Manoir Fraser: un joyau à Rivière-du-Loup

Le manoir Fraser fait la fierté de Rivière-du-Loup depuis près de 200 ans. La résidence seigneuriale est aussi intimement liée au développement de la ville. Incursion dans le passé pour en savoir plus sur ce magnifique domaine.

L’histoire du manoir Fraser remonte à 1829. Alexandre, le premier seigneur de la lignée Fraser, cède alors une terre de son domaine à un certain Timothy Donohue, qui y érige une maison de style néoclassique en pièce sur pièce.

De retour à Rivière-du-Loup après quelques années dans le Témiscouata, Alexandre Fraser rachète la modeste résidence. Il déménage avec sa femme et ses deux enfants dans ce qui devient le sixième et dernier manoir de la seigneurie.

Résidence du Seigneur Fraser, Fraserville, Que. Photo: BAnQ

Après son décès, la propriété passe aux mains de son fils William. Soucieux que sa maison reflète son statut social, le nouveau maître des lieux entreprend d’importants travaux en 1888.

On doit la transformation à l’architecte de Québec Georges-Émile Tanguay, qui adopte le style néo-Queen Anne. Comme le souligne le Répertoire du patrimoine culturel du Québec, la composition asymétrique de la façade, la tourelle d’angle, le pignon à demi-croupe au-dessus de l’entrée et les petits barreaux de la galerie empruntent tous à ce courant architectural en vogue à l’époque.

L’intérieur, luxueux et surchargé, témoigne du rôle important des Fraser dans la société. Photo: Facebook Manoir Fraser

L’intérieur, luxueux et surchargé, témoigne aussi du rôle important des Fraser dans la société. La galerie qui entoure le manoir sur trois côtés et les portes-fenêtres permettent pour leur part d’admirer les jardins de fleurs et d’arbres fruitiers. La vue impressionnante sur le fleuve n’est pas non plus à négliger.

Les Fraser semblent bien attachés au domaine: celui-ci sera habité par la famille (et quatre générations!) pendant 150 ans, jusqu’au décès de Thérèse-Caroline Fraser Lizotte en 1986.

Le Manoir Fraser en 1975. Photo: Jules Rochon, BAnQ

Les années qui suivent s’avèrent difficiles pour la prestigieuse résidence. L'immeuble désert se détériore, notamment en raison d’infiltrations d’eau. Faute de moyens, Héritage canadien du Québec, officiellement propriétaire depuis 1979, entretient au minimum le manoir Fraser.

Grâce à la mobilisation de la communauté, le domaine seigneurial est classé bâtiment patrimonial en 1991. Photo: Facebook Manoir Fraser

Grâce à la mobilisation de la communauté, le domaine seigneurial est classé bâtiment patrimonial en 1991. Il retrouve ses lettres de noblesse entre 1996 et 1997, et devient ensuite un centre d’interprétation. Les lieux, ouverts au public, replongent aujourd’hui les visiteurs dans l’histoire des Fraser et de Rivière-du-Loup.

Dédé, Christian Quesnel

Après un film, des documentaires et moult entrevues, que peut-on apprendre de plus sur Dédé Fortin, regretté chanteur des Colocs? Peut-être pas grand-chose. Mais des choses à voir, ça, il en reste encore. Et c’est ce qu’on trouve dans la magnifique bande dessinée de Christian Quesnel qui sort en librairie cette semaine.

Quiconque s’est un tant soit peu intéressé à André «Dédé» Fortin connaît les grandes lignes de sa vie. Son enfance à Saint-Thomas-Didyme, au Lac-Saint-Jean, son arrivée, son succès, ses histoires amoureuses et son suicide marquant et inoubliable à Montréal. «Au-delà de l’icône et du personnage public, on retrouve l’humain», pouvait-on lire dans le communiqué de presse annonçant la publication d’une bande dessinée en sa mémoire. C’est ce qui a attiré notre attention. Ça, et le nom de son auteur, Christian Quesnel, auteur de bandes dessinées inspirées de l’histoire, à qui l’on doit notamment Mégantic – Un train dans la nuit, lauréat de nombreux prix.

Tout au long de la bande dessinée, paroles de chansons et extraits de carnets de notes s’entrecroisent avec des témoignages de proches.

Après une courte préface de Jim Corcoran, on est plongés dans les paroles de Dédé, qui prennent une nouvelle dimension avec les dessins de Christian Quesnel. Les premières pages sont particulièrement poignantes.

Au-delà des magnifiques dessins de Christian Quesnel, ce qui fait la force de cette bande dessinée, c’est l’accès à l’écriture de Dédé Fortin.

Tout au long de la bande dessinée, paroles de chansons et extraits de carnets de notes s’entrecroisent avec des témoignages de proches. Au-delà des magnifiques dessins de Christian Quesnel, ce qui fait la force de cette bande dessinée, c’est l’accès à l’écriture de Dédé Fortin. Ses notes personnelles et correspondances y sont publiées, ratures incluses. Avoir ainsi accès à «la main» de Dédé donne l’impression d’avoir accès à l’homme derrière les mots. C’est donc mission réussie pour Christian Quesnel.

Dédé, Christian Quesnel. Éditions Libre Expression. 2023. 112 pages

Une femme passe à l’histoire dans le monde de la pâtisserie

Le meilleur pâtissier au monde est pour la première fois de l’histoire… une pâtissière! En effet, à 35 ans, la Française Nina Métayer a récemment décroché l’important titre 2023 décerné par l’Union internationale des boulangers et pâtissiers.

La femme entre ainsi dans l’histoire de la gastronomie française puisque c’est la première fois, en cette 51e édition, que le prix est remis à une femme.

C’est la première fois, en 51 édition, que le prix est remis à une femme. Photo: Facebook Nina Métayer

Réputée pour ses galettes des Rois originales, la pâtissière, qui a débuté son parcours en boulangerie, s’est fait connaître dans l’émission Le Meilleur Pâtissier, où elle faisait partie du jury. Elle a participé ensuite à diverses émissions et a aussi reçu le titre de «meilleure pâtissière de l’année» en 2016 par le magazine Le Chef, puis en 2017, par le guide Gault & Millau. Elle est souvent reconnue pour la beauté de ses desserts.

Les Français peuvent commander les pâtisseries de Nina Métayer en ligne ou goûter quelques créations en passant au Printemps du Goût.

Les Français peuvent commander les pâtisseries de Nina Métayer en ligne. Photo: Facebook Délicatisserie

Plafond de verre

Après plus de 50 remises de prix par l’Union internationale des boulangers et pâtissiers, plusieurs, dont le média Libération, considèrent que cette reconnaissance à une femme arrive bien (trop) tardivement. Le quotidien français se questionne sur ce retard qu’il peine à expliquer et lance le souhait que plus de femmes soient récompensées «alors que s’ouvre la saison des guides culinaires».

Pour la pâtissière, ce trophée est «une très belle reconnaissance». Dans les médias, elle a ajouté: «Durant ma carrière, on m’a tellement dit que je n’y arriverais pas, qu’en étant une femme, je ne pourrais pas avoir une famille et être cheffe pâtissière…».

Voilà qui est une belle revanche.

Yō no Ie: la maison parfaite pour les retraités?

Une maison parfaite pour les retraités? C’est à tout le moins avec cette clientèle en tête que l’entreprise japonaise MUJI a créé la demeure Yō no Ie, aussi appelée la maison du soleil. Tour du propriétaire.

Connaissez-vous MUJI? Le détaillant japonais propose depuis 1980 des produits sans marque de qualité, qui vont des meubles aux vêtements en passant par les accessoires de voyage, le tout sans détails superflus. La marque s’est aussi lancée depuis près de 20 ans dans la construction de maisons.

À l’image des articles vendus en magasin, les résidences préfabriquées sont minimalistes, mais chaque détail est soigneusement réfléchi. Lors d’un voyage au Japon il y a quelques années, l’auteure de ces lignes a eu un véritable coup de cœur pour la maison-fenêtre Mado no le, où on a maximisé le rangement sans compromettre le style. (Ah, si seulement elle était disponible au Québec!)

Cette maison s’étend de tout son long, en banlieue ou à la campagne.

Le dernier modèle en liste tranche avec ses prédécesseurs. Fini les édifices étroits qui misent sur la hauteur; la maison du soleil s’étend de tout son long, en banlieue ou à la campagne.

Conçue pour la population âgée en croissante augmentation au Japon, celle-ci ne compte aucun escalier et nécessite peu d’entretien. Elle est aussi abordable, à environ 186 300$.

Conçue pour la population âgée en croissante augmentation au Japon, celle-ci ne compte aucun escalier et nécessite peu d’entretien.

Le bâtiment se pare de bois clair, surmonté d’un toit en tôle de couleur ardoise. L’intérieur, baigné de lumière naturelle, est pensé sur un plan ouvert. Il n’y a pas de colonnes ni de divisions claires entre les pièces. Comme on pouvait s’y attendre, le décor est épuré et on retrouve de nombreux espaces de rangement.

Le décor est épuré et on retrouve de nombreux espaces de rangement.

Une grande terrasse prolonge significativement l’espace de vie. On aime bien le foyer encastré qui donne envie de s’asseoir dehors même par temps froid. Malheureusement, la demeure Yō no Ie n’est en vente qu’au Japon. On peut tout de même en rêver!

Sierra Negra, Jean-Benoît Nadeau

Dans une autre vie, au début de sa carrière, le journaliste Jean-Benoît Nadeau, notre éditorialiste sur Avenues.ca, a fait de grands reportages sur la spéléologie, une discipline qu’il affectionne particulièrement et qui l’a entraîné aux confins du Mexique. C’est de cet univers qu’il a tiré son premier roman: Sierra Negra, aux Éditions Château d’encre. Un roman aussi dense que la passion de ses protagonistes et qui prend lui-même des allures d’expédition dans les profondeurs. Car tout comme les spéléologues québécois, australiens et belges du roman, qui descendent dans les entrailles de la Terre, c’est par palier que se dévoilent l’intrigue et les personnages.

Une trame narrative soutenue dans laquelle les intrigues, les rivalités, l’amour et des éléments surréels s’entremêlent dans une course vers une richesse plus que convoitée par les habitants locaux: l’eau qui fait défaut à la région et qui se cacherait dans une de ces montagnes et cavernes. L’eau, ou les trésors que certains croient s’y trouver…

Secrets, manigances, bataille rangée, l’auteur nous entraîne dans une intrigue aussi enchevêtrée que la forêt mexicaine parfois aussi profonde et sombre que les cavernes que cette expédition explore. Que trafique donc Trevor, le chef de l’expédition dont les intentions cachées brouillent les pistes?

Mais les spéléologues ne sont pas seuls sur le terrain, deux familles mexicaines, les Leal et les Garcia, ennemies à la vie à la mort, multiplient elles aussi les subterfuges. Les uns pour trouver l’eau que don Eladio Leal soupçonne depuis longtemps couler quelque part dans ces grottes qui gardent jalousement leurs secrets alors que sa communauté en a grand besoin. Et les autres, du clan Garcia, pour un hypothétique trésor qu’ils croient enfoui dans les entrailles des cavernes. Car si ce n’était pour trouver la grenouille d’or ou autres trésors bien ancrés dans les croyances et le folklore de la région, pourquoi des Canadiens et leurs compères risqueraient-ils leur vie, investissaient-ils autant d’argent et de moyens dans de pareilles expéditions? Pour le simple plaisir de les explorer? Les Garcia n’y croient pas et sont prêts à tuer pour accaparer les éventuelles richesses.

Entre les ronds de jambe avec les autorités locales, l’amitié ou l’inimitié envahissante des locaux, l’équipe aura fort à faire pour cartographier, documenter, explorer ces cavernes et ces grottes et révéler leurs secrets. Le narrateur, Michel, quant à lui, amoureux d’Ann, la femme du chef de l’expédition, et spécialiste en hydrologie, se prendra d’une amitié un peu étrange pour une créature humaine, Xochtil, dite Xochita, que la communauté rejette et qui a fait des ténèbres et de la cana (bière locale) ses refuges pour y camoufler la noirceur de ses blessures et des histoires locales. Cette vieille aveugle aux allures de bête apprendra à Michel, qui l’appelle señora, au grand dam des locaux, qu’on peut y voir sans lampe, dans la plus pure obscurité, et lui révélera des pans essentiels des drames qui se jouent en arrière-plan de leur expédition.

Tandis que Felipe et les deux demi-frères du clan Garcia se préparent à commettre le pire, Michel et Ann se retrouvent piégés sous leur menace. Et alors qu’un ouragan fait rage, Michel se retrouvera au milieu de ce vortex, au fond d’une grotte qui pourrait devenir sa tombe…

Un roman intense et une incursion dans le monde méconnu de la spéléologie, que l’auteur a visiblement pris plaisir à dépeindre et à revivre.

Sierra Negra, Jean-Benoît Nadeau, Éditions Château d’encre, septembre 2023, 448 pages, 32,95$

Jean-Benoît Nadeau a signé plus de 2000 reportages et chroniques en carrière, publié de nombreux essais et reçu plusieurs prix littéraires et de journalisme. Chroniqueur linguistique au magazine L’actualité, il signe également au Devoir et est éditorialiste sur Avenues.ca. Également conférencier ici et ailleurs dans le monde, il signe ici son premier roman.