10 romans d’amour à lire sur la plage
Voilà, mes chanceuses et chanceux qui prennent du repos sous un parasol au bord de l’eau ou près d’une piscine, je vous ai préparé, dans la joie et l’allégresse, une liste de 10 titres d’hier et d’aujourd’hui dans lesquels l’amour ou les frissons de la chair atteignent des sommets. Qu’il sera bon le soleil (et accessoirement, la sangria) avec un de ces livres entre les mains…
Carnets de naufrage de Guillaume Vigneault
Ça fait 16 ans que Guillaume Vigneault l’a fait paraître et je suis sûre qu’il n’imaginerait jamais son premier roman classé dans le genre «amour», et pourtant, je le vois un peu là aussi, avec les questionnements de son héros sur le sujet amoureux, aussi complexe puisse-t-il être. L’homme connaît une rupture, l’homme tente de la comprendre et de la panser à sa manière, dans les bras des autres, dans les flots d’une mer qui n’est pas toujours calme, mais qui fouette. C’est un des romans que j’ai le plus souvent aperçus sur les tables de chevet masculines… C’est aussi un de mes romans québécois préférés des vingt dernières années. Indémodable.
Douze chansons pour Évelyne de Fredric Gary Comeau
Les hommes qui partent sac au dos pour oublier… ça semble assez commun, et heureusement, parfois, ça donne de très bons romans, comme celui-ci, de Fredric Gary Comeau. Après avoir composé douze chansons à la mémoire de celle qui l’a quitté, Antoine part en voyage à travers le globe, mais aussi à travers les maillons de sa mémoire, peut-être pour retrouver celui qu’il était, celui dont il a laissé quelques fragments épars en chemin à force d’aimer. C’est d’une beauté sulfureuse, chaque phrase donne envie de le cajoler un peu cet homme brisé; bien sûr que c’est toujours attrayant...
Kamouraska de Anne Hébert
Un classique québécois écrit par la grande écrivaine dont tout le monde parle en cette année où elle aurait eu 100 ans. Et bien sûr qu’on aurait aimé que Anne Hébert soit encore là à nous écrire des histoires! Il reste ses œuvres majeures, dont Kamouraska, l’inégalable, qu’il fait bon relire, surtout si vous prévoyez passer quelques jours dans le Bas-Saint-Laurent. Publiée en septembre 1970, cette histoire marquante inspirée par des faits réels est celle d’Élisabeth d’Aulnières, épouse d’Antoine Tassy, seigneur de Kamouraska. Ce dernier, violent et piètre mari, la jeune femme le fuira pour trouver refuge dans la maison de son enfance où elle reçoit les bons soins du beau docteur Nelson de qui elle s’éprendra tant qu’il faudra se débarrasser du gênant mari… S’il n’y avait qu’un seul Hébert à lire, je pense que ce serait celui-là.
Belle du Seigneur d’Albert Cohen
Il fait partie du palmarès des meilleurs romans de beaucoup de lecteurs et je ne ferai pas exception sur ce coup-là en vous disant à quel point il a marqué ma jeune vingtaine lors d’un voyage en train à travers l’Europe. Ce roman du Suisse Albert Cohen compte d’ailleurs assez de pages (1 110 pages dans l’édition Folio 2007) pour occuper vos journées estivales, tant et si bien que vous n’aurez même pas besoin de le tromper avec un autre puisque l’histoire d’amour qui unit avec tellement de complications Ariane à Solal jusqu’à la mort dans une fusion totale est prenante. Ensuite, il vous faudra lire d’autres romans de Cohen, à commencer par Le livre de ma mère.
Madame Bovary de Gustave Flaubert
Dois-je vraiment en ajouter? J’écrirai simplement que la vie monotone entre Emma et Charles, son mari, aura pour résultats de donner envie à la belle de trouver quelques moments d’enthousiasme et d’exaltation de la chair ailleurs auprès des hommes du village. Mais puisqu’elle abuse et fait quelques excès, la fin sera tragique, on la connaît… De quoi nous convaincre de modérer les passions durant l’été. Est-ce que je viens vraiment d’écrire ça, moi?
Le Nid de pierres de Tristan Malavoy
Pour l’amour à la terre, aux racines, à celle de toujours qui s’apprête à donner la vie, à ce qui nous lie aux souvenirs de l’enfance bercée de légendes abénaquises, à la sincérité de la poésie qui émane de ce texte précis, diablement bien écrit, ce roman de Tristan Malavoy, sorti cette année, qui évoque le retour aux sources d’un homme devenu adulte qui cherche encore la magie d’où il vient, parce qu’on ne quitte jamais tout à fait l’enfance et ses anciennes amours.
Les vaisseaux du cœur de Benoîte Groult
Dame Groult nous a quittés récemment, sur la pointe des pieds, dans son sommeil. Nous n’aurions pas pu lui souhaiter une plus belle fin que celle-là, à 96 ans. Bien sûr, c’est pour la beauté de ce roman des années 90 qui porte un si beau titre, si juste, mais surtout pour honorer la militante féministe qui a fait tant pour la cause, encore si nécessaire et urgente, que je vous rappelle ce titre. Parce qu’il ne faut jamais l’oublier, la relire est si bon, surtout avec cette histoire improbable d’amour et d’érotisme épisodique entre deux êtres mariés chacun de leur côté ; une intellectuelle et un marin breton. Ce qu’elle pouvait ne jamais se gêner d’appeler un chat, un chat, même en prenant de l’âge, ce qu’il est bon de la relire, ne serait-ce que pour ses passages chauds et ceux sur la vieillesse.
Passion simple de Annie Ernaux
Bon. Je ne m’en sortirai jamais: Annie Ernaux. La seule et unique, la grande toute puissante! Comme j’ai aimé ce Passion simple qui m’a permis d’entrer dans son œuvre avec des phrases-chocs comme «Je voulais forcer le présent à redevenir du passé ouvert sur le Bonheur.» Ce roman tout court comme une novella raconte l’attente d’une femme amoureuse d’un homme qui n’est pas libre, pas tout à fait là non plus, et l’infernal passage du temps qu’on voudrait arrêter chaque fois qu’il est dans la chambre. Il faudrait ne jamais le laisser repartir vers son autre vie, celle dans laquelle l’héroïne serait une intruse qu’on ne veut pas voir. Alors, elle attend chez elle, comme le font une pléthore d’autres femmes.
C’est quand le bonheur ? de Martine Delvaux
Voilà un roman dont on n’a pas assez parlé, il me semble. Il s’agit pourtant de pages somptueuses au sujet de l’amitié quasi amoureuse, de ce lien qui unit deux êtres à travers le temps, à travers leurs échecs, ruptures, bons ou moins bons coups, la vie en somme, qui peut laisser un goût amer sur la langue. Ode à l’amitié, à la quête de l’impossible quiétude dont tout le monde parle, ce livre est d’une redoutable efficacité par sa langue directe et fine, son humour distillé pour faire sourire quand ça devient sombre. C’est calibré pour nous faire oublier de se coucher le soir.
La memoria de Louise Dupré
Ce roman de 1996 qui s’est mérité plusieurs prix littéraires est celui d’une femme qui se fait larguer par l’homme qu’elle aime et qui comble ce vide laissé en réfléchissant à la condition humaine, à ce qui reste gravé en nous après le passage du temps : « À l’intérieur de la poitrine, il y a ce muscle où s’accumulent nos désespoirs, la tape de papa à quatre ans parce qu’on avait brisé un bibelot de porcelaine, la punition qu’on avait reçue injustement à l’école, et puis les échecs, les amitiés déçues. Les chagrins d’amour. Tout cela fait une boule. Une boule dure qui avec le temps pèse de plus en plus lourd et nous empêche de respirer.» L’amour est déçu, la chair un peu plus triste, mais ce qu’il faut rebâtir à partir des décombres a quelque chose d’exaltant dont les lecteurs de Dupré sont chaque fois des témoins privilégiés.
Je craque pour…
Windigo, quatrième album d’Alexandre Désilets
Les chansons de ce quatrième album ne nous sont pas étrangères puisqu’elles apparaissent sur ses trois précédents disques. Or, cette fois, elles ont été réarrangées pour devenir orchestrales. L’effet est grandiose, plus grand que nature, révélant une magie qui peut-être nous avait échappée par instants dans quelques pièces. Il fait bon se rappeler cet artiste québécois si juste, oscillant entre lucidité, tendresse et belle cruauté.