La guerre des meilleurs restaurants
Les palmarès des meilleurs restaurants sont désormais nombreux et prennent une place importante dans le milieu de la restauration. Ils sont parfois appréciés, d’autres fois dénoncés. Chose certaine, ils sont devenus des outils médiatiques importants… à ne pas prendre au pied de la lettre.
Le dernier palmarès des 100 meilleurs restaurants canadiens selon le guide gastronomique Canada’s 100 Best Restaurants est encore tout chaud. Il a été dévoilé le 1er mars. Dans les médias et sur les médias sociaux, le classement fait réagir. C’est qu’on devient chauvin quand nos établissements s’y retrouvent.
Cette année, le Toqué! est en deuxième position. En troisième place, on retrouve le Joe Beef, suivi immédiatement du Vin Papillon. Le Montréal Plaza, la Maison Publique, le Nora Gray et le Café Boulud se retrouvent tous dans le top 20.
Ce prestigieux palmarès n’est pas le seul à classer nos restaurants. L’automne dernier, la liste très attendue d’enRoute, le magazine d’Air Canada, couronnait, comme chaque année, les meilleurs nouveaux restaurants du pays. Dans le top 10 se retrouvaient le Foxy, Agrikol et Le Fantôme, de Montréal, puis le Kraken Cru, de Québec.
De son côté, pour 2016, la réputée liste des 50 meilleurs restaurants au monde a décerné sa première étoile à Massimo Bottura et à sa table italienne. Dans ce classement, aucun restaurant du Québec n’est arrivé à se tailler une place.
Le guide Gault & Millau y est aussi allé de son classement des restaurants de la province. Les honneurs ont été décerné au Mousso et au Toqué! de Montréal ainsi qu’à L’Initiale de Québec.
De son côté, le restaurant Europea, de Jérôme Ferrer, à Montréal, avait été classé deuxième au monde au Traveler’s Choice Awards du site TripAdvisor en 2015.
On a même eu droit l’an dernier à un palmarès des meilleurs restaurants d’aéroports à travers le monde!
Des classements controversés
Décidément, la mode est aux palmarès! Et ceux-ci, souvent, ne font pas l’unanimité.
L’an dernier, on avait reproché au classement des 100 meilleurs restaurants du Canada d’avoir relégué à la 80e place l’une des meilleures tables du pays, celle de l’Initiale de Québec. Dans un texte à ce propos, le critique culinaire Philippe Mollé se demandait: «Comment être juge et partie quand le chef et le directeur d’un établissement sont parties prenantes dans la remise des notes à la firme comptable KPMG?»
De son côté, en 2014, le classement «World’s 50 Best Restaurants» a fait râler les chefs français qui ont été à quelques reprises absents du top 10. Selon eux, c’est le classement organisé par le magazine britannique Restaurant qui serait en cause. La méthodologie utilisée serait plus que contestable puisque certains chefs auraient été approchés pour faire partie du jury. Même son de cloche dans ce texte du journal Le Monde publié en juin dernier à la suite du dévoilement du palmarès 2016 des 50 meilleurs restaurants du monde. «On prend les mêmes et on recommence! Telle semble être la règle au World’s 50 Best Restaurants 2016, et une fois de plus la France n’accède pas au top cinq», peut-on lire en introduction de l’article.
D’ailleurs, l’été dernier, à la suite de l’annonce de ce palmarès controversé, Le Figaro a consacré un long texte à cette «guerre des classements». «Quel est le meilleur restaurant du monde? se demandait le journaliste derrière l’article. Serait-ce Osteria Francescana de Massimo Bottura, à Modène, sacrée le mois dernier par le palmarès annuel World’s 50 Best Restaurants? Alinea de Grant Achatz, à Chicago, désigné en avril par le top 100 mondial du magazine américain Elite Traveler? L’hôtel de ville, à Crissier, en Suisse, qu’un nouveau classement, modestement baptisé “La Liste”, récompensa en décembre dernier? Ou bien Arpège, d’Alain Passard, à Paris, honoré en mai d’un “meilleur restaurant européen”, loin devant Osteria Francescana (14e), par le site américain Opinionated About Dining (OAD)?» Le questionnement, bien sûr, prouve que l’exercice est relatif.
Des variables à considérer
La cuisine, après tout, est comme l’art, et son appréciation est personnelle. Ensuite, elle peut dépendre des jours, de l’état du cuisinier comme de celui du critique. Aussi, ceux qui votent n’ont souvent pas de réelle capacité à comparer les restaurants puisqu’il est impossible de manger à chacun de ces établissements à travers le monde. Et que dire des chefs vedettes qui sont très médiatisés? Font-ils pencher pour eux la balance? Puis, quelle est la définition exacte de «meilleur restaurant»? Ce qui est meilleur pour un ne le sera pas pour l’autre…
Nul doute, les palmarès sont désormais des outils médiatiques (voire politiques) très forts qui font chaque fois réagir autant les chefs que les clients.
Alors, à quel palmarès faut-il se fier? Selon Le Figaro, à «aucun. Ou bien tous». À travers tous ces classements donc, à nous de dresser notre liste, celle qui répondra à nos goûts et à nos envies.