Des expos-cadeaux au Musée national des beaux-arts du Québec
Le Musée national des beaux-arts du Québec poursuit sur sa lancée. Depuis l’inauguration du pavillon Pierre Lassonde en juin 2016, l’institution de la Grande Allée à Québec ne cesse de nous surprendre. Il y a présentement à l’affiche plusieurs expositions simultanées qui valent absolument le déplacement.
Solar Equation
Commençons par Solar Equation de Rafael Lozano-Hemmer, la plus belle œuvre que j’ai vue cette année. Il s’agit d’un gigantesque soleil constitué de 25 580 lumières à DEL (diode électroluminescente). L’installation, qui pèse 1 500 kg et fait 3 mètres de diamètre, est suspendue au-dessus de l’entrée principale du pavillon Lassonde. L’œuvre jette une lumière chaude et changeante dans ce grand espace d’accueil où se trouvent entre autres les guichets et le restaurant Tempéra.
Rafael Lozano-Hemmer, qui a fait l’objet d’une exposition importante l’été dernier au Musée d’art contemporain, offre ici une œuvre qui nous donne un aperçu de l’activité solaire. Pour la réaliser, l’artiste québécois d’origine mexicaine s’est appuyé sur des données émanant de la NASA. En cette période de l’année où les journées sont courtes et souvent grises, ce soleil artificiel nous permet de faire le plein de sérotonine. Contrairement au Soleil de Chiully, œuvre permanente du Musée des beaux-arts de Montréal, Solar Equation n’est que de passage à Québec. L’installation sera décrochée le 24 février. Faites vite!
Marcel Barbeau - En mouvement
Il faut aussi se grouiller si on ne veut pas rater la fabuleuse rétrospective Marcel Barbeau - En mouvement, qui se termine le 6 janvier prochain. Voilà un artiste qui, durant les sept décennies de sa carrière, n’a jamais cessé de bouger, d’évoluer, de fuir vers l’avant.
Il l’a dit lui-même: «Mes peintures et mes sculptures sont en constante mutation comme notre monde, comme la vie. J’aime surprendre et me surprendre moi-même, car chaque surprise révèle un peu plus la beauté du monde.»
Il y a une centaine d’œuvres à voir, du milieu des années 1940 au début des années 2010. En parcourant les salles, on peut mieux comprendre le cheminement de cet artiste qui a commencé dans la mouvance des automatistes pour s’adonner ensuite à la peinture avec ficelles, à la performance picturale, à l’art optique, à la sculpture, toujours avec une absolue maîtrise des genres qu’il a explorés. Cette exposition stupéfiante permet vraiment de prendre la mesure de cet artiste qu’on n’a pas, me semble-t-il, suffisamment célébré de son vivant.
En art visuel, il n’est jamais trop tard pour se rattraper. C’est beaucoup ce que fait la nouvelle exposition permanente présentée depuis le 15 novembre dans un pavillon Gérard-Morisset remis au goût du jour pour marquer les 85 ans du Musée national des beaux-arts du Québec.
350 ans de pratiques artistiques au Québec
Cette exposition a le projet ambitieux de raconter 350 ans de pratiques artistiques au Québec. Pour ce faire, on n’a pas lésiné sur la quantité. 700 œuvres sont exposées, dont 400 pour la première fois. La qualité est aussi au rendez-vous, bien sûr.
Le parcours est divisé en cinq grands thèmes: Croire, Devenir, Imaginer, Ressentir et Revendiquer. On commence la visite au dernier étage avec l’art religieux, et on la termine avec le mouvement de contestation des artistes du Refus global.
Entre les deux, il y a la période du portrait (il y a un magnifique Louis-Joseph Papineau de Napoléon Bourassa), celle où on documentait l’histoire, comme les grands rassemblements de 1837, et celle où les peintres célébraient les magnifiques paysages québécois.
On a profité de l’occasion pour regarder la production artistique québécoise avec un prisme d’aujourd’hui. Cela veut notamment dire qu’on met en valeur de nombreuses œuvres de femmes artistes qui ont très peu eu la chance d’être exposées. Tout le monde connaît les Lemieux, Riopelle, Barbeau, Suzor-Côté, Krieghoff, mais qui a entendu les noms de Suzanne Duquet, Rita Mount, Sylvia Ary, Jori Smith, Sylvia Daoust, Helen Galloway McNicoll, Alice Des Clayes? Pourtant, le talent de ces femmes était indéniable, comme on peut le constater! Merci à notre époque de leur rendre justice.
Dans cette même volonté de corriger des lacunes du passé, l’équipe de conservateurs a déniché dans l’imposante collection du musée une multitude de tableaux racontant la présence autochtone; la plupart du temps dans la perspective des colonisateurs, mais vaut mieux un tel point de vue que rien du tout puisqu’il en dit beaucoup sur la perception que nous avons des Premières Nations.
Somme toute, ce rassemblement de pépites, je pense aux scènes d’hiver de Clarence Gagnon, aux images du port de Montréal qu’Adrien Hébert a immortalisées, aux éclats de couleurs de Marcelle Ferron, a de quoi nous rendre très fiers de la production artistique québécoise.
Alors qu’on pourrait penser qu’il manque un clin d’œil à la génération actuelle, une des salles du rez-de-chaussée offre ses murs à un aréopage de vedettes de l’heure comme Marc Séguin, le duo Cooke-Sasseville, Massimo Guerrera et Nadia Myre, sous le thème D’où venons-nous? Que sommes-nous? Où allons-nous? Belle démonstration qu’on est parti pour 350 autres années de création artistique de haut niveau.
Mirage blanc
Ma seule réserve concerne l’exposition Mirage blanc, sur le thème de l’hiver, présentée également au rez-de-chaussée du pavillon Gérard-Morisset. Comment dire? J’ai trouvé cette présentation… froide.
Pour le reste, je le répète, le Musée national des beaux-arts du Québec vaut le déplacement. Pendant la période des Fêtes, il y a Ciné-Cadeau à Télé-Québec, et des expos-cadeaux au MNBAQ. Je vous souhaite à tous un joyeux Noël et une année 2019 remplie de culture, d’art et de spectacles. Ça fait partie de ce qu’il y a de plus beau dans la vie.