La chronique Société et Culture avec Claudia Larochelle

Auteur(e)

Claudia Larochelle

Claudia Larochelle est auteure (Les bonnes filles plantent des fleurs au printemps, Les îles Canaries, Je veux une maison faite de sorties de secours - Réflexions sur la vie et l'oeuvre de Nelly Arcan, la série jeunesse à succès La doudou, etc.) et journaliste spécialisée en culture et société. Elle a animé pendant plus de six saisons l'émission LIRE. Elle est chroniqueuse sur ICI Radio-Canada radio et télé et signe régulièrement des textes dans Les Libraires et Elle Québec. Elle est titulaire d'un baccalauréat en journalisme et d'une maîtrise en création littéraire. On peut la suivre sur Facebook et Twitter @clolarochelle.

Littérature 1, CH 0

Il s’en passe des belles dans nos bibliothèques québécoises. Et à entendre mon amie Caro, ça donne encore plus le goût de les fréquenter… Célibataire endurcie et désabusée, la Caro en question s’est fait remarquer par un homme entre la section des biographies (elle en cherchait une sur Marie-Antoinette) et celle des romans québécois d’une bibliothèque près de chez vous. L’usager, un beau brun, prof de socio dans une université québécoise, l’a attendue dans les marches extérieures pour l’inviter à prendre un café. Entre les deux, ça a cliqué. Tout ça grâce à une soudaine curiosité morbide de ma Caro pour la guillotine. C’est tout pour l’histoire d’amour quétaine, sorte de prétexte pour vous parler de cette Semaine des bibliothèques publiques québécoises qui, elles, n’en sont plus à l’ère des tapis bruns, des murs jaunis et des bouches pincées de mesdames à lunettes. Bienvenue dans les biblios troisième lieu, voire quatrième lieu, qui font d’elles bien plus que des centres de prêts de livres.

Rencontre du troisième… et du quatrième type!



Pour comprendre ce concept de troisième lieu lié aux nouvelles bibliothèques, sachez que c’est au début des années 1980 qu’un certain Ray Oldenburg, prof émérite de sociologie urbaine à l’université de Pensacola en Floride (prof de socio lui aussi, tiens, tiens…), fait une distinction entre la maison, considérée comme un premier lieu, le travail, un second lieu et, enfin, ce qu’il appelle les «troisièmes lieux», c’est-à-dire ces endroits consacrés à la vie sociale et aux rencontres et qui, au sortir de la Deuxième Guerre mondiale, étaient plutôt des tavernes, cafés et compagnie que les perrons des églises, en vif déclin... Si Oldenburg n’a pas inscrit les bibliothèques comme troisième lieu, d’autres observateurs comme le journaliste et philosophe hollandais Michaël Zeeman, voyaient eux, les biblios de notre époque comme de réels endroits de mixité sociale offrant des possibilités de rencontres inégalées partout ailleurs.

À preuve, saviez-vous qu’en 2013 au Québec, la bibliothèque publique devenait l’institution culturelle la plus fréquentée d’entre toutes avec 25 175 877 entrées, une nette avance sur les cinémas qui, eux, en récoltaient 21 103 702? Vincent Guzzo aurait de quoi s’inspirer! Et, pour vous faire sourire, pendant une saison régulière des Canadiens, on en dénombre 1 605 816… Tiens, toi!

Pour accroître la popularité de cette tendance faisant des bibliothèques un lieu social par excellence et pour la mettre en relief, Stéphane Legault, président de l’Association des bibliothèques publiques du Québec, qui a du pain sur la planche ces jours-ci, parlait récemment du concept rêvé de troisième lieu comme ce vers quoi tendre de plus en plus dans ce vaste réseau pour 2020. Il citait notamment l’exemple de bon nombre de ces biblios dans les pays scandinaves qui deviennent dans cet esprit de véritables «maisons loin de la maison», des endroits où tous les usagers y trouvent leur compte grâce une symbiose de confort, de design, de plaisir, etc. Si, en plus, on ajoute un volet apprentissage, tel qu’offert dans ces fameux «Learning Center», surtout connus en milieux universitaires, mentionnons par exemple, au Québec, l’Espace 3C de l’ÉTS, certaines bibliothèques se classent même comme quatrième lieu. Les images de ces endroits donnent envie d’y être, seul ou en famille, entre le travail et la maison, et d’y passer beaucoup de temps, puisque tout y est orchestré pour couler des jours heureux sans manquer de rien.

Il existe plus d’un millier de bibliothèques publiques au Québec et elles se transforment graduellement en perrons d’église version 21e siècle; sans les sacrements, les prières et la confesse, mais plutôt dans un souci d’ouverture sur le monde, de convivialité, de confort et de modernité. C’est encore mieux que le CH comme opium du peuple.

Québec, la merveilleuse

En attendant l’éventuel retour des Nordiques à Québec, c’est encore la littérature qui est à l’honneur avec l’ouverture récente de la Maison de la littérature qui, aménagée dans l’ancien temple Wesley, mieux connu sous le nom de Salle de L’Institut, accueille depuis peu dans ses espaces, beaux comme le ciel, des discussions, lectures, spectacles, rencontres d’auteurs, etc. La programmation de cette année sera annoncée ce mercredi. Longue vie à ce qui se passera entre ces murs sacrés.

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Sur ces nouvelles qui ont de quoi réjouir, j’ai un livre très en retard à retourner à ma bibliothèque de quartier. Je ne sais pas pour vous, mais ça me fait toujours moins mal de payer une amende salée pour un bouquin que pour un stationnement… J’en profiterai pour aller flirter avec Marie-Antoinette. Ciao!

Je craque pour…

Les Soeurs Boulay et leur 4488 de l’Amour

Avec ses mélodies accrocheuses, ce deuxième opus de Stéphanie et Mélanie Boulay, après Le poids des confettis qui avait connu un immense succès, constitue un retour en force avec ses rythmes folks et intimes, des textes témoins de leur époque empreinte de relations instables et éphémères, de cet attachement à l’enfance et à l’adolescence qui n’est jamais très loin au détour d’un chemin de vie. Du délire en vrac.