La chronique Voyage de Marie-Julie Gagnon

Auteur(e)
Photo: Mélanie Crête

Marie-Julie Gagnon

Auteure, chroniqueuse et blogueuse, Marie-Julie Gagnon se définit d’abord comme une exploratrice. Accro aux réseaux sociaux (@mariejuliega sur X et Instagram), elle collabore à de nombreux médias depuis une vingtaine d’années et tient le blogue Taxi-brousse depuis 2008. Certains voyagent pour voir le monde, elle, c’est d’abord pour le «ressentir» (et, accessoirement, goûter tous les desserts au chocolat qui croisent sa route).

Comment tente-t-on de vous convaincre de repartir?

Dans un monde idéal, le vaccin contre la COVID-19 nous permettrait de retourner à notre «vie d’avant» comme par magie. Dans la réalité, bien que les récentes annonces apportent de grandes bouffées d’espoir, il faudra sans doute plusieurs mois avant d’y avoir accès. En attendant, les différents acteurs de l’industrie touristique mettent le paquet pour nous convaincre de mettre les voiles malgré tout. Tour d’horizon… et détails à garder en tête.


Des prix jamais vus

Commençons par cet argument de taille. En se baladant sur les sites des principaux voyagistes, on découvre des forfaits ou des billets d’avion à prix dérisoires. Des exemples? Un séjour dans un hôtel cinq étoiles à Punta Cana à partir de 705$ chez Sunwing, dans un quatre étoiles à Puerto Plata à partir de 747$ chez Transat, un aller Montréal-Vancouver avec WesJet à partir de 289$… Alléchant, dites-vous?

Tentant de repartir en sachant qu'un séjour dans un hôtel cinq étoiles à Punta Cana est offert à partir de 705$. Photo: John Prefer, Unsplash

Plus de souplesse

Avant la pandémie, la flexibilité avait un prix. Apporter des modifications à son itinéraire de vol n’était pas toujours possible et, quand ce l’était, il fallait débourser un montant supplémentaire, à moins de s’être procuré au préalable un billet modifiable… à un prix plus élevé.

Devant les désagréments et l’incertitude occasionnés par la COVID-19, les compagnies aériennes ont dû changer certaines modalités. Qui, autrement, oserait prendre le risque d’acheter un billet d’avion? Air France annonce par exemple sur son site que ses billets sont «100% flexibles».

Les crédits de vols offerts à la suite des annulations des derniers mois devaient à l’origine être utilisés à l’intérieur d’une fenêtre de 24 mois. Devant la levée de boucliers, des transporteurs ont décidé d’assouplir cette règle.

En juillet, Transat a par exemple éliminé la date d’expiration et permis le transfert des crédits à une autre personne. «De plus, toute valeur résiduelle est conservée au dossier, précise Marie-Christine Pouliot, conseillère relations publiques et marketing. Ainsi, si les voyageurs n’utilisent pas la totalité de la valeur de leur crédit sur un nouveau voyage, ils peuvent utiliser la portion restante pour acheter d’autres produits de notre catalogue pour agrémenter leur voyage ou même l’utiliser pour un autre voyage. Cette politique souple s’applique aux réservations de vols, de forfaits ou de circuits. Sont toutefois exclus les crédits reçus pour les dossiers croisières, qui sont assujettis aux conditions particulières du croisiériste.»

Les transporteurs aériens offrent notamment plus de flexibilité pour apporter des modifications à l'itinéraire de vol. Photo: Mariya Oliynyk, Unsplash

Des offres adaptées au contexte

À certaines dates de décembre et janvier, Air Canada propose de voler «comme les pros» à bord d'appareil Jetz, équipé de larges fauteuils et d’un espace de 107 cm à 124 cm entre les sièges, ce qui est plus qu’en classe à faire à bord des A319. Ces avions servent généralement à transporter des groupes comme des équipes sportives. Au départ de Montréal, il sera possible de se rendre à Fort Lauderdale.

Des offres pour convaincre les télétravailleurs de transporter leur bureau au soleil ont aussi été lancées par Sunwing et Transat.

Tentante, cette offre de transporter son bureau au soleil... Photo: Depositphotos

Des remboursements

La saga des remboursements aura causé de nombreuses frustrations. Personne n’aurait pu imaginer un scénario comme celui vécu le printemps dernier. Un reportage de RCI nous apprenait en octobre qu’aucune des 10 000 plaintes reçues par l’Office des transports du Canada (OTC) depuis la mi-mars, dont 4300 touchent des remboursements, n’avait encore été traitée parce que l’OTC a reçu un nombre particulièrement volumineux de plaintes depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation canadienne en 2019 (la fameuse charte des voyageurs, vous vous rappelez?). C’est d’ailleurs une zone floue de cette même réglementation censée protéger les voyageurs qui a, rappelons-le, permis aux transporteurs d’offrir un crédit aux Canadiens plutôt qu’un remboursement automatique comme c’est le cas notamment en Europe… La bonne nouvelle, pour ceux qui n’ont toujours pas revu la couleur leur argent, est que le ministre des Transports Marc Garneau a réitéré son intention d’exiger le remboursement des voyageurs comme condition à une aide gouvernementale.

Plusieurs compagnies aériennes ont également ajusté leurs politiques. Depuis le 1er octobre, Air Transat offre, par exemple, la possibilité d’obtenir un remboursement en cas d’annulation en toutes circonstances avec certains tarifs.

N’empêche, au moment où l’on réserve un billet d’avion, il est impossible d’être certain que l’avion quittera bel et bien le tarmac le jour J. La Presse Canadienne a rapporté le 6 novembre dernier que des données sur l’aviation de la firme Cirium montrent qu’Air Canada a supprimé plus de 27 000 vols pour novembre entre le 25 septembre et le 9 octobre et WestJet, environ 12 400 vols en une semaine le mois dernier. Air Transat a pour sa part suspendu tous ses vols en provenance et en direction de l’Ouest canadien jusqu’en février 2021. Bref, oui, les remboursements sont possibles, mais la précarité des départs demeure.

Au moment où l’on réserve un billet d’avion, il est impossible d’être certain que l’avion quittera bel et bien le tarmac le jour J. Photo: Bao Menglong, Unsplash

Des mesures sanitaires accrues

Mieux vaut se faire à l’idée que bien des mesures sanitaires progressivement instaurées depuis mars feront partie de notre vie pour encore plusieurs mois, voire plusieurs années, même quand nous aurons accès à un vaccin. La pandémie a forcé autant les hôtels que les restaurants et les compagnies aériennes à revoir leurs méthodes de nettoyage et la configuration de leurs espaces.

Tous les voyagistes, agences et compagnies aériennes détaillent aujourd’hui sur leur site Web les mesures prises pour rassurer les voyageurs. Club Med y fait part autant des protocoles d’hygiène que de la préparation de son personnel. Air Canada, comme la plupart des compagnies aériennes, met de l’avant la qualité de l’air à bord des appareils. Parions que même une fois vaccinés, nous continuerons de porter attention à ces détails qui nous étaient plutôt abstraits auparavant.

Mieux vaut se faire à l’idée que bien des mesures sanitaires progressivement instaurées depuis mars feront partie de notre vie pour encore plusieurs mois, voire plusieurs années, même quand nous aurons accès à un vaccin. Photo: Andrew Donovan, Unsplash

De meilleures assurances

Peu après que des compagnies d’assurances eurent annoncé l’ajout de la COVID-19 à leur couverture, des voyagistes ont décidé d’inclure des assurances couvrant le coronavirus. Des destinations comme la République dominicaine promettent même de payer les frais encourus en cas de contamination. Le fait de partir en sachant qu’on pourra être traité si l’on contracte le virus est une excellente nouvelle en soi. Par contre, il faut s’attarder aux détails des contrats, garder en tête que le nombre de lits dans les hôpitaux n’est pas illimité et que cette situation inédite pourrait connaître encore bien des rebondissements.

Si vous songez tout de même à partir au cours des prochaines semaines, je vous invite à (re)lire cette chronique, dans laquelle j’ai dressé la liste des pour et des contre. Plus que jamais, il incombe à chacun de s’informer adéquatement. Bien que la décision de partir ou non revienne à chacun, il m’apparaît essentiel de se rappeler les raisons qui motivent les gouvernements à nous demander d’éviter tout voyage non essentiel et à obliger les voyageurs à s’auto-isoler pendant 14 jours au retour (ce qui pourrait changer à la suite du succès des projets pilotes des aéroports de Toronto et Calgary… À suivre!).

Des destinations comme la République dominicaine promettent même de payer les frais encourus en cas de contamination. Photo: Honey Yanibel Minaya Cruz, Unsplash

Même si l’adaptation de l’industrie touristique est remarquable dans les circonstances, personne ne peut promettre qu’un voyage aura lieu ni qu’il se déroulera dans le contexte auquel nous rêvons. Car s’il y a une chose que la pandémie a mise en lumière, c’est bien les limites de l’humain. Et le fait que la paix d’esprit ne peut être garantie, même avec les meilleures assurances du monde.

P.S. Au fil des ans, je vous ai souvent parlé de l’utilité des agents de voyages. Leur travail me semble encore plus important aujourd’hui. Ne vous privez pas de leur expertise, même si vous faites partie des globe-trotters expérimentés!