Qui dit nouvelle année dit aussi nouvelles tendances, tous domaines confondus. Le monde du tourisme n’échappe pas à certaines vagues de fond comme l’augmentation du coût de la vie et le désir d’un nombre grandissant de citoyens de diminuer leur empreinte carbone. Je me suis amusée à décortiquer tant les communiqués faisant état des sondages des grandes entreprises que des rapports de tendance et des reportages publiés aux quatre coins de la planète au cours des dernières semaines. Mes observations.

Le luxe à la carte

En avoir plus pour son argent: voilà sans doute ce qui guidera de nombreux voyageurs cette année. Une étude de Booking.com a révélé qu’avec le contexte inflationniste, «la moitié des voyageurs prévoient choisir des destinations où le coût de la vie est moins cher qu’où ils vivent». En clair: faute d’être riche, on a envie de se sentir plus riche.

Parmi les solutions évoquées pour se gâter malgré tout: s’offrir des cartes journalières pour utiliser les commodités d’un hôtel cinq étoiles même si l’on n’y réside pas. Plus de la moitié des voyageurs (51%) interrogés dans le cadre de l’étude de Booking compte avoir recours à cette astuce. Le même sondage souligne que certains parents envisagent également de voyager avec leurs enfants en dehors des congés scolaires pour éviter de payer plus cher.

Autre élément qui ressort des études: opter pour un surclassement de temps en temps pour profiter de plus d’espace, d’un meilleur service et de meilleurs repas en avion. Trois transporteurs canadiens permettent d’ailleurs de miser pour obtenir de meilleurs sièges à prix plus raisonnables à la dernière minute sur certains vols: Air Transat, Air Canada et WestJet. À lire pour en savoir plus: cet article de L’actualité. Parions que les hôtels qui misent sur le «luxe abordable», comme CitizenM, continueront de connaître un grand succès.

Voyager pour voir des concerts

En 2023, le «tourisme de tournée» a pris un essor considérable. La tarification dynamique ayant rendu l’achat de billets de spectacle parfois ridiculement cher, opter pour une autre ville pour voir son artiste préféré sur scène revient parfois plus abordable, même en tenant compte des coûts du séjour. Selon un sondage réalisé par Expedia, les spectacles deviendront plus que jamais des prétextes pour voir du pays. Plus de 70% des répondants ont affirmé qu’il est probable qu’ils assistent à un concert à l’extérieur de leur ville cette année, et plus de 40%, à se déplacer pour un concert.

Si Beyoncé et Taylor Swift sont le plus souvent mentionnées pour illustrer la tendance, Madonna attire aussi les fans de l’extérieur. À Paris, le Too Hotel, dans le 13^e arrondissement, a par exemple vu l’impact de son passage à Bercy sur les réservations en novembre 2023. «Nous constatons une forte appétence des voyageurs pour la culture lors de leurs escapades, et ce, sous toutes ses formes: des amateurs de concerts, qui voyagent pour aller voir leurs artistes préférés, jusqu’aux gourmets disposant d’un petit budget, en quête de la meilleure expérience gastronomique au meilleur prix», a souligné Naomi Hahn, vice-présidente, Stratégie chez Skyscanner, dans le rapport Tendances Voyage 2024 réalisé à partir des recherches effectuées sur la plateforme dans 52 pays.

Au Canada, Live Nation et Marriott ont quant à eux élaboré un programme permettant aux membres de Marriott Bonvoy d’échanger leurs points contre des forfaits un peu partout sur la planète. J’ai pu avoir un aperçu de la formule lors du concert de P!NK à Montréal en novembre, dont le superbe hôtel Honeyrose était partenaire. Parions qu’on verra de plus en plus de partenariats du genre au cours des prochains mois.

L’astrotourisme

«Plus la société s’enfonce dans un monde virtuel en constante expansion, plus nous ressentons le besoin d’élargir nos horizons dans l’univers réel, observe Condé Nast Traveller. L’astrotourisme, ou bain d’étoiles, est l’acte de voyager dans le but d’observer des phénomènes astronomiques.»

Pour vivre pleinement sa passion du ciel, les 13 Réserves de ciel étoilé au Canada, zones protégées visant à préserver le ciel nocturne et à réduire ou éliminer la pollution lumineuse sous toutes ses formes, sont à considérer. Celle du mont Mégantic s’étend par exemple sur 5 300 km². Le Festival d’astronomie populaire du Mont-Mégantic, qui aura lieu cette année du 6 au 8 juillet, peut être l’occasion d’aller scruter le ciel des Cantons-de-l’Est.

L’éclipse solaire totale du 8 avril devrait aussi ravir de nombreux voyageurs, croit pour sa part The New York Times, qui pointe plusieurs coins d’Amérique du Nord pour en profiter, «des plages de Mazatlan, au Mexique, aux criques escarpées de Maberly, à Terre-Neuve». «Cette année, la Lune sera proche de son point le plus proche de la Terre, ce qui entraînera une bande inhabituellement large», souligne le quotidien de la Grosse Pomme. La région des Cantons-de-l’Est sera l’une des seules du Québec à se retrouver entièrement dans la trajectoire de la totalité de l’éclipse. «Du côté canadien des chutes Niagara, Cosmologists Without Borders proposeront des programmes sur le thème de l’espace, écrit The New York Times. Et si vous êtes prêt à courir avec une lampe frontale, envisagez une course à Millinocket, dans le Maine.»

Les voyages en train

Le retour des trains de nuit en Europe fait sans contredit partie des plus grandes tendances des dernières années (à mon plus grand bonheur!). Nightjet permet notamment de voyager entre l’Autriche et la Belgique, les Pays-Bas, la Suisse et l’Italie une fois la nuit tombée. Depuis décembre 2023, il est également possible de s’endormir grâce au roulis entre Paris et Berlin.

De jour comme de nuit, voyager sur rail est le choix d’un nombre grandissant de voyageurs soucieux de leurs émissions de gaz à effet de serre (GES). The New York Times vient tout juste de s’attarder au phénomène. «Pour les longues distances, les trains sont pleins — et il y a plus de demande que d’offre, a affirmé Alberto Mazzola, directeur exécutif de la compagnie belge Community of European Railway and Infrastructure Companies, au quotidien new-yorkais. Dans l’ensemble de l’Union européenne, le transport ferroviaire de passagers a connu une hausse de 50% entre 2021 et 2023.» Parmi les outils de réservation les plus populaires, Thetrainline.com se démarque. The New York Times a aussi inclus les voyages en train en Nouvelle-Zélande dans 52 Places to Go in 2024.

Bon à savoir: selon Condé Nast Traveller, qui n’hésite pas à affirmer que «le voyage en train devient glamour», les gares sont les nouvelles destinations gourmandes.

Rechercher la fraîcheur

Après les snowbirds, verrons-nous l’apparition de sunbirds? Avec le réchauffement climatique, l’été donne envie à certains d’aller vers le nord, tendance que Condé Nast Traveller appelle le «coolcationning». Selon le réseau d’agences de voyages et de fournisseurs de luxes sur mesure Virtuoso, 82% des clients considéreront des destinations aux températures plus modérées cette année. La Bretagne risque d’avoir la cote aussi en 2024! Les pays nordiques comme l’Islande, l’Écosse et la Finlande promettent aussi une température plus confortable, même en plein cœur de l’été.

Avoir accès à un cours d’eau fait aussi partie des priorités des vacanciers. «Les trois quarts des voyageurs et des voyageuses déclarent que le fait d’être à proximité de l’eau les détend instantanément», souligne Booking.com. Voyager un peu avant ou un peu après la haute saison estivale permet aussi d’éviter les canicules et d’obtenir de meilleurs prix, comme le souligne Condé Nast Traveller.

Ma recommandation, si vous tenez à partir en plein cœur de l’été, mais ne supportez pas la chaleur: prendre de la hauteur! Avec la popularité du vélo de montagne, le tourisme de montagne se développe à la vitesse grand V depuis quelques années au Québec. On peut aussi en profiter même si l’on préfère la marche… ou simplement contempler le paysage. Le Massif fait partie de ceux qui ne cessent de bonifier leur offre d’hébergement.

Les destinations de substitution

Voilà une tendance qui m’agace particulièrement. Les «dupe destinations», ce sont ces endroits qu’on choisit à cause de leur ressemblance avec un autre plus cher ou surfréquenté. Bien que l’idée d’opter pour un lieu moins couru reste excellente, faire de sa ressemblance – souvent bien superficielle – un critère m’apparaît franchement réducteur.

Des exemples de destinations de substitution observés sur les réseaux sociaux au cours des derniers mois? Expédia mentionne Taipei à la place de Séoul, Pattaya à la place de Bangkok et Québec à la place de… Genève. Je ne sais pas pour vous, mais moi, je préfère nettement m’attarder à ce qui distingue un endroit plutôt qu’à ses vagues similitudes avec un autre. Alors, allons à Taipei parce que cette ville extraordinaire a une histoire unique, à Pattaya, parce qu’elle est l’ancienne capitale de la Thaïlande, et à Québec, parce que Québec est Québec, pardi!

L’intelligence artificielle pour préparer un voyage

Complexe, l’intelligence artificielle? Pas pour un nombre grandissant de voyageurs, si l’on se fie à un sondage réalisé par Skyscanner qui rapporte que 44% d’entre eux s’appuient sur l’IA pour la planification et la recherche de voyages. «L’IA commencera à intervenir davantage en temps réel lors de nos voyages en 2024, prédit Condé Nast Traveller. Un exemple pratique est la traduction en direct, que Samsung prévoit lancer sur ses appareils Galaxy 2024. Imaginez appeler à un endroit que vous souhaitez visiter pour obtenir des informations sans vous soucier de savoir si le personnel parle la même langue que vous. Un autre exemple est une plus grande personnalisation de l’IA dans les applications populaires que vous utilisez déjà.»

Fait intéressant, 63% des voyageurs américains utilisent l’IA par l’entremise de leurs téléphones intelligents pour préparer leurs voyages, contre 11% des Français.

Le ciné-tourisme

Parmi mes thématiques de prédilection, le ciné-tourisme a toujours occupé une place de choix. Selon le sondage réalisé par Expedia, grand et petit écran ont une plus grande influence sur les décisions de voyage qu’Instagram, TikTok et les balados. Des chiffres à l’appui: Expedia a observé une augmentation de 300% de la demande pour les voyages à Hawaï et en Sicile après la diffusion des deux premières saisons de la série The White Lotus et de 200% des recherches sur la Ville Lumière après la première de la plus récente saison d’Emily in Paris. Les recherches sur Chicago ont aussi fait un bond de 45% après la première saison de The Bear et celles sur Richmond, à Londres, ont connu une hausse de 160% après la sortie de la deuxième saison de Ted Lasso et doublé lors de la sortie de la troisième.