L’intelligence
Un article très partagé sur les réseaux sociaux affirme que l’intelligence serait principalement transmise par la mère parce que c’est le chromosome X qui serait porteur de ces gènes. Or, le 3 février, Le Monde contredisait cette information, qui circule depuis quelques années, avec les conclusions d’autres recherches établissant plutôt que la transmission génétique jouerait un rôle moins important dans la détermination des capacités cognitives que ce que l’on pensait. Plusieurs études publiées récemment montrent aussi qu’il n’y aurait aucune corrélation significative entre les «gènes de l’intelligence» identifiés et le quotient intellectuel.
Je peux dormir tranquille.
Je peux dormir tranquille parce que je ne suis pas certaine d’être «intelligente», du moins selon certains tests et paramètres scientifiques. Je n’ai d’ailleurs jamais voulu passer d’examen de QI. J’ai peur d’avoir un résultat décevant, que ça sape mon moral et l’estime que j’ai de moi-même jusqu’à ma mort. J’en ai très peur.
Prenons par exemple le récent fameux Super Bowl. Ça doit faire 20 ans que chaque année, à sa diffusion annuelle, je demande à quelqu’un qui s’y connaît de m’expliquer les règles en prévision de l’événement, qui se regarde souvent en groupe festif. Je veux être prête, bonne, comprendre, y prendre plaisir enfin. Ça fait 20 ans que je n’y comprends rien. Mon chum a eu beau me faire des diagrammes de Venn, ma meilleure amie m’a même mimé un jeu avec le ballon de son fils, rien n’y fait. Honte à moi, ça ne rentre pas, un petit mal de cœur me prend avec étourdissements et légère panique, c’est le désert le plus complet dans le ciboulot.
Chaque Super Bowl me rappelle donc ça, cette possibilité de ne pas être «fine, fine», comme dirait feue ma grand-mère. Elle racontait au sujet d’une chanteuse que je ne nommerai pas: «Elle a l’air fin avec ses beaux yeux, mais elle n’est pas fine, fine, c’est certain.» Ça faisait rire tout le monde, sauf moi. Je n’ai jamais osé lui demander ce qu’elle pensait de ma tête à moi. Trop peur.
L’affreux scénario de ma fort possible non-intelligence se répète quand il y a des meubles à assembler, des mathématiques de niveau primaire (!) à réviser à l’heure des devoirs, des bases de l’informatique et de la téléphonie cellulaire restées bloquées dans mes neurones de 2003, sans compter le contenu d’enveloppes gouvernementales dans lesquelles il est question de comptes, taxes, valeurs hypothécaires, acomptes, etc. Les enveloppes s’accumulent. J’angoisse. Ce vocabulaire satanique rebondi sur mon cortex cérébral, il n’adhère à rien. Devant ma comptable, j’ai l’air d’un poisson rouge. Ce qu’elle doit se bidonner!
Pire, côté pratico-pratique, je ne sais pas coudre un bouton. Tricoter encore moins. Côté physique, je m’enfarge dans mes pieds à la patinoire. J’ai dû emprunter le support en plastique des enfants, éberlués. En somme, ça fait beaucoup d’aptitudes déficientes. D’où la possibilité donc de ne pas être «fine, fine ».
Parfois, j’écoute parler de brillantes animatrices et journalistes qui s’affairent à décortiquer l’ordre mondial, maîtriser mille et une notions intellectuelles et sociales, jongler avec tout ça en souriant et ce sentiment de manquer d’intelligence revient me hanter avec plus de vigueur encore. En lisant L’apparition du chevreuil d’Élise Turcotte ou Blanc Résine d’Audrée Wilhelmy, ça m’a fait ça. Comment font-elles? Leur cerveau est structuré comment? J’en veux un comme ça, moi aussi. Ça coûte combien? Quant à Laurent Duvernay-Tardif, on n’en parle même pas. En plus de comprendre évidemment les règles du football, il a fait sa médecine, lui, il gosse même le bois. Il sera canonisé, c’est certain.
Avec un ami hypersensible, on prétend parfois ne pas être assez «intelliiiiHents» pour suivre la parade de la vie adulte avec tout ce qu’elle exige de compréhension du monde, de savoir-faire, de mémoire, de rapidité d’exécution, de débrouillardise, de confiance aussi. Bien sûr, je sais qu’il y a différentes formes d’intelligence (naturaliste, existentielle, spatiale, intrapersonnelle…), que cette théorie développée il y a une vingtaine d’années par le psychologue Howard Gardner devrait me rassurer. Or, pas du tout.
Ce qui fait plus mal encore, c’est de voir à quel point on se met de la pression, à quel point aussi on se fout des complexes à ce sujet, mon ami pas « intelliiiiHent » et moi, et de voir aussi que de parfaits tapons se hissent à la tête de gouvernements sans jamais douter, eux, de leur imbécilité. Avec quel type d’intelligence, monsieur Gardner? Jusqu’à quel point l’intelligence est-elle nécessaire pour accéder aux plus hautes sphères de notre monde, pour être toujours gracié de tout? Est-ce que les imbéciles sont plus heureux? Et si l’intelligence c’était aussi de savoir douter… ?
Je craque pour…
Sur les traces d’un tueur en série à Canal D et Crave
Captivante série télé québécoise que celle-ci, qui explore avec d’excellents experts la possibilité qu’ait sévi au Québec un tueur en série entre 1970 et 1985.
Si la grande région de Montréal avait connu des dizaines de meurtres accompagnés d’actes de violence sexuelle, à cette époque, l’hypothèse de l’existence de ce type de criminel n’avait pas vraiment été considérée, et mis à part les familles encore éplorées, rares sont ceux qui se souviennent de ces tragédies, des liens qui peuvent exister entre elles.
Aujourd’hui, on reprend les affaires autrement, avec les connaissances actuelles et à un rythme télévisuel haletant et poignant. En espérant des réponses. Du grand calibre.