La chronique Voyage de Marie-Julie Gagnon

Auteur(e)
Photo: Mélanie Crête

Marie-Julie Gagnon

Auteure, chroniqueuse et blogueuse, Marie-Julie Gagnon se définit d’abord comme une exploratrice. Accro aux réseaux sociaux (@mariejuliega sur X et Instagram), elle collabore à de nombreux médias depuis une vingtaine d’années et tient le blogue Taxi-brousse depuis 2008. Certains voyagent pour voir le monde, elle, c’est d’abord pour le «ressentir» (et, accessoirement, goûter tous les desserts au chocolat qui croisent sa route).

Vancouver, ma ville baromètre

Pourquoi certains endroits s’insinuent-ils en nous pour ne plus nous quitter? J’y pense chaque fois que je m’arrête à Vancouver, l’une de mes villes «baromètres».



Est-ce elle ou moi? Chaque fois que je séjourne dans la métropole britanno-colombienne, je me demande laquelle de nous deux a le plus changé. Du 12e étage de l’hôtel JW Marriott où je me trouve pour un voyage de presse, j’aperçois les aquabus qui sillonnent la baie et l’un des ponts que j’ai si souvent traversés lors de mes premiers séjours dans la métropole. La grisaille me rappelle mes sacs à dos et valises remplis de vêtements beaucoup trop légers, oubliant la météo capricieuse de la côte ouest. De l’autre côté, il y a cette auberge où, jeune vingtenaire, j’ai passé un mois dans un dortoir alors que j’étudiais l’anglais.

Robson Street. Photo: Marie-Julie Gagnon

Partout, des souvenirs tissés pendant un quart de siècle se superposent. Les ramens de dépanneur engloutis presque quotidiennement pour pouvoir me payer des festins de sushis le vendredi. Ces bouts de plage où j’ai trimballé bouquins et questions existentielles. Ce garçon maladroit et le ciel parsemé d’étoiles au-dessus de nous. Mon désir grandissant de voir le monde à force de côtoyer des humains de partout. Ces envolées de papillons dans mon ventre. Mon cœur fissuré par ces battements de trop. Mon rejet sans appel de la réalité – celle des autres –, la mienne refusant obstinément de concorder à ces images ennuyeuses de vie linéaire. Mon éternelle quête d’absolu, entre soirées bien arrosées et mes longues marches en solo à travers les rues désertées – bien avant que drogue et itinérance transforment certains de ses quartiers. Peut-on vraiment savoir qui l’on est sans s’être frotté à la différence?

Puis, il y a eu l’Asie et mes passages éclairs en route vers le Québec, parfois de quelques heures à peine. Les voyages en famille ont suivi. Devenue épouse et mère, j’ai eu envie de partager mon amour pour cette ville avec mes chéris. Le travail me permet maintenant de revenir souvent, parfois seule, parfois avec des collègues. Ma relation avec Vancouver est sans contredit ma plus longue, simple et stable.

Stanley Park, où j’aime tant me perdre. Photo: Marie-Julie Gagnon

Vancouver, aujourd’hui

J’ai beau avoir développé une certaine intimité avec la ville au fil des ans, elle continue de me surprendre et de me charmer. J’aime retourner dans ces restaurants qui ont traversé le temps – les ramens de Maruhachi sont bien meilleurs que ceux du dépanneur! – et tester de nouvelles adresses.

J’écris ces lignes alors que je m’apprête à découvrir Minami, dans Yaletown, et je suis aussi excitée que si j’allais voir Madonna en spectacle. Il faut dire que sa grande sœur, Miku, m’a conquise il y a bien longtemps déjà avec ses sushis aburi (grillés à la flamme). Après, je mettrai le cap sur Stanley Park, où j’aime tant me perdre. Cette fois-ci, une ambassadrice culturelle de Talaysay Tours me racontera l’histoire de l’endroit à travers le regard des Sḵwx̱wú7mesh (Squamish) et des Shíshálh (Sechelt). C’est l’un des aspects que j’ai toujours aimé de Vancouver: l’intégration des cultures autochtones aux propositions touristiques bien avant qu’on commence à s’y intéresser ailleurs.

Photo: Marie-Julie Gagnon

Après, j’irai me balader et boire un cocktail avec une amie. Je suis toujours impressionnée par les prouesses des mixologues de cette ville. Je sais qu’il suffira d’un coin de rue ou d’un coup d’œil aux montagnes pour que je sois à nouveau projetée dans l’un de ces moments fondateurs que je garde précieusement en moi. Mes souvenirs s’animeront comme ces films qu’on projette sur des écrans de fortune. Je revivrai pêle-mêle mes mille vies. Je me perdrai peut-être quelques instants dans ces réalités passés-présentes, trop absorbée par l’émotion pour savoir précisément quel jour nous sommes. Ces moments refuges sont à la fois thérapeutiques et un peu cruels.

Les sushis que j'ai mangés ce midi. Photo: Marie-Julie Gagnon

Vancouver est ma porte vers l’infini et au-delà. Ici, je n’ai ni âge, ni raison: je redeviens cette éternelle rêveuse qui cherchera toujours à aller plus loin. À ressentir le monde.

Et à manger le plus de sushis possible.

Merci à JW Marriott Parq Vancouver, à Destination British Columbia et à Destination Vancouver pour l’invitation.

À lire également: