La chronique Voyage de Marie-Julie Gagnon

Auteur(e)
Photo: Mélanie Crête

Marie-Julie Gagnon

Auteure, chroniqueuse et blogueuse, Marie-Julie Gagnon se définit d’abord comme une exploratrice. Accro aux réseaux sociaux (@mariejuliega sur X et Instagram), elle collabore à de nombreux médias depuis une vingtaine d’années et tient le blogue Taxi-brousse depuis 2008. Certains voyagent pour voir le monde, elle, c’est d’abord pour le «ressentir» (et, accessoirement, goûter tous les desserts au chocolat qui croisent sa route).

Le Panama hors des tout inclus

J’avais gardé un souvenir mitigé d’un premier voyage au Panama en formule tout inclus, il y a huit ans. Une invitation au Meaningful Travel Summit, piloté par l’organisation américaine à but non lucratif Tourism Cares et PROMTUR Panama m’a permis de découvrir d’autres facettes de ce petit pays qui ne se résume pas à son canal légendaire. Si ma perception a changé? Et comment!



Certains ne jurent que par la mer. Moi, c’est dans la jungle que je ressens le plus grand bien-être. Je me love dans sa chaleur humide comme dans une grande couverture en hiver. Je m’étonne chaque fois des mille et une nuances de vert révélées par la pluie et des plantes qui s’en détachent. Ici, une «hot lips», variété de sauge à la fleur rouge qui s’apparente à des lèvres pulpeuses. Là, un champignon brunâtre qui évoque une œuvre d’art. J’ai beau être la pire des trouillardes, araignées et serpents me fascinent plus qu’ils me font peur. Et puis, avez-vous déjà pris le temps d’observer des fourmis coupeuses de feuilles en plein travail? J’aimerais avoir le centième de leur efficacité!

Sur la Trogon Trail. Photo: Marie-Julie Gagnon

La symphonie de la jungle m’apaise. Même si le cri des singes hurleurs n’a rien de mélodieux, les entendre résonner à travers le tressaillement des feuilles et le concert des insectes m’accroche inévitablement un sourire aux lèvres. Quand, soudainement, un chant nouveau s’ajoute à cette trame parfaitement rodée, mon oreille est titillée. Est-ce un oiseau? Un animal inconnu? Mon imagination? Chaque musicien joue sa partition à merveille, se distinguant dans son unicité tout en se fondant au tumulte de la forêt. Les notes s’entremêlent dans une sorte de chaos magnifiquement orchestré.

Une «hot lips», variété de sauge à la fleur rouge qui s’apparente à des lèvres pulpeuses. . Photo: Marie-Julie Gagnon

Ce sont les images qui me traversent l’esprit, en me baladant sur la Tragon Trail, à Achiote, dans la province de Colón. Chaque fois que j’en ai l’occasion, je m’éloigne du groupe pour me concentrer sur la symphonie, constamment brisée par les voix humaines de notre joyeuse bande.

Un champignon qui ressemble à une œuvre d'art. Photo: Marie-Julie Gagnon

Deux jours plus tard, alors que j’atteins le sommet du sentier La Caldera, dans la vallée d’Anton, je me fais le même commentaire: le spectacle de la nature est sans égal. Coup de chance: le ciel est bien dégagé. D’un côté, la côte caraïbe. De l’autre, celle du Pacifique. «C’est seulement possible une dizaine de jours par année, observe Carlos Celis, guide dans la vallée d’Anton. Nous pouvons généralement voir la côte pacifique, mais c’est plus rare de voir celle des Caraïbes.» Si je peux en plus apercevoir un paresseux, comme ce fut le cas un peu plus tôt ce jour-là, j’ai l’impression d’avoir rencontré Mick Jagger.

Carlos Celis, guide dans la vallée d’Anton. Photo: Marie-Julie Gagnon

Une fois redescendue, je ferai la connaissance d’une autre star: Evelio, patriarche qui nous accueille chez lui le temps d’un festin et d’une démonstration d’extraction traditionnelle de jus de canne à sucre. Voilà une journée que je ne suis pas près d’oublier.

Evelio, patriarche qui nous accueille chez lui le temps d’un festin et d’une démonstration d’extraction traditionnelle de jus de canne à sucre. . Photo: Marie-Julie Gagnon

À la recherche d’authenticité

Pour accéder à ces moments uniques, encore faut-il savoir les trouver. Aux fantastiques guides d’Ancon Expeditions, entreprise qui met de l’avant la nature panaméenne depuis 25 ans, se sont ajoutés des guides locaux tout au long du séjour, dont Carlos (alias Sentimientovallero sur Instagram), qui se définit d’abord comme un «guide de la nature». «Mon objectif est de connecter les gens à la nature, précise-t-il. C’est là-dessus que je me concentre dans mon travail. À apprendre à connaître la biodiversité locale et avoir cette expérience de sentir l’énergie de la nature à travers la forêt.» Qu’il nous parle des orchidées, de la passion de sa fille pour la photographie de champignons ou qu’il nous raconte les paysages traversés, on sent l’amour profond qu’il porte à chaque élément qui l’entoure.

Chutes Yayas dans la province de Coclé. Photo: Marie-Julie Gagnon

Les excursions sélectionnées par Tourism Cares et Visit Panama avaient un objectif bien précis: faire vivre des expériences locales et authentiques (mot malheureusement galvaudé ces dernières années) à la quarantaine de participants du Meaningful Tourism Summit, dont la majorité occupe un rôle décisionnel au sein d’un voyagiste, d’une organisation ou autre entreprise touristique. «Nous promouvons activement nos communautés parce que nous voulons que plus de gens bénéficient du tourisme, pas seulement une grande infrastructure, une grande ville ou notre Riviera Pacifique», explique Lorena Correal, directrice commerciale et des alliances stratégiques chez Visit Panama, qui travaille en étroite collaboration avec APTSO, l’association du tourisme durable.

Achiote, province de Colon. Photo: Marie-Julie Gagnon

Dans cet ordre d’idée, la collaboration avec Tourism Cares a permis d’identifier des excursions susceptibles d’avoir un impact positif à la fois pour les touristes et les communautés d’accueil. Une carte regroupant 20 petites entreprises a ensuite été créée.

«Dès le début de notre collaboration avec Tourism Cares, ils nous ont beaucoup aidés à voir le potentiel et à inclure ces personnes, ces prestataires, ces expériences, ces communautés dans la carte et dans l’itinéraire, explique Mme Correal. Nous nous demandions parfois si c’était trop rustique ou si ce n’était pas encore prêt. Ils nous ont dit: “Non, c’est ce que nous recherchons. Nous voulons trouver des expériences qui sont à un pas d’être prêtes pour le marché pour que ces gens qui viennent à l’événement, ces faiseurs de changement, ces leaders, puissent vous aider à y arriver”.»

Musique et danse traditionnels chez Evelio. Photo: Marie-Julie Gagnon

Quand je lui raconte à quel point j’avais été choquée de voir des singes se faire nourrir par les touristes lors de ma première visite au pays, elle reconnaît que ces pratiques existent encore à certains endroits. «Mais dans tout ce voyage, vous n’avez jamais vu quelque chose comme ça, dit-elle. C’est pour cela que nous essayons de promouvoir, d’encourager et de mettre en lumière [les bonnes pratiques]. Lorsque les gens voient que les personnes mises en avant font les choses correctement, ils commencent à faire de même.»

Même si les principales attractions attirent un nombre grandissant de visiteurs, Visit Panama souhaite continuer à mettre l’accent sur le tourisme durable. «Nous avons encore des gens qui viennent au Panama juste pour voir le canal et faire du shopping, croit Lorena Correal. C’est une réalité: ils continueront à le faire. Mais nos efforts de promotion sont dirigés vers les visiteurs qui font plus de choses.»

Chose certaine, moi, il me reste encore pas mal de bouts de jungle à explorer.

Panama City. Photo: Marie-Julie Gagnon

Pratico-pratique:

  • Tourism Cares a été créée il y a 20 ans et propose des événements internationaux depuis 2012. Les Meaningful Travel Summit dans leur forme actuelle, avec visites sur le terrain, sessions d’information, panels et ateliers, ont débuté en Jordanie en 2018.
  • La «Meaningful Travel Map» du Panama et celles des sommets précédents se trouvent sur le site de Tourism Cares.
  • Copa Airlines propose des vols entre Montréal et Panama City depuis 10 ans. La fréquence des vols est quotidienne depuis ce printemps.
  • Bien des Québécois se rendent au Panama en formule tout inclus avec Air Transat et Sunwing Airlines, surtout depuis l’inauguration de l’aéroport de Rio Hato, à quelques minutes de Playa Blanca, en 2013. À noter que les avions en provenance du Canada (de Montréal, Bagotville et Toronto) sont pour le moment les seuls vols internationaux à atterrir dans cet aéroport.
  • Il faut absolument prendre le temps de visiter la capitale, surtout pour la vieille ville!

J’étais l’invitée de Tourism Cares, Visit Panama et Copa Airlines, qui n’ont eu aucun droit de regard sur ce texte.