J’aime mon français (1) Un examen de français et des hiboux pleins de poux!
Viens, mon chou, mon bijou, mon joujou, sur mes genoux, et jette des cailloux à ce hibou plein de poux. Vous souvenez-vous de ces phrases mnémotechniques apprises sur les bancs d’école pour se souvenir des mots qui finissent en «ou» et auxquels il faut ajouter un «x» au pluriel? La mémoire semble défaillir chez l’enseignante de la fille de dix ans d’une amie qui écrivait aux parents à la rentrée de se «méfier des pous» ! Ahuuum.
Loin de moi l’idée de jeter le blâme à Madame X qui venait peut-être de passer une nuit blanche à soigner le petit dernier… Si une bonne réviseure ne repassait pas par-dessus ce texte, et mes autres, on m’en trouverait des petits et gros poux. Bref, des fautes d’orthographe, qui n’en fait pas? Là où le bât blesse, c’est quand près de la moitié des futurs enseignants québécois échouent à l’examen de français obligatoire pour l’obtention de leur brevet d’enseignement. 53% en 2016, nous apprenait La Presse. Curieusement, il s’agit du même pourcentage que le taux d’analphabètes fonctionnels dans la population du Québec. Mais ça, c’est un autre sujet de chronique. Ça viendra.
Encore une fois, loin de moi ici la volonté de lancer une carrière de pierres aux profs en devenir. Tellement pas. Je suis même assez d’accord avec le député de Québec Solidaire Gabriel Nadeau-Dubois qui, consterné lui aussi par ces données, admettait que bon nombre de ministres auraient eux aussi échoué à ce fameux examen. Laissez-moi sourire. Heureusement, ils ont des attachés de presse pour veiller au grain. Il s’agit de ces mêmes ministres qui ne veulent pas obliger les francophones à fréquenter les cégeps français. Bien sûr que c’est un avantage d’être bilingue au Québec et partout ailleurs. L’un n’exclut pas l’autre, voyons! Comme si l’apprentissage de l’anglais langue seconde ne passait que par l’instruction au collégial dans la langue de Shakespeare exclusivement…
Ah ces classiques!
Toujours selon GND dans le quotidien de la rue Saint-Jacques, c’est l’enseignement du français en amont qu’il faudrait améliorer… Je suis plutôt d’accord, outrée moi-même de constater qu’en terminant leurs études postsecondaires au Québec, rares sont les élèves capables de nommer un titre des classiques de Émile Zola, Albert Camus, Sartre, ou, géographiquement plus près d’eux, de Anne Hébert, qui, de surcroît est une femme, ce qui n’aide en rien... Mais, ça aussi c’est un autre sujet qui viendra bien un de ces quatre sur avenues.ca.
Or, en marge de ce que clame haut et fort le premier ministre Couillard, je gratterais le bobo avec plus de vigueur en regardant plutôt du côté de l’importance accordée à notre langue et à la manière de l’honorer en général.
Sans vouloir faire d’amalgames, quand je lis ad nauseam des «Luv you babe» ou «tcheck, you right bitch» sur les pages Facebook des ados de mes amis ou «Nice pics» ainsi que «What a great day!» sous les photos Instagram de ces mêmes parents, pourtant éduqués au français impeccable des textes de Passe-Partout, émission jeunesse qui s’apprête à revenir, je me demande si ce n’est pas aussi le devoir de mémoire de notre langue française et de ceux qui, comme Camille Laurin avec sa loi 101, se sont battus pour qu’on la préserve qui fait défaut.
Dans nos radios
Juste du côté de ce que la société québécoise se met dans les oreilles à longueur de journée, il y a là un problème majeur. Vu, par exemple, le nombre d’heures passées en voiture dans le trafic à contourner les cônes orange, ce n’est pas négligeable. Dans son discours de remerciement au dernier Gala des prix Gémeaux le 17 septembre, l’humoriste Louis-José Houde, un fin lecteur, issu d’ailleurs de la génération Passe-Partout, a déploré le fait que des radios commerciales montréalaises tentaient de réduire les quotas de chansons en français.
Deux jours avant, à Deux hommes en or, Normand Brathwaite s’insurgeait contre les pourcentages de contenu musical de ces radios; composé à 35% en anglais et à 65% en français. Difficile de penser à faire réussir nos futurs enseignants à un examen de français «difficile sans être impossible», dixit la Chicoutimienne Caroline Tremblay, qui a réussi l’examen du premier coup, il y a quatre ans, et qui, de son propre aveu, n’a jamais été une première de classe.
C’est donc, aussi, une question (encore) de savoir mettre nos priorités aux bons endroits et de cultiver le jardin linguistique du Québec en y plantant de bons grains de passion tout en solidifiant nos racines. Il faut voir et penser à long terme, croire qu’en continuant de ne pas faire de l’enseignement du français une priorité chez nous, on risque de récolter de bien mauvais chous… euh choux.
JE CRAQUE POUR…
Les auteures québécoises de la rentrée
Stéfanie Clermont, Le jeu de la musique, éd. Le Quartanier
Audrée Wilhelmy, Le corps des bêtes, éd. Leméac
Catherine Lalonde, La dévoration des fées, éd. Le Quartanier
Érika Soucy , Priscilla en hologramme, éd. L’Hexagone
India Desjardins + ill. Marianne Ferrer, Une histoire de cancer qui finit bien, éd. La Pastèque
Mikella Nicol, Aphélie, éd. Le Cheval d’août
Lise Tremblayl L’habitude des bêtes, éd. Boréal
Martine Delvaux, Le monde est à toi, éd. Héliotrope
Andrée A. Michaud, Routes secondaires, éd. Québec Amérique
Marie Laberge, Affaires privées, éd. Québec Amérique
Brigitte Haentjens Un jour je te dirai tout, éd. Boréal
Et j’en oublie. Avec pareilles plumes, n’est-elle pas belle cette rentrée littéraire québécoise? Il s’agit là de très grands titres, du moins, pour ceux que j’ai eu le temps de lire à ce jour. Maintenant, faisons en sorte qu’on parle de ces dames, qu’on les interroge et qu’on les enseigne autant que leurs confrères dans nos médias et établissements scolaires. Bon allez, à plus!