Parmi les (rares) bons côtés de la pandémie, la meilleure acceptation du travail à distance est certes l’un des plus notables. Si, à plusieurs endroits sur la planète, des communautés de nomades numériques se côtoyaient déjà depuis plusieurs années, de nouvelles possibilités pour des séjours de différentes durées pullulent depuis la reprise des voyages. Étant moi-même une adepte de télétravail, j’ai rassemblé pour vous le fruit de mes recherches des derniers mois et demandé à quelques adeptes de partager leurs conseils.

D’abord, sachez que même si plusieurs chaînes, comme Selina, où je me suis arrêtée en Colombie en février, ciblent surtout les millénariaux, les têtes grisonnantes sont tout aussi acceptées. Le télétravail peut se vivre de mille et une manières: à l’hôtel, dans une auberge, dans un gîte, en appartement, dans une maison de location… Il suffit d’avoir accès à une bonne connexion Wi-Fi ou à un forfait cellulaire permettant de se brancher quand il est nécessaire de se mettre au boulot.

Les hôtels CitizenM sont pour moi de parfaits cocons où je peux allier boulot et exploration pour de courtes durées. Les chambres y sont petites et douillettes et des espaces de coworking permettent de travailler dans un cadre sympathique sans devoir sortir du bâtiment. On en trouve en Europe et de plus en plus aux États-Unis.

Au fil du temps, j’ai rencontré des travailleurs de différentes générations, dont des semi-retraités qui profitaient pleinement des lieux où ils se trouvaient en dehors du travail. Repérer des espaces de coworking, où des voyageurs – mais aussi parfois des habitants de l’endroit – se rendent pour travailler, permet d’avoir une connexion fiable et de croiser des gens. Pour en dénicher, on consulte la CoWorkMaps.

De la République dominicaine à l’Équateur

La relationniste Marie-Annick Boisvert, dans la cinquantaine, a trouvé son petit coin de paradis à Las Terrenas, en République dominicaine, en 2020. Depuis, elle y loue un condo où elle séjourne quelques mois par hiver. «Pour une personne à son compte, le plus important est d’avoir une bonne connexion Internet, dit-elle. Il faut se renseigner à ce sujet. On manque souvent d’électricité en République dominicaine. Il faut s’assurer qu’il y ait une génératrice à l’endroit où l’on se trouve. À Las Terrenas, il y a un espace de cowoking, COMÚN CoWork.»

La location à long terme peut toutefois représenter un défi. «C’est plus payant pour les propriétaires de louer pour des périodes d’une semaine en haute saison, observe Marie-Annick Boisvert. Je loue à l’année parce que ça me revient à peu près au même prix que seulement pour quelques semaines. Ça se trouve, mais il faut faire des recherches.»

La blogueuse et auteure trentenaire Béatrice Bernard-Poulin aime elle aussi transporter son bureau sous le soleil pendant l’hiver. Elle a concocté un billet pour parler de ses expériences de télétravail. «En faisant le choix d’être travailleuse autonome, j’ai aussi fait le choix de travailler d’un peu partout dans le monde», écrit-elle. Elle s’offre généralement des séjours d’un mois. «Même si je suis en voyage, je réserve plusieurs heures chaque jour pour consulter mes courriels, rédiger des articles et travailler sur certains dossiers.»

Elle revient d’un voyage de cinq semaines en Équateur, dont quatre où elle s’est imposé une certaine discipline de travail. «La majorité de notre séjour a été au Onda Hostel de Las Tunas, qui était aussi la raison pour laquelle nous avons choisi de visiter l’Équateur, raconte-t-elle dans un article dans lequel elle détaille son budget. Nous avons réservé l’appartement Cotopaxi (un studio sur deux étages avec immense terrasse avec vue sur la mer) pour 30 nuits. Le tarif longue durée était de 850$ US et incluait le ménage hebdomadaire, l’eau, le wifi et le déjeuner.»

Sur son site, l’Onda Hostel souligne d’ailleurs la qualité de sa connexion Internet. En plus des chambres à partager, on y trouve des chambres privées et même de petites maisons. Comme dans les auberges Selina, des cours de yoga sont offerts tous les jours. Les propriétaires, Maribel et Mathieu, sont originaires du Québec. Si vous souhaitez en savoir plus, la Québécoise Maude Carrier relate aussi son séjour sur son blogue MCGlobetrotteuse. Elle y rassemble également des informations à propos des déplacements, de la logistique et du coût de la vie.

Travailler dans un «tout compris»

Afin de permettre aux télétravailleurs de repérer aisément les hôtels avec de bonnes connexions Internet, Air Transat a pour sa part créé la collection Hors du Bureau. Treize hôtels peuvent accueillir les voyageurs qui souhaitent combiner vacances et travail pendant au moins deux semaines. C’est l’occasion de séjourner dans une destination du Sud en formule tout-inclus, à Cuba, au Mexique, au Panama, en République dominicaine ou en Jamaïque. En plus du Wi-Fi et d’un espace dédié au travail dans la chambre, les télétravailleurs ont droit à un service de buanderie gratuit ou à tarif réduit, à des services d’impression et de soutien technique. Il n’y a pas non plus de supplément simple.

Sunwing propose aussi de «surclasser votre bureau» pendant 14 jours ou plus au Royalton Splash Punta Cana Resort and Spa, au Royalton Riviera Cancun Resort and Spa et au Royalton Negril Resort and Spa. «Tous les forfaits comprennent un accès gratuit au centre d’affaires de la propriété, en plus du concept All-In Connectivity qui offre le Wi-Fi dans tout l’hôtel, des chargeurs portatifs et un accès gratuit en tout temps au salon club Diamant. De plus, profitez de cours de yoga au coucher de soleil, de cinq à sept quotidiens et de repas gastronomiques», souligne le site du voyagiste.

La Thaïlande, paradis du télétravail?

Très prisée des nomades numériques, la Thaïlande a lancé en 2022 un visa pour les télétravailleurs étrangers. Les Canadiens peuvent y séjourner pendant 30 jours ou moins sans visa. De nombreux articles font état des avantages de Chiang Mai, très populaire auprès des expatriés et des nomades numériques.

Pour la blogueuse, auteure et cinéaste Jennifer Doré Dallas, la Thaïlande fait sans contredit partie des endroits où il est le plus facile de s’installer pour un long séjour de télétravail. «À Bangkok, Chiang Mai et dans les grandes villes, le Wi-Fi est beaucoup plus fiable qu’ailleurs en Asie du Sud-Est, dit-elle. On y trouve aussi de nombreux espaces de coworking et des cafés où l’on encourage les gens à rester travailler, contrairement au Québec, où on est plutôt persona non grata. Par contre, il est important d’utiliser un VPN, car il y a beaucoup de fraudes sur les réseaux publics.» Pour en savoir plus sur la sécurité, consultez cet article de Maxime Johnson. François Charron a aussi consacré un article au VPN.

Le site Holiworking vante pour sa part les charmes de l’île de Koh Samui, réputée pour ses plages et la plongée sous-marine. Selon le site, l’espace de coworking Mantra Work, d’où il est possible de voir le littoral, est à considérer. «L’endroit est idéal pour travailler dans le calme tout en rencontrant d’autres coworkers du monde entier. Des bureaux privatifs sont mis à votre disposition afin d’échanger lors de visioconférences ou appels téléphoniques.»

Télétravail responsable

J’en ai glissé un mot dans le Carnet voyage du Devoir du 24 février dernier, Vaolo, entreprise d’innovation sociale, a lancé il y a quelques mois sur son site une nouvelle section consacrée au télétravail. «L’objectif de ce programme est de valoriser ces petits hébergements où l’achalandage, à certains moments de l’année, est moindre, a résumé Jean-Sébastien Noël, fondateur du projet. Nous avons repéré ceux qui sont les plus adéquats pour le télétravail. Nous nous sommes par exemple assurés que le wifi fonctionne bien et que ces lieux comptent des espaces de travail réservés à cet usage.»

Ainsi, il est possible de séjourner dans des hébergements de différentes gammes à 50% du prix habituel dans une dizaine de pays dont la France, l’Espagne, le Maroc, le Brésil, le Costa Rica et l’Équateur selon le moment de l’année. En avril, Momentôm Refuge Nature, à Petite-Rivière-Saint-François, dans la région de Charlevoix, fait aussi partie des options disponibles. À noter que Vaolo ne touche pas de commission, contrairement à Booking, Expedia et autres Agoda de ce monde.

D’autres possibilités au Québec

Il n’est souvent pas nécessaire d’aller au bout du monde pour se dépayser. Transporter son bureau en pleine nature ou dans un hôtel douillet peut parfois apporter de grands bénéfices, ne serait-ce que pour la concentration.

Bien qu’il ne soit pas possible de trouver de bons réseaux de téléphonie cellulaire partout dans la province, certains hébergements mettent de l’avant leur bonne connexion Wi-Fi et des forfaits pour télétravailleurs. C’est le cas de trois des membres d’Ôrigine artisans hôteliers.

Dans la Baie-des-Chaleurs, en Gaspésie, [ÈST] éco-cabines invite les télétravailleurs à séjourner jusqu’au 15 mai et entre le 15 septembre et le 15 décembre. Le forfait comprend le café. «Nous avons sélectionné avec soin le café de la Brûlerie du quai, une torréfaction locale réputée, pour vous offrir une expérience caféinée exceptionnelle. Laissez-vous inspirer par notre cadre paisible et revitalisant, propice à la concentration et à la créativité.»

Dans les Laurentides, la nouvelle auberge Partage Lodge, en collaboration avec le Couvent Val-Morin, compte sept chambres avec différentes configurations possibles. L’endroit convient autant à ceux qui veulent décrocher qu’aux télétravailleurs qui souhaitent profiter de la nature dès qu’ils referment leur ordinateur.

J’écris ces lignes dans le confort d’un des nouveaux bâtiments Oasis du Spa Eastman, axés sur la durabilité. Bien que l’objectif premier d’un tel endroit ne soit pas de venir travailler, un forfait tout-inclus de télétravail a été imaginé pour les gens qui, comme moi, ne peuvent pas se permettre de complètement délaisser leurs activités professionnelles, mais ont besoin de prendre soin d’eux. Ne serait-ce que pour la cuisine tonique savoureuse du restaurant, qui fait partie des inclusions, ce genre de séjour d’au moins trois nuits est à considérer. L’accès aux bains et aux saunas fait partie des avantages majeurs de ce type de séjour, en plus des sentiers. (Ai-je besoin de préciser que j’ai envie de prendre un abonnement annuel?)

Dans la région de Lanaudière, Natur’eau Spa & Chalets a aussi concocté un forfait destiné aux télétravailleurs. De deux nuitées, le séjour dans l’un des deux chalets branchés à la fibre optique inclut aussi l’accès aux bains. Il est possible d’ajouter des journées supplémentaires. En 2024, ce forfait, qui doit être acheté en ligne, est disponible entre le 1^er avril et le 20 juin et entre 28 octobre au 19 décembre.

Des hôtels comme le Alt à Québec proposent par ailleurs des forfaits pour travailler à l’hôtel pour la journée.

Une communauté de télétravailleurs

Marie-Annick Boisvert a aussi porté à mon attention le fait que le programme Remote Year, lancé en 2014, ne propose plus seulement de partir une année entière comme à ses débuts. Il est maintenant possible de prendre part à des séjours d’un ou quatre mois. Il est nécessaire de devenir membre de la communauté moyennant des frais annuels de 199$ US. L’avantage principal est sans doute d’éviter de longues recherches: on sait déjà que les lieux sélectionnés conviennent au télétravail.

«Nous rassemblons les travailleurs à distance en tant que communauté pour travailler et voyager à l’étranger dans plus de 20 destinations à travers le monde, indique le site de Remote Year. Notre plateforme est conçue pour aider les travailleurs à distance, les nomades et les voyageurs, qu’ils soient nouveaux ou expérimentés. Travailler à distance et voyager en solo peut être intimidant, chronophage et isolant, alors laissez-nous nous occuper de la planification pour vous. Remote Year propose un voyage pour tous les types de professionnels à distance, tous les budgets et tous les styles de vie.»

Qui fait partie de cette communauté? «C’est une question que l’on nous pose souvent et à laquelle il n’est pas facile de répondre, peut-on lire dans la foire aux questions. Nos membres, que nous appelons “la Nation”, sont une cohorte diverse et variée de 5 000 personnes qui ont voyagé et continuent de voyager avec nous, de 21 à plus de 75 ans. Le type de travail varie d’un plein temps à un travailleur indépendant, d’un architecte à un publicitaire.»

Les informations regroupées dans cet article ne sont bien sûr qu’une infime partie de l’offre existante. Seulement au Québec, il y aurait de quoi écrire un guide! N’hésitez pas à partager vos coups de cœur avec nous si vous avez vécu des expériences positives!

P.S. Cette chronique était particulièrement pour vous, Madame Danielle Villeneuve. Merci!