Photo: Maxime Johnson
15 juin 2016Auteure : Emilie Laperrière

Fogo Island Inn: la modernité ancrée dans la tradition

Au large des côtes de Terre-Neuve, dans un lieu isolé où la nature règne en maître, se cache le Fogo Island Inn. Difficile de croire en observant l’hôtel au design nordique, indéniablement moderne, qu’il fait la part belle aux traditions et aux habitants de l’île qui l’héberge. C’est pourtant le cas.


On n’arrive pas au Fogo Island Inn par hasard. La petite île au nord-est de Terre-Neuve accueille les visiteurs au compte-gouttes, un traversier à la fois. Ce sentiment de bout du monde accentue l’impression que donne l’hôtel au premier regard. L’immeuble immaculé, majestueux, se dresse sur un récif au bord de l’océan Atlantique et tranche avec le paysage environnant et les maisons traditionnelles.

L’art et l’architecture comme leviers économiques

Après avoir fait fortune dans la fibre optique, Zita Cobb est revenue dans l’île qui l’a vue naître avec l’ambition de sauver Fogo et ses traditions. Avec l’aide de deux de ses frères, elle a fondé la fondation Shorefast, qui a revitalisé la petite île d'environ 2500 âmes en s’appuyant sur son savoir-faire.

En plus de l’hôtel, elle a érigé quatre studios d’artistes. Les profits sont entièrement versés à la fondation et bénéficient à la communauté. Des réceptionnistes aux serveurs, l’auberge emploie des habitants de l’île. Chaque invité a aussi droit à une visite privée des environs en compagnie d’un résident. L’histoire de Fogo n’a ensuite plus de secret pour eux.

Studio Squish, Fogo Island. Photo: Maxime Johnson
Studio Squish, Fogo Island. Photo: Maxime Johnson

Todd Saunders, un architecte originaire de Gander qui habite en Norvège depuis vingt ans, est le cerveau derrière le design moderne et épuré des nouveaux bâtiments. «Je pense qu’il était le candidat parfait. On voulait combiner des éléments qui s’opposent, des choses nouvelles et anciennes, d’ici et d’ailleurs. Todd vient de Terre-Neuve et connaît bien l’endroit, mais sa pratique se concentre sur une architecture radicalement contemporaine. Il est lui-même fait de forces opposées», explique Kingsman Brewster, l’architecte en résidence.

Fidèle aux traditions

En franchissant le seuil du Fogo Island Inn, on se sent comme à la maison (si notre maison était luxueuse, évidemment). À la réception, des chaises berçantes font face à la mer et un foyer réchauffe les derniers jours de mai encore frisquets. Les courtepointes sont confectionnées par des mains locales. Tous les meubles de l’auberge — que l’on peut d’ailleurs acheter — sont construits dans l’usine de la Fondation Shorefast. Une façon de plus de créer de l’emploi dans cette communauté du bout du monde.

Une chambre du Fogo Island Inn. Photo: Emilie Laperrière
Une chambre du Fogo Island Inn. Photo: Emilie Laperrière

Les 29 chambres ont une vue imprenable sur la mer, tout comme la salle à manger, qui donne l’impression d’être sur un navire. Les fenêtres du sol au plafond permettent aussi d’observer les icebergs. Le blanc est à l’honneur, mais le tout est joyeux grâce au papier peint, aux coussins colorés et à la courtepointe qui trône sur le lit. On y retrouve également une bibliothèque, un cinéma, une galerie d’art et un sauna sur le toit.

La bibliothèque du Fogo Island Inn. Photo: Maxime Johnson
La bibliothèque du Fogo Island Inn. Photo: Maxime Johnson

L’établissement hôtelier a été encensé par la presse depuis son ouverture en 2013, du Monocle au Wall Street Journal. Les médias d’ici, comme La Presse, lui ont aussi consacré des articles. Sans compter que c’est l’auberge qu’a choisie Justin Trudeau pour célébrer Pâques en famille cette année.

Des matériaux locaux et responsables

Aucun détail n’a été négligé dans la construction du Fogo Island Inn. L’auberge en X de 43 000 pieds carrés sur quatre étages est perchée en partie sur des pilotis rappelant les maisons de pêche de l’île. L’édifice est recouvert de bois d’épinette. Que du bois aussi à l’intérieur, peint en blanc, qui donne à l’ensemble un aspect chaleureux.

«Tout le bois vient de Terre-Neuve. On a essayé de s’approvisionner le plus près possible. Quand ça ne se trouvait pas dans la province, on élargissait nos recherches au Canada, en Amérique du Nord, puis dans les pays qui traitent habituellement avec Terre-Neuve. Les matériaux devaient absolument venir de pays où les employés et l’environnement sont respectés», souligne l’architecte.

Salle à manger du Fogo Island Inn. Photo: Maxime Johnson
Salle à manger du Fogo Island Inn. Photo: Maxime Johnson

Rien ne vient de la Chine ou du Bangladesh ici. Une politique admirable qui vient toutefois avec son lot de défis, petits et grands. L’équipe a dû se casser la tête pour dénicher des trucs aussi simples que des ampoules ou des clous.

Les studios ont un peu servi de test pour l’hôtel. «C’était une bonne façon d’éprouver nos façons de faire. On a appris quels matériaux résistaient bien aux éléments de Fogo, en plus de bâtir une équipe de constructeurs, de designers et d’artisans», soutient Kingsman Brewster.

Dans cet endroit où le vent, la pluie et le froid règnent bien souvent, l’auberge qui semble venir d’ailleurs a résolument fait sa place.

Les frais d’hébergement de ce voyage ont été payés par le Fogo Island Inn. Les opinions exprimées sont celles de notre journaliste.


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