Musique
Les Francofolies : de Greco à aujourd’hui
«La vie ne vaut d'être vécue sans amour...», écrivait Serge Gainsbourg pour Juliette Greco en lui offrant sa chanson La Javanaise en 1963. Les deux l'ont chanté, l'un est disparu depuis et l'autre, la Greco, elle, continue sa route en chantant encore du haut de ses 88 ans... Et bien sûr qu'elle en reçoit de l'amour en venant saluer ses fans au Québec. Cette fois, c'était pour présenter, le 14 juin dernier, le spectacle de sa tournée d'adieu dans le cadre de la 27e édition des Francofolies qui bat son plein dans la métropole montréalaise jusqu'au 20 juin.
Quelle splendeur que cette octogénaire qui a aimé, parfois un peu, beaucoup, passionnément, à la folie. À la folie, le plus souvent, et c'est cette folie qui garde ces artistes en vie sur le long terme, moins en voix peut-être, plus fatiguée sur scène, mais toujours aussi sérieux dans leur démarche, quitte à couper le bruyant système de ventilation d'un lieu si ça freine la création ou à fermer les portes du lieu de performance malgré la chaleur. En ne laissant pas ouvertes les portes de l'église où elle s'était présentée sur scène à Tadoussac, le 12 juin dernier, la belle dame en noire a même été obligée d'interrompre son concert, trop affectée par la température. Le public ne lui en a pas tenu rigueur, allant jusqu'à lui chanter des mots doux. Si ça ce n'est pas de l'amour... De quoi vivre encore longtemps, longtemps...
Comment ne pourrait-elle pas être enchantée par ces spectatrices et spectateurs, bien sûr, mais aussi par ces Francofolies qui font le pont entre les différentes générations d'artistes de langue française d'ici et d'ailleurs, créant en même temps un rendez-vous entre les baby-boomers, leurs parents - ceux-là mêmes qui ont l'âge de Greco -, les X, les Y, les Z, alléluia! Cute donc, à voir et à entendre, les Alfa Rococo, Alex Nevsky, Éric Lapointe, Damien Robitaille, Mononc Serge, Louis-Jean Cormier, etc. Du bien beau monde dans le Quartier des Spectacles en ce début d'été qu'on espère ensoleillé et chaud.
Soixante ans sous les projecteurs... Pas banal et ô combien de travail derrière tout ça. Pour la chanteuse française, pas de gloire instantanée, de vidéo lancée sur Internet comme on jette une ligne à l'eau ou d'émissions de téléréalité pour l'aider à l'époque. Au terme d'une longue carrière comme la sienne, quand on sait que chaque battement de coeur qui nous est réservé a été gagné à force de dur labeur, je me demande si ce n'est pas ce qui explique en partie la longévité d'un artiste sur scène et dans les festivals de partout : l'ardeur, la lutte et une langue qu'on défend sans appuyer la note, juste parce qu'elle est tellement belle.