La chronique Culture avec Claude Deschênes

Auteur(e)
Photo: Martine Doucet

Claude Deschênes

Claude Deschênes collabore à Avenues.ca depuis 2016. Journaliste depuis 1976, il a fait la majeure partie de sa carrière (1980-2013) à l’emploi de la Société Radio-Canada, où il a couvert la scène culturelle pour le Téléjournal et le Réseau de l’information (RDI). De 2014 à 2020, il a été le correspondant de l’émission Télématin de la chaîne de télévision publique française France 2.On lui doit également le livre Tous pour un Quartier des spectacles publié en 2018 aux Éditions La Presse.

De quoi égayer (et occuper) vos journées!

Les feuilles sont tombées, il fera noir plus de bonne heure, les nouvelles ne sont guère encourageantes sur le front de la pandémie, Donald Trump n’en finit plus de nous épuiser. Soit! Tournons le dos à tout ça et chantons en chœur C’est magnifique


Écouté: Sunset In The Blue de Melody Gardot

Ah, le pouvoir de la musique! J’ai lancé le nouvel enregistrement de Melody Gardot, et en moins de deux, je planais, en dépit de tout ce qui ne tourne pas rond autour. C’est magnifique!

Après avoir «erré» du côté de la soul et du funk, la chanteuse de jazz américaine, désormais installée à Paris, revient à la source, à ce qui m’avait fait succomber à son indéfinissable charme en 2006, lorsqu’elle a fait paraître son premier disque Worrisome Heart.

Sur Sunset In The Blue, tout est feutré, nappé de cordes somptueuses, comme sur My One and Only Thrill, son deuxième disque, qui révélait aussi un goût prononcé (et partagé) pour les sonorités brésiliennes.

«Ce disque aura une longue vie dans ma maison. Douze chansons, 54 minutes de musique, "Sunset In The Blue" est un trésor.»

Elle poursuit dans cette veine avec deux chansons de son cru en portugais et une délicieuse reprise de C’est magnifique, avec le chanteur portugais Antonio Zambujo. Regarder le clip fait rêver.

Melody Gardot n’est vraiment pas dépourvue de talent. En plus d’une voix suave à souhait, elle écrit et compose l’essentiel de son matériel. Du solide.

Sa chanson From Paris With Love est une splendeur. Sur ce disque, il y a aussi des reprises extraordinaires: Love Song d’Elton John et deux standards jazz à faire fondre n’importe quel cœur: Moon River et I Fall In Love Too Easily.

Ce disque aura une longue vie dans ma maison. Douze chansons, 54 minutes de musique, Sunset In The Blue est un trésor.

VU: Jimmy Carter: Rock and Roll President

Un président américain qui sourit tout le temps, qui croit foncièrement en des valeurs d’égalité, dont les mots et les comportements sont le reflet d’une humanité profonde, ça peut exister. Ça a déjà existé. Le documentaire Jimmy Carter: Rock and Roll President nous en fait la démonstration de manière éloquente.

La réalisatrice Mary Wharton nous présente celui qui a été le 39e président des États-Unis (1976-1980) en utilisant l’angle de la musique. On nous raconte comment cet homme né à Plains en Géorgie, élevé parmi une population à 80% noire, a développé une relation très forte avec le gospel et le jazz. Combien sa curiosité l’a conduit vers des artistes engagés comme Bob Dylan et Willy Nelson, à s’en faire des amis. À quel point le groupe Allman Brothers a contribué à faire de lui le candidat démocrate aux présidentielles de 1976.

Et pour prouver que ce lien avec la musique n’était pas simplement une astuce pour séduire les jeunes électeurs américains, la documentariste nous montre, avec des archives formidables, comment, une fois élu, Jimmy Carter a fait de la Maison-Blanche un lieu où les musiciens, noirs et blancs, se sentaient bienvenus.

Il y a une scène formidable où on voit le président, hilare, donner la réplique à Dizzy Gillespie interprétant avec un enthousiasme contagieux sa célèbre pièce Salt Peanuts.

Plusieurs grands noms de la musique, Gregg Allman, Willy Nelson, Bob Dylan, Nile Rodgers, Bono, apportent leur poids à la thèse du film qui veut que Jimmy Carter ait été un président unique en son genre dans l’histoire des États-Unis, entre autres à cause de son rapport à la musique, qu’il voyait comme un langage universel capable de transmettre ses valeurs d’équité, de justice et de paix.

Le règne de Jimmy Carter a été bref. La crise des otages américains en Iran et la crise économique de 1980 ont plombé son élan, et il a été battu par Ronald Reagan après un seul mandat. N’empêche, on regarde ce film avec le même large sourire qu’arbore ce président débonnaire, lauréat du prix Nobel de la paix en 2002, parce qu’encore aujourd’hui, à 96 ans, il donne espoir en un monde meilleur.

Pour voir ce film, rendez-vous sur le site du Cinéma du Parc.

LU: L’homme derrière. Sylvain Vaugeois, un as de la gestion stratégique

Alors que le développement de Montréal est à pause à cause de la pandémie, voici une lecture pour se souvenir qu’un jour il y a eu des gens qui ont rêvé grand pour Montréal. Sylvain Vaugeois a été un de ceux-là et son grand cousin, l’historien Denis Vaugeois, se charge de nous le rappeler dans un livre qui raconte la vie tumultueuse de cet idéateur hors-norme à qui on doit, entre autres, la venue à Montréal de la firme française Ubisoft.

Sylvain Vaugeois est né à Saint-Timothée (aujourd’hui Hérouxville) en Mauricie en 1957. Après avoir gravité dans le monde des cabinets politiques péquistes, ce fils de garagiste se transforme en consultant qui développe des projets ambitieux et avant-gardistes.

Une de ses premières idées sera de créer un régime d’assurance vie et santé s’apparentant au REER, c’est-à-dire que le cotisant obtient un crédit d’impôt en contribuant à un fonds dans lequel il pourra puiser sans payer d’impôts pour payer ses soins de santé. Le lobby des assurances n’aime pas son projet et le gouvernement hésite à encourager la médecine à deux vitesses. Tant pis, il récidive avec une autre idée dans le domaine de la santé: la construction d’un hôpital ultraspécialisé à Mirabel pour inciter des patients étrangers à venir en avion se faire soigner au Québec.

Autre échec. Qu’importe, Vaugeois rapplique avec, cette fois, la bonne affaire: transformer l’économie de Montréal. Il convainc le gouvernement du Québec (Bernard Landry est alors ministre des Finances) d’investir dans l’individu plutôt que l’entreprise, dans la formation plutôt que les infrastructures. Cela prendra la forme d’un crédit d’impôt associé à chaque emploi créé dans le secteur du multimédia qu’il voit, avant tout le monde, comme un secteur d’avenir. C’est grâce à cette formule qu’Ubisoft consentira à s’installer à Montréal. Banco!

Plusieurs entreprises suivront, et paveront la voie à d’autres idées défendues par le Groupe Vaugeois: la Cité du multimédia et la Cité du commerce électronique. Ces succès dopent la machine à idées de Sylvain Vaugeois. Voilà qu’il veut développer un train à propulsion magnétique permettant de relier Montréal à New York en 90 minutes, et créer une gigantesque place au centre-ville, la place des Amériques, pour accueillir les 15 000 nouveaux visiteurs quotidiens que cette liaison attirera.

Je n’ai pas besoin de vous dire que ça ne s’est pas fait. Sylvain Vaugeois s’est plutôt rabattu sur un immense projet récréotouristique sur les bords du lac Mékinac, en Mauricie. Cette fois, il a un allié aux poches profondes, le groupe immobilier Hines, prêt à investir 200 millions de dollars dans l’affaire, sauf que… Vaugeois meurt subitement à l’âge de 46 ans. L’autopsie révélera qu’il a succombé à une surdose de cocaïne.

Pour écrire son livre, Denis Vaugeois a eu accès aux archives de son petit-cousin et aux confidences de ses proches. On ne peut pas dire que l’auteur est complaisant par rapport à ce membre de sa famille, mais il a quand même débarrassé son récit des scories qui empêchent de célébrer aveuglément son côté visionnaire.

Il faut le dire, ce frimeur, qui combattait la bipolarité, s’est fait beaucoup d’ennemis à vouloir tirer toutes sortes de ficelles pour faire arriver ses idées. Cela étant dit, c’est un livre passionnant à lire, dans lequel, en bon historien qu’il est, Denis Vaugeois se permet des digressions toujours intéressantes sur l’histoire de Montréal et de la Mauricie. Et, disons-le, ça fait du bien de rêver des fois, ce que Sylvain Vaugeois, 17 ans après sa mort, nous permet de faire de manière posthume.

L’homme derrière. Sylvain Vaugeois, un as de la gestion stratégique, Denis Vaugeois. Éditions Septentrion. 2020. 192 pages.

Festival Cinémania du 4 au 22 novembre

Pandémie oblige, la 26e édition du festival de films francophones Cinémania se déroulera uniquement en ligne cette année. Du 4 au 22 novembre, ce sont plus d’une quarantaine de longs métrages que vous pourrez voir de chez vous, où que vous soyez au Canada.

Le site web du festival ressemble à un plat de bonbons. Le choix est vaste. Vous avez envie de voir Nathalie Baye, Isabelle Huppert, Charlotte Gainsbourg, Emmanuelle Béart, Omar Sy? On les retrouve tous dans la sélection.

La programmation comprend aussi les plus récents films de Michel Hazanavicius, Cédric Klapisch, Anne Fontaine, François Ozon. Il y a également des films québécois comme Flashwood de Jean-Carl Boucher, avec Pier-Luc Funk, ou Je m’appelle humain de Kim O’Bomsawin, avec Joséphine Bacon.

Si vous avez aimé la série française Dix pour cent, on vous offre, en première Nord-Américaine, les deux premiers épisodes de la dernière saison.

Mon conseil: rendez-vous sur le site de Cinémania, et magasinez-vous un bon film. 8$ pour un visionnement. 65$ pour le passeport permettant de tout voir (sauf les films d’ouverture et de fermeture).

Korean Film Festival du 29 octobre au 30 novembre

Depuis deux voyages faits en Corée du Sud en 2013 et 2014, je suis demeuré très curieux de la culture coréenne. Aussi, je me réjouis de l’existence à Montréal d’un festival de films coréens qui nous permet de voir chaque année des productions provenant de ce pays qui nous a donné Parasite, rien de moins que l’Oscar 2020 du meilleur film.

Ne reculant devant aucun des problèmes posés par la pandémie, les organisatrices du Korean Film Festival (KFF) ont choisi de tenir leur 7e édition sur le web.

Du 29 octobre au 30 novembre, une vingtaine de films pourront être visionnés en ligne, notamment Lucky Chan-sil (2019) de Kim Cho-hee, une comédie douce-amère qui a comme toile de fond le milieu du cinéma, et A French Woman (2020) de Kim Hee-jung, qui se passe entre Paris et la Corée.

Là encore, je vous conseille d’aller sur le site pour avoir une idée de la programmation. Il en coûte 4,50$ pour visionner un film et 9,50$ pour l’ensemble des films, qui sont présentés avec sous-titres anglais.

Ça va vous donner l’impression de voyager, vous permettre de vous échapper de votre confinement.

L’histoire de mes chansons, les 5, 12, 19 et 26 novembre

En novembre, l’animatrice Monique Giroux nous donne rendez-vous avec quatre géants de la chanson québécoise: Clémence Desrochers (le 5), Jean-Pierre Ferland (le 12), Stéphane Venne (le 19) et Yvon Deschamps (le 26).

Dans ces spectacles-entretiens, les confidences des invités seront entrecoupées de leurs plus grandes chansons.

Au nombre des interprètes invitées, mentionnons Marie-Michèle Desrosiers, Joe Bocan, Marie-Denise Pelletier, Marie Carmen.

Conçue pour être présentée devant public, la série L’histoire de mes chansons s’est transformée en webdiffusion en raison du resserrement des règles sanitaires. Les spectacles ont été enregistrés au Théâtre de la Ville de Longueuil. La captation vidéo de l’événement est faite par l’as réalisateur Pierre Séguin. Chaque programme coûte 25$, un forfait à 75$ est offert pour l’ensemble de la série. Chaque programme commence à 20h, dans votre salon! 

Mémoire collective, concert de l’Orchestre symphonique de Longueuil

L’Orchestre symphonique de Longueuil a aussi un rendez-vous à proposer aux amateurs de chanson québécoise.

L’OSL, dirigé par Alexandre Da Costa, a enregistré, à la cocathédrale Saint-Antoine de Padoue, un concert de versions symphonisées de chansons de Claude Dubois, Gilles Vigneault, Ginette Reno, Luc Plamondon, Céline Dion, Leonard Cohen, Robert Charlebois et Jacques Michel.

Il sera possible de visionner cet enregistrement de chez vous du 29 octobre au 11 novembre.

Le temps des forêts, l’Ensemble Constantinople

Avant que tous les yeux soient rivés sur les CHSLD du Québec, le compositeur Kiya Tabassian et la soprano Suzie LeBlanc avaient déjà à cœur d’entendre la voix de ceux qui habitent ces lieux de vie.

De 2016 à 2019, ils ont recueilli des témoignages qui servent aujourd’hui de base à un spectacle musical intitulé Le temps des forêts.

D’où viennent-ils? À quoi ressemble la vie qu’ils ont vécue? Quels souvenirs heureux ou malheureux gardent-ils de leur existence? L’écrivaine Hélène Dorion a donné forme à toutes ces confidences alors que Kiya Tabassian s’en est inspiré pour créer un univers sonore.

À compter du 2 novembre, on pourra voir le résultat de cette rencontre entre la mémoire de nos aînés, les mots d’une grande auteure et le son très singulier de l’Ensemble Constantinople.

Le visionnement est disponible sur la plateforme Vimeo au coût de 10$.