Photo: Sentier des cimes Laurentides

S’élever pour marcher dans les couleurs de l’automne

La flambée des couleurs a largement débuté dans la province. Pour découvrir la canopée de la forêt québécoise dans sa plus belle palette de coloris, rien de tel que de prendre de la hauteur. Rendez-vous à la cime des arbres dans les Laurentides et sur les hautes roches du parc national des Monts-Valin, au Saguenay–Lac-Saint-Jean!



À défaut de voler ou d’avoir un drone, il n’est pas toujours facile de voir la canopée quand elle s’embrase en automne. Il faut grimper sur un sommet effilé des Adirondacks ou des Laurentides pour «dominer», le temps d’une photo, les couleurs des arbres poussant dans les vallées; s’agripper à une via ferrata comme celles des Palissades dans Charlevoix ou du parc de la Chute-Montmorency dans la région de Québec; faire du deltaplane au Mont-Sainte-Anne ou au mont Saint-Pierre en Gaspésie... Une autre solution est de marcher au-dessus des arbres. J’ai récemment expérimenté la chose sur deux longues passerelles de bois dans les Laurentides et au SaguenayLac-Saint-Jean. 

Sur le Sentier des cimes

La forêt laurentienne est une pure merveille en automne et l’ouverture cet été du Sentier des cimes Laurentides, à Saint-FaustinLac-Carré, nous donne une très belle occasion d’en profiter à moindre effort.

Je connaissais bien le site de l’ancienne pisciculture de Saint-Faustin, avec ses bâtiments patrimoniaux en pierre. J’avais plusieurs fois marché dans la forêt voisine, participé à des ateliers de Gourmet sauvage sur la cueillette de champignons et plantes comestibles ou fait du vélo sur le P’tit Train du Nord, dont le circuit se trouve à proximité.

L'Ancienne pisciculture des Laurentides. Photo: Facebook Sentier des cimes Laurentides

Les nouveaux aménagements réalisés sur ce site par l’entreprise allemande EAK Sentiers des cimes en partenariat avec la MRC des Laurentides (qui en demeure propriétaire) auraient pu me déplaire étant donné mon amour de la nature la plus sauvage possible, mais il n’en fut rien. Même la faible longueur de ce sentier sur passerelle de bois (2,6 kilomètres aller-retour) n’a pas entamé mon plaisir!

Premier du genre en Amérique du Nord, ce Sentier des cimes est un «modèle» éprouvé puisque l’entreprise allemande en a déjà 12 en Europe. Le nouvel aménagement, construit après cinq ans de gestation, se compose d’une longue passerelle de bois (560 mètres). Elle commence à l’étage du bâtiment patrimonial principal et mène, tout près, à une première tour d’observation (à 25 mètres) dans laquelle on peut monter à pied via des escaliers, puis à une seconde beaucoup plus imposante, à l’autre bout de la longue passerelle.

Montée sur des piliers de bois avec renforts en acier, la passerelle est entièrement réalisée en sapin Douglas de l’Ouest canadien non traité et a été préparée par sections dans une entreprise de Saint-Jean-Port-Joli. Le résultat est spectaculaire.

La passerelle de bois. Photo: Sentier des cimes Laurentides

Perché à 25 mètres du sol, le «sentier» surplombe une magnifique forêt mixte, de résineux et de feuillus, et est agrémenté de nombreux panneaux d’interprétation, tous plus intéressants les uns que les autres. On progresse sur cette passerelle avec lenteur, en prenant le temps de lire les panneaux et d’admirer le «paysage» à hauteur d’yeux ou en dessous: cimes des arbres, sous-bois, arbustes, qui sont du plus bel effet en cette saison.

L’imposante tour d’observation se profile aussi à l’horizon. Ce presque cylindre de bois et d’acier (plutôt nonagone) qu’on voit grossir en avançant dévoile son design épuré et élégant, qui laisse passer la lumière du ciel de toutes parts. L’un de ses éléments les plus remarquables est qu’il n’y a ni ascenseur ni escalier pour atteindre son sommet, 40 mètres plus haut, soit l’équivalent de 12 étages.

L'imposante tour d'observation. Photo: Sentier des cimes Laurentides

Au départ, la passerelle vire en fait à droite, amorçant une montée très légère (de 6%) qui demeurera constante jusqu’en haut. Elle grimpe ainsi très gentiment en faisant onze fois le tour de ce drôle d’édifice, pour un total de 720 mètres. Même sans avoir grand effort à fournir, chacun prend son temps, car il y a beaucoup à voir: d’abord la forêt environnante, si colorée, au-dessus de laquelle on s’élève tout en changeant constamment de perspective; puis la structure de la tour elle-même, qui surprend: vide à l’intérieur, permettant de voir la nature de l’autre côté; enfin, vu du dessous, le grand «toit» circulaire en filet, sorte de trampoline aérien, où petits et grands semblent se délier les jambes et le cœur!

Quand on atteint enfin le sommet, à force de petits pas, on est époustouflé! Apparaissent les douces ondulations typiques de la vieille chaîne de montagnes des Laurentides, le mont Tremblant, la montagne d’Argent, le mont Blanc, mais aussi la montagne Noire, le mont Kaikoop et leurs différents peuplements forestiers qui colorent à merveille le tableau. Plus près, on aperçoit aussi le lac et l’ancien barrage de la pisciculture.

Le clou de la visite est le filet géant, bien tendu au centre de la tour. On peut s’asseoir au bord, s’y coucher tête en bas ou tourné vers le ciel ou encore jouer les acrobates pour se délier un peu plus les jambes… à condition de ne pas avoir le vertige! Le retour apporte son lot de surprises, en descente circulaire vers la passerelle, puis sur celle-ci, avec de nouvelles perspectives sur le paysage.

Le clou de la visite est le filet géant, bien tendu au centre de la tour. Photo: Anne Pélouas

«Esthétique, solidité, sécurité, accessibilité» furent les maîtres mots de la construction de ce site original qui prévoit accueillir 300 à 400 000 personnes par an, sur quatre saisons. Tout est fait, il est vrai, pour l’accessibilité des lieux aux personnes à mobilité réduite, y compris celles en fauteuil roulant, aux parents avec enfants en poussette, aux personnes âgées, grâce à la pente légère de la passerelle, après utilisation de l’ascenseur de départ (dans la première tour).

L’idée initiale, en 2017, était de donner un nouveau souffle à ce site historique des Laurentides. De fait, le bâtiment principal est plus vivant que jamais avec café-resto au rez-de-chaussée, service d’accueil et boutique à l’étage. Les jardins et bassins d’eau de la pisciculture ont également connu une belle cure de rajeunissement et la terrasse est très courue. Gourmet sauvage y a conservé sa place, avec une magnifique boutique moderne à deux pas de la piste cyclable. C’est sans compter la forêt et ses sentiers ombragés qui n’ont pas changé de vocation pour la promenade à ras du sol. 

Bon à savoir

  • Carte famille et carte annuelle disponibles
  • Entrée gratuite pour accompagnateur de personnes à mobilité réduite

Au sommet du Pic-de-la-Tête-de-Chien

Le parc national des Monts-Valin, dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean, est réputé pour ses sentiers pédestres, mais pour moi, c’était jusqu’à présent l’un de mes préférés pour le ski de fond et la raquette en hiver. Cet été, j’ai changé d’avis, en allant découvrir le sentier du Pic-de-la-Tête-de-Chien, dont la partie sommitale était fermée depuis longtemps. Elle venait tout juste d’être rendue de nouveau accessible grâce à un investissement d’importance en escaliers et passerelles de bois et je n’ai pas été déçue du résultat.

Le sommet du sentier du Pic-de-la-Tête-de-Chien est de nouveau accessible depuis cet été, après avoir été fermé longtemps. Photo: Anne Pélouas

Le sentier vedette du parc (8,5 kilomètres aller-retour) est classé difficile bien qu’on puisse le parcourir en moins de trois heures. Il s’amorce en forêt, près du centre de découverte et de services, dans un festival de couleurs digne des vallées québécoises. Sur le plat jusqu’au lac des Pères, il est agrémenté de modules éducatifs pour découvrir la faune et la flore du parc.

L’ascension commence ensuite progressivement avec un premier beau point de vue sur le lac. On s’élève ainsi sur un sentier étroit et garni de roches à flanc de montagne, avec quelques autres éclaircies panoramiques, mais le meilleur est à venir.

Photo: Parc national des Monts-Valin

Une volée de marches en bois mène à une grande dalle rocheuse d’où la grande vue se dévoile sur une succession de sommets et la vallée de la rivière Valin en contrebas. Entre les deux, la canopée est toute colorée en automne, du vert au rouge selon les étages et peuplements forestiers. On mesure en l’observant de haut le chemin parcouru à pied avant de reprendre la marche sur un splendide trottoir de bois qui monte et descend, avec quelques marches, en suivant le relief du sommet, aux alentours de 575 mètres d’altitude. Ce choix de construction en bois permet de protéger la nature environnante dans un secteur fragile et d’empêcher tout un chacun de marcher hors sentier sans se rendre compte des dégâts qu’il peut causer.

Photo: Parc national des Monts-Valin

L’apothéose vient au belvédère où, par temps clair, on peut voir jusqu’au fjord du Saguenay. Tables de pique-nique et abri (pour se protéger de la pluie ou du soleil) ont été installés sur place. L’heure de la pause et de la contemplation est arrivée!

On peut ensuite poursuivre en montée en direction du pic du Grand-Corbeau et du pic de la Hutte ou redescendre par le même sentier en profitant de nouveau d’un panorama plongeant sur la belle forêt, avant de s’y enfoncer en descente quasi constante. Le sentier est parfois glissant et l’usage des bâtons de marche est hautement recommandé.