La chronique Culture avec Claude Deschênes

Auteur(e)
Photo: Martine Doucet

Claude Deschênes

Claude Deschênes collabore à Avenues.ca depuis 2016. Journaliste depuis 1976, il a fait la majeure partie de sa carrière (1980-2013) à l’emploi de la Société Radio-Canada, où il a couvert la scène culturelle pour le Téléjournal et le Réseau de l’information (RDI). De 2014 à 2020, il a été le correspondant de l’émission Télématin de la chaîne de télévision publique française France 2.On lui doit également le livre Tous pour un Quartier des spectacles publié en 2018 aux Éditions La Presse.

Jukebox, un documentaire qui célèbre le génie du créateur du showbiz québécois

Vous rappelez-vous l’époque où on chantait Les boîtes à gogo avec Michèle Richard, La poupée qui fait non avec Les Sultans, Monsieur Dupont avec les Milady’s, Liverpool avec Renée Martel, Avant de me dire adieu avec les Classels? Eh bien, ce souvenir est incomplet si vous n’avez pas vu le documentaire Jukebox, qui prend l’affiche cette semaine dans une vingtaine de salles à travers la province.



Ce film nous plonge dans l’âge d’or du yéyé québécois avec celui qui en a été l’artisan, le trop méconnu Denis Pantis. Ce fils d’immigrants grecs a littéralement mis au monde le showbiz québécois en produisant une quantité innombrable de grands succès qui ont trôné au sommet des palmarès dans les années 1960. Ce n’est pas pour rien qu’on l’a baptisé le «roi du 45 tours». Son zèle à produire des disques a fait en sorte qu’en 1967, les ventes de disques québécois dépasseront celles des Américains et des Européens combinés. Pas mal pour des chansons anglo-saxonnes traduites en français!

Michèle Richard © JukeboxLeFilm.com & LaRuelleFilms.com

On a beaucoup parlé de la naissance des boîtes à chansons, chanté les louanges des talents qui y ont vu le jour, il était temps qu’on raconte aussi comment la chanson populaire a jeté les bases de l’industrie musicale québécoise. Les réalisateurs Guylaine Maroist et Éric Ruel le font avec la même énergie et originalité qu’ils avaient déployée dans leur fabuleux film Mission impossible sur Expo 67.

Renée Martel © JukeboxLeFilm.com & LaRuelleFilms.com

Jukebox célèbre le génie de Denis Pantis, aujourd’hui âgé de 78 ans, toujours bon pied bon œil, en lui donnant la parole et en utilisant quelques trucs (gimmicks comme dirait Pantis) éprouvés pour gagner l’adhésion du spectateur. En effet, on ne peut pas résister à la quantité d’archives rassemblées, au montage rythmé et à ces petits clins d’œil au monde du karaoké, avec affichage dynamique des paroles des chansons et invitation à crier et à taper des mains.

Denis Pantis le roi du 45 tours. © JukeboxLeFilm.com & LaRuelleFilms.com

À travers ce feu roulant, on a aussi des témoignages d’artistes qui ont profité du pif de ce producteur prolifique, notamment Michèle Richard, Bruce Huard, Renée Martel.

Gilles Girard maître de cérémonie © JukeboxLeFilm.com & LaRuelleFilms.com

Pour reprendre les paroles de la chanson Les boîtes à gogo, «Oui mes amis, avec le film Jukebox, on peut danser sur des rythmes yéyé. On peut rire et chanter. Oui, on peut s’amuser. Yé Yé Yé».

Vue: Une exposition qui fait du Centre-du-Québec, le cœur du Québec

Après avoir photographié son Chili natal, la Vieille Capitale (sa ville d’adoption au début des années 1970), les vedettes du Festival international de jazz de Montréal et tant d’autres lieux et personnes, le photographe Victor Diaz Lamich pose son regard sur le Centre-du-Québec. Dans son œil, qui sait débusquer la beauté, la région 17 devient le Cœur du Québec. Ses photos sont présentées au Musée national de la photographie de Drummondville jusqu’au 27 septembre.

Victor Diaz Lamich a un style. Ses photos ont des couleurs vibrantes. Quand il couvre un spectacle, il vole aux artistes le moment où ces derniers s’abandonnent à leur art. Dans ses portraits, il nous harponne avec le regard de ses sujets, alors que dans ses paysages, il donne souvent la vedette au ciel, cette immensité si changeante.

Photo: Claude Deschênes

Pour le projet Sur la route du Cœur du Québec, fait en collaboration avec la Fondation Sainte-Croix/Heriot (une partie du profit de la vente des photos est versé à l’organisme), Victor Diaz Lamich a capté des paysages qu’on ne soupçonne pas quand on se contente de traverser Drummondville par l’autoroute 20. Des champs, des ponts, des rivières, des boisés, des bâtiments de ferme, les photos grand format (jusqu’à 48’’X 72’’) magnifient cet arrière-pays qui n’a jamais autant d’attention que Charlevoix, le Bas-Saint-Laurent ou l’Estrie. Pour changer la perspective, le photographe traque les réflexions sur l’onde ou s’offre une envolée pour quelques pauses aériennes.

Photo: Claude Deschênes

Le fait d’imprimer ses photos sur des plaques d’aluminium donne de la profondeur à ses images. On a parfois l’impression d’être devant une peinture.

Photo: Claude Deschênes

En tout cas, en sortant de cette exposition, on a juste envie de prendre la première route secondaire venue et de rouler dans ce magnifique décor naturel. C’est ce que j’ai fait, pour finalement me retrouver dans le très joli village de Sainte-Élisabeth-de-Warwick, où se trouve la Fromagerie du Presbytère. Je vous mets au défi de ne pas sortir du Magasin général les bras chargés de produits locaux!

Photo: Claude Deschênes

L’exposition de Victor Diaz Lamich m’a permis de découvrir le Musée national de la photographie, dont je n’avais jamais entendu parler, alors qu’il existe depuis plus de 15 ans.

Photo: Claude Deschênes

À sa création en 2006, l’institution s’appelait le Musée populaire de la photographie. En 2016, le musée a obtenu son accréditation gouvernementale et le statut de musée national. Depuis 2018, il loge dans ce qui était autrefois le Collège Ellis, au 400, rue Heriot, à Drummondville. Le déménagement et le nouveau statut ont eu un impact considérable sur la fréquentation, qui a dépassé les 50 000 visiteurs en 2019, dont plus de 75% provenaient de l’extérieur de la ville. Pas étonnant que l’endroit gagne en popularité, c’est le seul musée du genre au Canada, avec une collection de 35 000 appareils et 500 000 photographies.

Photo: Claude Deschênes

De la camera obscura à l’appareil photo jetable, on peut suivre l’évolution de cette technique élevée un jour au rang de 8e art. Lors de ma visite, Sylvain Croteau, qui animait la visite guidée, avait un plaisir évident à me montrer les spécimens rares de la collection, parmi lesquels deux chambres daguerriennes (daguerréotypes), invention du Français Louis Daguerre, dont il ne reste que huit exemplaires dans le monde.

Photo: Claude Deschênes

Parmi les nombreuses curiosités, mentionnons aussi une montre-appareil photo fabriquée pour un film de James Bond, une Leika officielle des Jeux olympiques de Berlin de 1936, une copie de l’appareil photo instantané Polaroid qui a valu à Kodak un procès retentissant pour non-respect de la loi sur les brevets. L’objet est dans sa boîte originale, même pas déballé!

Photo: Claude Deschênes

Le Musée expose aussi des photos, autant des clichés tirés de sa collection que ceux de photographes invités ou de gagnants de concours organisés par des clubs-photos régionaux. Le prix d’entrée du musée est réduit de moitié pour les membres du Mouvement Desjardins.