Photo: Facebook Museum of Broken Relationships
17 septembre 2019Auteure : Marie-Julie Gagnon

Bienvenue au Musée des cœurs brisés!

Située au nord-ouest de la Croatie, Zagreb n’est pas aussi populaire que Dubrovnik, mais compte pourtant de nombreux atouts. La capitale charme par ses rues piétonnières, ses enfilades de terrasses et son architecture austro-hongroise issue du XVIIIe et du XIXe siècle. Parmi les attractions qui piquent la curiosité, le Musée des cœurs brisés remporte sans contredit la palme de l’originalité. Au-delà de l’aspect insolite, pourquoi s’y arrêter? Sans doute un peu par voyeurisme, mais aussi parce qu’il n’y a rien de plus universel que l’amour… et ses déceptions.



L’idée d’un projet sur le thème des ruptures a germé en 2006, quand un véritable couple désuni, les artistes croates Olinka Vištica et Dražen Grubišić, a eu l’idée d’inviter les amoureux en peine à léguer un souvenir lié à la fin d’une histoire. Installé dans le palais baroque de Kulmer, le musée expose des objets hétéroclites, tantôt surprenants, tantôt symboliques.

Les premiers qu’on aperçoit, en entrant, donnent le ton: un nain de jardin de Slovénie, un message inachevé sur un post-it provenant d’Istanbul, un billet pour les Jeux olympiques de Mexico en 1968… Vous l’aurez compris, ce ne sont pas tant les objets en eux-mêmes qui sont intéressants, mais l’histoire qu’ils permettent de raconter.

Ainsi, le nain de jardin est apparu un jour de séparation, à bord d’une nouvelle voiture. Placé devant le portail détruit par le divorcé, il a volé vers le pare-brise du nouveau véhicule, avant d’atterrir au musée deux décennies plus tard. Le message inachevé représente une métaphore pour son auteur, qui garde le souvenir d’une histoire incomplète. Et les billets pour les Jeux olympiques rappellent à l’amoureuse de jadis les balbutiements d’un amour qui a duré 25 années.

Impossible de ne pas sourire en découvrant le Godzilla en plastique arborant des colliers ayant appartenu aux copines d’un fan mexicain de l’icône japonaise. Photo: Marie-Julie Gagnon

Entre les larmes et les éclats de rire

Certains objets illustrent bien qu’entre le romantisme et la réalité, il y a parfois un fossé que les idéalistes n’arrivent pas à traverser. La boussole offerte à Noël par un amoureux transi, clamant vouloir rester sur la même trajectoire que sa dulcinée, a pris une tout autre symbolique quand, quelques mois plus tard, il a réalisé s’être trompé et qu’elle a dû retrouver son chemin en solo.

Par ailleurs, les histoires ne touchent pas que des couples, mais les ruptures en général. Des objets tirent des larmes, comme cette porte d’entrée couverte de messages laissés au défunt fils d’une Croate, ou ce mouchoir tendu à une belle-fille pour sécher ses larmes à la suite de l’annonce d’un diagnostic d’Alzheimer.

À l’opposé, impossible de ne pas sourire en découvrant le Godzilla en plastique arborant des colliers ayant appartenu aux copines d’un fan mexicain de l’icône japonaise. Plus loin, on découvre une lettre d’amour d’un Américain accro aux mélanges pour pizza Chef Boyardee qui a dû «mettre fin à leur relation» pour cause d’intolérance au gluten et à la caséine.

Un Américain accro aux mélanges pour pizza Chef Boyardee a dû «mettre fin à leur relation» pour cause d’intolérance au gluten et à la caséine. Photo: Marie-Julie Gagnon

Encore plus étrange, une prothèse de jambe d’un invalide de guerre croate témoigne de la relation de ce dernier avec une assistante sociale du ministère de la Défense, qui «a duré plus longtemps que leur amour», ou cette «croûte vieille de 27 ans, provenant de la plaie de mon premier amour», qu’une étudiante en biologie autrichienne a prélevé sur son amoureux à la suite d’un accident (auquel il a survécu), au cas où elle doive un jour… le cloner. Trois décennies plus tard, l’amoureuse reconnaît que sa crainte de perdre son chéri a fini par causer leur rupture. La bonne nouvelle: elle n’a plus du tout envie de le cloner. L’histoire ne dit pas, par contre, si elle a continué à collectionner les gales de ses amants.

Cette prothèse de jambe d’un invalide de guerre croate témoigne de la relation de ce dernier avec une assistante sociale du ministère de la Défense, qui «a duré plus longtemps que leur amour». Photo: Marie-Julie Gagnon

Pratico-pratique:

  • Zagreb est facilement accessible pendant l’été et l’automne avec Air Transat, qui propose des vols au départ de Montréal avec transit à Toronto.
  • Coût d’entrée au musée: 40 kn (8$) par adulte.
  • Les explications sont affichées en croate et en anglais, mais il est aussi possible de demander le livret avec les traductions en français.
  • Mieux vaut peut-être éviter d’emmener de jeunes enfants voir l’exposition, à moins d’être prêt à expliquer ce qu’est un godemiché.
  • Un deuxième musée sur la même thématique a ouvert ses portes à Los Angeles.

Merci à Air Transat, grâce à qui ce voyage a été possible.