Archives du mot-clé Alzheimer

Pierre Huet: Vieillir avec Ginette Reno

S’il y a une chose qui m’embête, ce sont les anniversaires. Pas le mien: celui-là, je vis très bien avec. Non, je parle des anniversaires des autres, de mes amis, surtout. Remarquez, ça pourrait être pire: ils pourraient mourir. Non, heureusement, ils se contentent de vieillir. En maugréant, bien sûr. Mais c’est toujours mieux que de se taire parce qu’on est mort.

Je le précise: ce n’est pas l’achat des cadeaux qui m’embête. Nous avons heureusement convenu, mes amis et moi, de ne plus s’en donner. J’en donne à mes filles, oui, ou plutôt, j’en donnais, car depuis quelques années, elles se contentent, disent-elles, du plus beau cadeau que je puisse leur donner: celui de rester en vie. Et c’est un cadeau que j’ai l’intention de leur donner encore très souvent. Quant à ma blonde, c’est pire: j’oublie son anniversaire chaque année. J’ai beau lui dire que c’est parce qu’à mes yeux, elle ne vieillit pas, l’excuse fonctionne de moins en moins. Mais elle survit à cette insulte annuelle, je survis à ma honte, et le plus important, c’est que l’amour, lui, survit et prend même du mieux.

Donc, qu’est-ce qui m’agace dans les anniversaires des autres? Les vœux. C’est plus fort que moi: je me targue d’être écrivain, et j’essaie d’être original quand j’écris. Or, qu’y a-t-il de plus banal et routinier que «Bonne fête!» ou «Joyeux anniversaire!»? Alors je cherche à innover, à être différent d’année en année. Or l’ennui, c’est que je suis fidèle en amitié. Je connais certains de mes amis – les meilleurs, forcément – depuis 50 ans. Ça en fait, ça, des anniversaires. Et des vœux.

Mais j’ai trouvé un jour une formule, une phrase, dont je suis plutôt content. Je dis que j’ai trouvé, mais probable que quelqu’un quelque part se vantera de l’avoir trouvée avant moi. Mais comme le dit mon adage préféré: «Tout a été fait, mais pas par moi.»

Ma formule est toute simple, et presque sincère. J’écris maintenant dans mes cartes d’anniversaire ou, oui, vous l’avez deviné, sur Facebook, ceci:

«Tu ne vieillis pas: tu nous rajeunis.»

Tout simplement. Avouez que ça a de la classe. Je connais des compagnies de cartes d’anniversaire qui auraient payé une fortune pour avoir ça, au lieu de «T’es le meilleur!» ou «Lâche pas la patate!». Et le plus merveilleux, c’est que j’ai décidé un jour que ça s’appliquait aussi à moi: donc que dorénavant, je ne vieillissais plus: je rajeunissais les autres.

De prime abord, le sentiment est noble. Mais j’ai rapidement rencontré quelques résistances. Comme de la plupart des parties de mon corps, par exemple. Vous devriez entendre certains matins les commentaires désobligeants que dit ma hanche droite – qui, la pauvre, a été victime d’un accident de voiture, il y a pourtant bien longtemps. J’ai beau lui répéter que je ne conduisais même pas, elle me blâme encore, plus de trente ans après. «Va chercher ta canne», qu’elle me lance ou plutôt m’élance. Quelle canne, réponds-je? Mais on ne peut rien cacher à son propre corps. «Celle que tu as dû acheter quand une voiture t’a écrasé le pied; tu sais, la fois où le médecin t’a expliqué qu’à ton âge, les petits os du pied ne se ressoudent pas.»

Alors, oui, je le concède: mon corps continue à vieillir, de la même manière que le nombre de marches de l’escalier chez moi semble se multiplier.

Mais au bout du compte, je vis très bien avec ça. L’important, c’est que les deux parties les plus importantes de ma personne – et évitez-moi ici les blagues vulgaires – conservent leur jeunesse. Je parle d’abord de mon cœur, qui continue quotidiennement à aimer les personnes qui le méritent et même à en trouver d’autres.

Et je parle aussi de mon cerveau, surtout de sa partie qui aime pavaner: comment ça s’appelle déjà? Ah oui: la mémoire! J’ai une mémoire bionique, mais sélective. Je peux ainsi vous chanter la face B d’un 45 tours obscur de Ginette Reno datant de 1963. Par contre, mon année d’allemand, mon autre de grec au collège classique et mes deux années de physique-chimie? Disparues, oubliées, évaporées. Et non, ce n’est pas de l’Alzheimer, c’est de l’instinct de préservation.

Je vous entends déjà me demander si justement, en vieillissant, je n’ai pas peur de l’Alzheimer. Oui, bien sûr, parce que j’ai deux ou trois amis qui ont perdu la mémoire, ce qui revient presque à perdre la vie. Je me console un peu quand on me dit qu’ils sont tout de même capables de se souvenir de certaines chansons.

Je n’aurai jamais peur de vieillir aussi longtemps que chaque matin je serai capable de faire trois choses: me souvenir du nom de tous les gens que j’aime; d’épeler sans difficulté le mot «Alzheimer»; et de chanter Tout peut recommencer au complet. C’est la face B de Non papa de Ginette Reno. 1963.

Photo: Jeanne Robert Huet

À propos de Pierre Huet

Auteur de centaines de chansons, dont plusieurs des plus grands succès de Beau Dommage et d’Offenbach et de plusieurs autres interprètes, Pierre Huet a un style bien à lui et œuvre dans plusieurs univers, notamment celui de l’humour caustique. Il fut  d’ailleurs (et est toujours à l’occasion), Rédacteur en chef du magazine d’humour Croc.

Il a publié son autobiographie, intitulée En 67 tout était beau, phrase célèbre tirée de sa très belle chanson Le blues de la Métropole.

Il est toujours très actif au sein de plusieurs projets. Il a notamment accepté l’invitation de Jessica Harnois et signé les textes du livre Santé!, paru en octobre aux Éditions La Presse, sur l’univers de la sommellerie et du vin.

Ce que vous devez savoir sur les tests d’ADN à domicile

Un petit échantillon de salive envoyé par la poste est tout ce dont vous avez besoin pour connaître les origines de vos ancêtres, retrouver des membres de votre famille et savoir si vous êtes à risque de développer des maladies comme l’Alzheimer et le diabète. Ces tests d’ADN à domicile ne sont toutefois pas sans risques, surtout si vous tenez à votre vie privée.

Qu’est-ce que c’est?

Voilà maintenant plus d’une dizaine d’années que des entreprises comme 23andMe et Ancestry.ca offrent des tests d’ADN permettant de découvrir son profil génétique. Alors que ces services visaient surtout, au début, à transmettre de l’information de nature médicale, c’est leur utilisation dans un contexte de recherches généalogiques qui leur a permis de voir leur popularité exploser. Il y aurait d’ailleurs eu autant de tests réalisés en 2018 que pendant toutes les années précédentes. À ce rythme, plus de 100 millions de personnes devraient avoir été testées dans le monde d’ici les deux prochaines années.

Ceux qui achètent ces services – qui coûtent de 100$ à 200$, selon ce que l’on souhaite connaître – obtiennent des informations sur les maladies qu’ils risquent de développer et sur les saines habitudes de vie qu’ils devraient adopter. La plupart veulent toutefois surtout découvrir leurs origines. Les sites comme 23andme.com et Ancestry.ca affichent le lieu d’origine des ancêtres des utilisateurs, à quelle époque ils y résidaient, et plus.

Les données des utilisateurs qui le souhaitent peuvent aussi être utilisées pour retrouver des membres de leur famille, comme des cousins éloignés et même des frères et sœurs inconnus. Il est même possible de téléverser ses informations dans des bases de données publiques pour élargir encore plus sa recherche (et se comparer à ceux qui ont utilisé le test d’une entreprise différente, par exemple). Pour les mordus de généalogie, les tests d’ADN à domicile sont de véritables mines d’or.

Quels sont les risques associés?

Il n’y a toutefois pas que les cousins à la recherche de leurs ancêtres qui consultent ces bases de données. La police aussi le fait. C’est d’ailleurs en faisant analyser de l’ADN provenant d’une scène de crime que les policiers américains ont récemment pu découvrir l’identité d’un tueur et violeur en série des années 1970.

Si la percée a, à première vue, tout d’une bonne nouvelle, quelques bémols doivent toutefois être apportés. La technique n’est pas parfaite, et peut générer de faux positifs. Des utilisateurs courent donc le risque d’être accusés à tort, ou du moins, de voir leur vie chamboulée à la suite d’enquêtes policières, par exemple.

Pire encore, il n’est pas nécessaire d’avoir passé de test pour être à risque. Le «Golden State Killer» (le tueur et violeur des années 1970 mentionné ci-haut) n’avait pas lui-même fourni son ADN à un site de généalogie, mais suffisamment de ses cousins éloignés l’avaient fait pour permettre à la police de le retrouver.

Selon des études, si seulement 2% de la population fournissait son ADN à une même base de données, n’importe quel individu pourrait être retracé, peu importe qu’il ait donné son consentement ou non.

Plusieurs craignent aussi que les bases de données d’ADN soient utilisées par les compagnies d’assurances pour refuser une assurance vie ou faire augmenter une prime d’assurance maladie, par exemple.

La Loi sur la non-discrimination génétique protège en partie la population contre cette pratique au Canada, mais elle a été déclarée invalide par la Cour d’appel du Québec. Et même si les assureurs ont promis de ne pas utiliser de tests génétiques pour déterminer le montant des primes pour les petites assurances vies, en obtenir une plus grosse pourrait être de plus en plus difficile dans les années à venir, selon votre profil génétique.

Les entreprises qui offrent les tests génétiques vendent aussi certaines informations à d’autres compagnies, et il n’est pas toujours facile de savoir comment les données seront alors utilisées.

Même sans entrer dans le détail des risques légaux et reliés aux assurances, les résultats de ces tests peuvent aussi être chargés émotionnellement. Certaines personnes préféreraient peut-être ne pas savoir qu’elles risquent de développer une maladie grave, ou même que leur père n’est finalement pas leur père biologique.

Quelles sont les bonnes pratiques?

Les risques associés aux tests d’ADN à domicile sont bien réels, ce qui ne veut pas dire que ces tests sont à proscrire pour autant. Comme partout ailleurs, il revient à chaque personne de décider si les bénéfices sont assez importants pour qu’elle accepte les risques.

Plus la technologie s’améliore, plus ces tests peuvent, après tout, fournir des informations utiles. Ils peuvent même sauver des vies.

Selon une étude de la Vanderbilt University parue l’année dernière, la qualité de la protection offerte par les contrats d’utilisation varie beaucoup d’un test à l’autre. Dans l’ensemble, il semble qu’il vaut mieux se fier aux plus gros joueurs, comme Ancestry et 23andMe, qui permettent de mieux contrôler comment nos données sont utilisées.

Il est ainsi possible de choisir si on souhaite que nos informations soient utilisées, ou non, à des fins de recherche. L’ADN partagé est anonymisé, mais comme le cas du «Golden State Killer» l’a démontré, votre anonymat génétique est loin d’être garanti. Un utilisateur pourrait aussi refuser d’être retrouvé par sa famille éloignée, par exemple.

Les entreprises permettent aussi d’effacer les informations de votre compte une fois que vous avez reçu votre rapport sur votre santé ou sur vos origines. Votre ADN ne pourra alors plus être recherché ni transmis à des entreprises tierces. Les services d’analyse d’ADN évoluent cependant avec le temps, et il est habituellement possible d’obtenir de nouvelles informations à mesure que les bases de données s’étoffent. Ceux qui choisissent de retirer leur ADN de ces bases ne pourront donc pas bénéficier de ces nouveautés.

Que vous choisissiez d’acheter un test d’ADN à domicile ou d’effacer vos données, la question à vous poser est la même: tenez-vous suffisamment à connaître votre profil génétique pour accepter les risques qui y sont associés?