L’homme qui savait tenir salon
Si j’avais eu à choisir un deuxième père, à part le mien, bien sûr, mon choix se serait arrêté sur Georges-Hébert Germain, cultivé gentleman des communications, qui nous a quittés vendredi soir dernier après un combat contre ce satané cancer du cerveau. J’avoue, j’enviais un peu sa fille, l’auteure et chroniqueuse Rafaële Germain, d’être aussi complice avec son papa; qu’ils soient capables de se comprendre dans un sourire et en parlant ce langage propre aux êtres faits du même bois; deux brillants à l’humour fin qui peuvent se donner la réplique sans s’ennuyer ou se tomber sur les nerfs.
Comme collaborateur lors des trois premières saisons de LIRE (la maladie l’a empêché de poursuivre), il me facilitait l’animation – c'était ma première expérience à la barre d’une émission télé – avec sa chaleur et sa simplicité. Je savais qu’au salon improvisé du studio ARTV, quoi qu’il arrive, il m’aiderait, sans jugement, par pure gentillesse parce qu’il était un vrai gentil. Bien qu’une trentaine d’années nous séparaient, il ne faisait pas l’étalage de ses connaissances pour m’impressionner, n’avait jamais de réplique de mononcle (il y en a tant de cet espèce…) et n’était pas rétrograde. Il adorait découvrir de jeunes écrivains, comme Simon Boulerice, dont la plume l’avait épaté. Sa curiosité était sans fin, tout comme sa manière d’être à l’affût des tendances, de les saisir sans les juger, juste pour comprendre, fasciné avec son air d’éternel gamin. Il avait aussi ce sourire dont a si bien parlé Nathalie Petrowski dans La Presse, ses yeux bleus craquants brillaient toujours pour sa douce, Francine Chaloult, et ils nous ont certainement fait gagner quelques téléspectatrices en cours de route…
Il nous quitte juste avant cette 38e édition du Salon du livre de Montréal, qui se déroule à la Place Bonaventure du 18 au 23 novembre et dont il a été président d’honneur plus d’une fois ces dernières années. Un hommage lui sera d'ailleurs rendu le 18 novembre, à 19h, lors de l'inauguration du Salon. J’aimais le voir marcher dans le salon bondé, s’arrêter pour parler aux gens, saluer ses amis écrivains. «Des gens bien. Très bien», comme il aimait dire à leur sujet, le sourire en coin. J’ignore pourquoi, ça me rassurait de le voir dans cet espace, c’était naturel. Cette année, le Salon me paraîtra plus vide qu’à l’habitude, il va nous manquer. Puisqu’il aurait été le premier à inviter les lecteurs à passer au Salon pour honorer la place des mots, malgré la morosité de l’actualité, voici quelques événements de ce Salon à nos portes.
On célèbre Marie Laberge
Ce n’est pas qu’un seul, mais bien deux livres que la très aimée Marie Laberge offre à ses fidèles lectrices et lecteurs en célébrant ses 40 ans de carrière. Verbomotrice, charmante et accessible, l’écrivaine parlera donc de ce roman intitulé Ceux qui restent et de son essai intime, Treize verbes pour vivre.
(Vendredi 20 novembre, 15 h, Place Confort TD)
Faisant partie des invités d’honneur du Salon cette année, le dramaturge et auteur Larry Tremblay, dont le roman L’orangeraie, paru en 2013 aux éditions Alto, n’est pas passé inaperçu, répondra aux questions du sensible et pertinent Gilles Archambault, grand auteur lui-même. Se déroulant sur fond de guerre et mettant en relief le destin de jumeaux dont la vie est changée en même temps que leur enfance disparue à tout jamais, ce dernier opus de Tremblay, d’une profondeur à couper le souffle, et récipiendaire du Prix des libraires du Québec et du Prix littéraire des collégiens, ne saurait être plus d’actualité qu’en ces jours sombres… (Vendredi 20 novembre, 16 h, Place Confort TD)
Cette année encore, la famille demeure un des thèmes majeurs des romans québécois, reflétant ses différents visages, l’intensité des liens, l’importance qu’on y accorde. La toute jeune maison d’édition québécoise Le Cheval d’août et son éditrice Geneviève Thibault présentent «Quelles familles? Les histoires de familles du roman québécois» avec des écrivains qui ont fait paraître des livres dont cet aspect ressort. Fanny Britt, Martine Delvaux, Corinne Larochelle, Rosalie Lavoie et Patrick Nicol seront de la partie pour parler de leurs livres respectifs. (Vendredi 20 novembre, 18 h 15, Espace Archambault)
Bazzo et Nagano
Si la famille est au cœur du livre d’ici, les médias font pour leur part jaser la société en entier. Leméac faisait récemment paraître à ce sujet un essai intitulé De quels médias le Québec a-t-il besoin? Marie-France Bazzo – qui animera aussi la discussion –, Nathalie Collard et René-Daniel Dubois, les trois concepteurs de ce livre, ainsi que quelques-uns de leurs collaborateurs échangeront sur ce sujet on ne peut plus dense et nécessaire. (Samedi 21 novembre, 14 h, Espace Archambault)
Les médias ont peut-être besoin d'un peu plus de musique, répondrait sûrement le maestro Kent Nagano qui sera quant à lui interviewé par Anne-Marie Dussault au sujet de Sonnez, merveilles!, un ouvrage dans lequel il raconte son parcours musical. Il y réfléchit sur l’espace accordé à la musique, classique dans nos sociétés et à son impact d’hier à aujourd’hui. (Dimanche 22 novembre, 12 h 30, Place Confort TD)
On craque pour…
Pour honorer le beau Paris, son ambiance unique qu’il faut continuer de chérir, j’écoute en boucle l’album de reprises de Trenet dans lequel Benjamin Biolay reprend 13 titres (!!!), accompagné de Denis Benarrosh et Nicolas Fiszman. C’est si bon d’entendre sa chaude voix interpréter Revoir Paris, Que reste-t-il de nos amours?, Le temps des cerises, La romance de Paris, etc. À faire jouer très très fort dans la maison en chantant (même mal), parce qu’il ne faut pas que ces textes perdent leur sens.