La chronique Voyage de Marie-Julie Gagnon

Auteur(e)
Photo: Mélanie Crête

Marie-Julie Gagnon

Auteure, chroniqueuse et blogueuse, Marie-Julie Gagnon se définit d’abord comme une exploratrice. Accro aux réseaux sociaux (@mariejuliega sur X et Instagram), elle collabore à de nombreux médias depuis une vingtaine d’années et tient le blogue Taxi-brousse depuis 2008. Certains voyagent pour voir le monde, elle, c’est d’abord pour le «ressentir» (et, accessoirement, goûter tous les desserts au chocolat qui croisent sa route).

Pour vous évader, seriez-vous prêts à aller… nulle part?

On dit souvent que le voyage débute avant le départ, au moment où on commence à le préparer. Alors qu’il est plus difficile que jamais de planifier quoi que ce soit, différentes initiatives apparaissent aux quatre coins de la planète, surtout en Asie et en Australie, pour susciter l’excitation des départs sans pour autant traverser les frontières.



Déjà, l’été dernier, nous sommes nombreux à avoir sourcillé en apprenant que la compagnie taïwanaise China Airlines proposait trois «vols» sans décollage à Songshan. Le concept de l’expérience: les passagers se rendaient à l’aéroport, traversaient le point de contrôle, embarquaient… et débarquaient. Qui peut avoir envie de s’offrir ce type d’expérience en pleine pandémie? Quelque 7000 personnes, semble-t-il… Parmi tous ces participants à un concours, seuls 180 d’entre eux – 60 par «vol» – ont eu la chance de franchir ces étapes jugées fastidieuses par bon nombre de voyageurs.

D’autres jet-setters asiatiques n’ont pour leur part pas hésité à payer pour décoller… et revenir chez eux. En août, Eva Air, un autre transporteur taïwanais, a notamment opéré un vol spécial Hello Kitty qui a survolé l’île de Formose et les îles Ryukyu, au Japon, avant de revenir à son point de départ, l’aéroport de Songshan. À bord de ces avions qui ne vont nulle part, les passagers sont traités comme s’ils partaient pour une destination lointaine.

Le vol qui s’est vendu le plus rapidement de toute l’histoire de Qantas, en Australie? Celui qui a quitté Sydney et survolé le pays pendant 7 heures, le 10 octobre dernier, avant de ramener les passagers dans la métropole. Il a fallu 10 minutes pour que les 134 billets vendus entre 787 et 3787 dollars australiens (740 à 3560 dollars canadiens)… s’envolent.

À bord d’un Boeing 747, les passagers ont notamment pu apercevoir la Grande Barrière de corail, Uluru et Bondi Beach. Un globe-trotter a raconté à CNN avoir utilisé ses points pour prendre part à cette expérience «qu’on ne vit qu’une fois». Les frontières australiennes étant fermées depuis mars, seuls les résidents du pays ont pu réserver des sièges. Malgré tout le scepticisme engendré par l’annonce du projet, les commentaires enthousiastes laissent croire que ce type d’expérience a un bel avenir. Le PDG de la compagnie aérienne, Alan Joyce, s’est d’ailleurs dit ouvert à la réitérer.

Le vol qui s’est vendu le plus rapidement de toute l’histoire de Qantas, en Australie, est celui qui a quitté Sydney et survolé le pays pendant 7 heures. Photo: Facebook Qantas

Une petite croisière avec ça?

Plus surprenant encore, le 5 octobre dernier, l’Agence France-Presse rapportait que Singapour discute avec différents opérateurs afin de lancer des croisières ayant la cité-État comme point de départ et d’arrivée. Bien qu’une surveillance sanitaire accrue soit prévue, on ne peut pas oublier les histoires d’horreur des derniers mois, y compris la douzaine de cas détectés sur le premier bateau de croisière à accoster en Grèce depuis le confinement, en septembre dernier.

Singapour discute avec différents opérateurs afin de lancer des croisières ayant la cité-État comme point de départ et d’arrivée. Photo: Peter Hansen, Unsplash

Bien entendu, de nombreuses voix s’élèvent aussi pour dénoncer ces pratiques polluantes, tant dans les airs qu’en mer. Singapore Airlines a d’ailleurs renoncé à emboîter le pas à ses pairs à la suite de ces critiques virulentes. Qu’à cela ne tienne, le transporteur ne manque pas d’inventivité: des repas sont maintenant servis à bord d’un Airbus A380 stationné à l’aéroport pour la modique somme de 496 dollars singapouriens (479 dollars canadiens). Les deux premiers services se sont vendus en à peine une demi-heure! Des dîners et des soupers ont été ajoutés à d’autres dates, en différentes classes. La distanciation sociale est respectée et il est possible de regarder un film pendant le repas. Presque comme en voyage, sauf que l’avion ne quitte jamais le sol.

Alors, prêts à ne pas partir?