L’Alberta au-delà de Banff
Au cours de l’été, j’ai eu l’occasion d’explorer des coins de l’Alberta où je n’avais encore jamais mis les pieds. Même si Banff, Jasper et les Badlands occuperont toujours une place à part dans mon cœur, jamais je n’aurais cru m’éclater autant en jouant les cowgirls dans les Rocheuses, à explorer les sentiers du parc national du Canada des Lacs-Waterton, au sud de la province, et à traquer les bisons du parc national Elk Island!
Le jour où Jonas Guinn, du ranch Boundary, m’a persuadée de monter à cheval, je me suis dit que la fin du monde était proche. Moi, à califourchon sur un animal plus grand qu’un poney? J’avais en tête de mauvais souvenirs de bêtes capricieuses, surmenées et encore plus paranos que moi. Alors quand, après avoir contemplé les Rocheuses du haut de ma monture, Dixie la jument a rué et freiné sec, j’ai pensé que ça y était: soit elle allait s’emballer et j’irais me fracasser contre le tronc d’un arbre, soit j’allais me faire attaquer par un grizzly, façon Leonardo DiCaprio dans The Revenant. D’autant plus que Jonas venait de glisser, tout bonnement, qu’il y avait bel et bien des ours bruns dans les parages… «Mais c’est plus sécuritaire à cheval», avait-il ajouté pour me rassurer. Glup.
Si j’écris ces lignes aujourd’hui, c’est que j’ai survécu. Et qu’aucun animal sauvage n’a confondu mes bras avec des amuse-gueules, me permettant ainsi de vous raconter cette tranche de vie en utilisant tous mes doigts. Malgré mes 32 432 phobies, cette balade reste parmi mes souvenirs les plus marquants de l’été 2019. Pendant la chevauchée, j’avais l’impression de me balader dans les décors de Brokeback Mountain. D’ailleurs, il paraît que des scènes du film mettant en vedette Jake Gyllenhaal et Heath Ledger ont été tournées dans les parages.
Moins courue que Banff, la vallée de Kananaskis n’en est pas moins spectaculaire. Au ranch de la famille Guinn, les possibilités d’excursions sont nombreuses, qu’on soit un cavalier débutant ou aguerri. Il est même possible de prendre part à des aventures de quelques jours à cheval. «Même toi, tu pourrais!» a affirmé Jonas au retour de notre promenade, semblant oublier les petits cris stridents que j’ai poussés à quelques reprises quand mes scénarios catastrophes menaçaient de se transposer dans la réalité. Ceux qui ne se sentent pas à l’aise à cheval peuvent monter à bord d’une carriole le temps d’une balade d’environ une heure. L’hiver, il est aussi possible de faire du traîneau à chiens.
Des parcs méconnus
Chaque coin de l’Alberta que je découvre me donne l’impression d’avoir été créé pour se retrouver sur une carte postale. Au sud de la province, à environ trois heures de Calgary, le parc national du Canada des Lacs-Waterton me fait réaliser à quel point je méconnais la région, malgré mes nombreux séjours. Une croisière sur le lac Waterton, dont l’eau atteint une température d’à peine une douzaine de degrés même en plein été, me permet de franchir la frontière américaine sans même devoir dégainer mon passeport. Du côté des États-Unis, nous voguons dans le Glacier National Park, au Montana. Les deux combinés portent aussi le nom de parc international de la paix Waterton-Glacier, en l’honneur de leur bon voisinage. Particulièrement photogénique, l’hôtel iconique Prince of Wales sert de repère.
Le lac, dont la teinte vert émeraude est attribuable aux glaciers et à la poussière de roche présente dans l’eau, est encore plus beau quand on le contemple depuis les sentiers du parc. Même si certains segments des 200 km de pistes sont toujours fermés aux visiteurs à la suite de l’important feu de forêt de 2017, les points de vue sont époustouflants. Les troncs noircis contrastent avec les plantes et les feuilles bien vertes, qui démontrent à quel point la nature reprend rapidement ses droits.
À environ 35 minutes d’Edmonton, le parc national Elk Island, fondé en 1906 afin de préserver les wapitis, présente un tout autre visage de la province. Loin des montagnes, j’aperçois les descendants des bisons achetés par le gouvernement canadien au Montana, alors que leur nombre avait décliné de manière dramatique. Ironiquement, il est plus facile aujourd’hui de repérer l’un des 800 spécimens qui se baladent dans le parc qu’un des wapitis – environ 500 vivent dans le parc –, beaucoup plus discrets.
Pendant les soirées d’hiver, ce sont les étoiles et les aurores boréales que les visiteurs viennent traquer, raquettes aux pieds. Désigné «réserve de ciel étoilé» par la Société royale d’astronomie du Canada, le secteur est exempt de toute pollution lumineuse.
Je n’ai croisé ni grizzlys, ni réels signes de la fin du monde pendant mon séjour en Alberta, mais j’ai aperçu une soucoupe volante et un buste de Spock dans la ville de Vulcan en retournant vers Calgary. Baptisée ainsi en l’honneur du dieu Vulcain de la mythologie gréco-romaine, la ville attire toujours les fans de Star Trek, qui y tiennent un colloque pendant l’été.
Sur la façade du bureau de poste, le célèbre personnage aux oreilles pointues accueille même les gens en faisant son célèbre salut. Qui a dit qu’il n’y avait que des cowboys en Alberta?
Merci à Parcs Canada pour son coup de pouce pour l’organisation de ces voyages.