-t-elle. D’ailleurs, les faucons possèdent leur propre passeport pour voyager!

Avant de partir, je bois un «camelccino» — cappuccino fait avec du lait de chamelle — du haut de la tour d’observation de l’hôtel Jumeira. En scrutant l’horizon, je pense aux pêcheurs de perles, qui ont plongé pendant 2000 ans dans l’espoir de trouver des trésors dans les coquillages. À la fin du XIXe siècle, Abou Dhabi comptait plus de 400 bateaux, ce qui en faisait la flotte perlière la plus importante. Le déclin s’est produit au début des années 1930, au moment où la guerre fait rage.

Alors que je m’amuse à compter les grues, je me dis qu’au fond, peu importe les époques, l’homme continuera toujours à chercher des trésors.

Photo: Marie-Julie Gagnon
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Pratico-pratique:

  • Abou Dhabi signifie «père de la gazelle». C’est le plus grand des émirats et il compte plus de 200 îles.
  • La température annuelle moyenne est de 24 degrés Celcius pendant le jour, mais entre juin et septembre, le mercure peut grimper jusqu’à 42.
  • On peut visiter virtuellement la mosquée Sheikh Zayed grâce à Google Street View.
  • La seule mosquée d’Abou Dhabi accessible aux non-musulmans porte le nom du fondateur de la fédération des Émirats arabes unis. L’enterrement de Sheikh Zayed est la première cérémonie qui y a eu lieu.
  • Quelques expériences, comme la «Pearl Journey», qui permet de mieux comprendre le travail qu’effectuaient jadis les plongeurs de perles, permettent de mieux comprendre le passé.
  • Ethiad Airways offre un vol direct hebdomadaire depuis Toronto.
  • J’ai logé aux fabuleux hôtels St. Regis Abu Dhabi, Nation Towers et St. Regis Saadiyat Island Resort.
Photo: Marie-Julie Gagnon
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