Résidence des stagiaires: la nature comme tableau
Toute de bois vêtue, la résidence des stagiaires se pose doucement dans le paysage de Grand-Métis. Cette demeure offre une fenêtre (et même plusieurs!) sur la nature, tout en se fondant dans l’environnement.
Quand on couvre l’architecture, rares sont les occasions de visiter un bâtiment en bonne et due forme. On doit souvent se contenter d’un passage express ou d’images, en particulier lorsqu’on parle d’un projet à l’étranger. Et la maison d’architecte demeure un rêve inaccessible pour la plupart d’entre nous (y compris pour l’auteure de ces lignes!).
C’est peut-être pour cette raison qu’un séjour à la résidence des stagiaires, imaginée par l’Atelier Pierre Thibault, semble si spécial. En posant notre valise entre ses murs pendant quelques jours, on a le privilège d’habiter le lieu, de le faire sien, d’en connaître les secrets.
On découvre par exemple que les murs craquent sous le poids du vent, mais que jamais une latte du plancher ne fait de bruit sous nos pas. On s’approprie l’une des chambres et l’on observe la lumière changer selon l’heure du jour par la fenêtre au pied du lit. On déplace les chaises Adirondack à l’endroit le plus protégé de la terrasse lorsque vient le temps de l’apéro.
Surtout, on se surprend à tourner notre regard vers l’extérieur. Atelier Pierre Thibault a réussi un tour de force en concevant une maison toute simple, qui encadre la nature et la magnifie. Peu importe la pièce où l’on se trouve, les grandes fenêtres invitent à la contemplation. Même le bureau, niché sur la mezzanine, permet de regarder dehors. Les Japonais ont leur bain de forêt — le shinrin-yoku —, la maison des stagiaires, elle, offre un bain de nature.
Malgré le fait qu’elle longe la route 132, une certaine quiétude règne. On a l’impression de se blottir dans un cocon.
Bois omniprésent, dedans comme dehors
La résidence se compose de deux volumes au toit à deux versants. Les lattes de cèdre, qui la recouvrent entièrement, ont déjà pris une certaine patine depuis la construction en 2018. Alors que le côté où se trouve l’entrée arbore encore sa couleur blonde des débuts, d’autres faces se couvrent d’un gris brun qui vire au noir par endroits, donnant presque l’impression de revenir à l’arbre d’origine.
Une aile regroupe les espaces de vie communs tandis que l’autre abrite au rez-de-chaussée les salles de bain ainsi que trois modestes chambres, chacune meublée de lits simples et d’une aire de rangement. D’autres lits supplémentaires à l’étage permettent de loger quelques personnes de plus en formule dortoir. À l’intérieur, le bois est encore à l’honneur, du sol au plafond. La structure en bois d’épinette est également visible.
C’est l’ébéniste Gervais Pineau et son équipe qui ont préfabriqué les panneaux en pin des murs et du toit ainsi que les cadres de la structure avant de les assembler sur le chantier. Le mobilier en bois minimaliste s’agence harmonieusement au reste.
Quand le design s’installe au jardin
Impossible de résider à la maison des stagiaires sans faire un saut aux Jardins de Métis. Le Festival international de jardins, où architectes paysagistes, architectes et concepteurs de divers horizons rivalisent d’imagination afin de créer des jardins éphémères contemporains, célèbre cette année sa 25e édition.
L’installation Réflexions colorées de l’architecte Hal Hingberg, à qui l’on doit aussi les panneaux de couleur du Palais des congrès de Montréal, touche encore les visiteurs 21 ans après son apparition aux Jardins en 2003. Le temps a commencé à faire son œuvre sur les panneaux qui n’ont pas été conçus pour affronter les intempéries, mais on prend toujours plaisir à observer le paysage sous différents angles.
Même chose pour Courtesy of Nature, pensée par Johan Selbing et Anouk Vogel en 2013. À l’intérieur d’un volume tout noir où les ombres des arbres se reflètent, un morceau du paysage a été érigé en œuvre d’art. On aurait envie d’exposer cette image à la maison afin de pouvoir la contempler à notre guise.
Parmi les petits nouveaux, on a un coup de cœur pour la simplissime installation Future Drifts de l’Américaine Julia Lines Wilson, qui sublime la clôture à neige en bois tout en se questionnant sur le futur des asters d’Anticosti, une espèce de plante à l’avenir incertain.
On a aussi un faible pour Rue Liereman | Organ Man Street, du collectif belge Pioniersplanters, qui nous transporte dans un jardin urbain en Belgique. Ça donne le goût de mettre les mains dans la terre séance tenante pour embellir notre cour.
L’installation Superstrata, du collectif mat-on, est celle qui divise le plus horticulteurs et architectes, selon le directeur des Jardins de Métis, Alexander Reford, qui nous a accompagnés pendant notre visite. Force est d’admettre que l’œuvre austère, qui fait sortir de grands x gris de la terre, n’est pas la plus facile d’approche. Il n’empêche que cette scène un peu postapocalyptique, où la nature semble avoir repris ses droits, nous plaît bien.
Dommage que nos enfants ne soient pas là pour explorer Couleur nature, une installation ludique signée Vanderveken, Architecture + Paysage! Ils auraient sûrement adoré découvrir ce qui se cache à l’intérieur de cette «piscine».
Pour une visite
Réservée aux stagiaires des Jardins de Métis durant l’été, la résidence du 206, route 132 est offerte en location entre septembre et mai. Tous les détails se trouvent ici pour ceux qui ont eux aussi envie d’habiter le lieu.
Le Festival international de jardins (tout comme les jardins historiques) est pour sa part ouvert tous les jours de juin au début octobre. L’édition 2025 sera sous le thème des frontières. On a déjà hâte à l’an prochain!
Les frais d’hébergement de ce voyage ont été payés par les Jardins de Métis, qui n’ont eu aucun droit de regard sur ce texte. Les opinions exprimées sont celles de notre journaliste.