La chronique Société et Culture avec Claudia Larochelle

Auteur(e)

Claudia Larochelle

Claudia Larochelle est auteure (Les bonnes filles plantent des fleurs au printemps, Les îles Canaries, Je veux une maison faite de sorties de secours - Réflexions sur la vie et l'oeuvre de Nelly Arcan, la série jeunesse à succès La doudou, etc.) et journaliste spécialisée en culture et société. Elle a animé pendant plus de six saisons l'émission LIRE. Elle est chroniqueuse sur ICI Radio-Canada radio et télé et signe régulièrement des textes dans Les Libraires et Elle Québec. Elle est titulaire d'un baccalauréat en journalisme et d'une maîtrise en création littéraire. On peut la suivre sur Facebook et Twitter @clolarochelle.

Littérature

Un 12 août sur terre, on achète des livres québécois!

Combien de livres québécois avez-vous acheté depuis le début de l'année? OK, tralalalalère, mettons que je n'ai rien entendu... C'est le temps de se reprendre en grand lors de l'événement intitulé «Le 12 août, j'achète un livre québécois».


Instauré l'année dernière par Patrice Cazeault et Amélie Dubé, passionnés de littérature certes, mais aussi auteurs jeunesse d'ici, le mouvement avait eu tant de succès sur les réseaux sociaux qu'il revient pour une deuxième édition.

L'idée est simple: vous vous rendez chez votre libraire préféré (ou en ligne, même si c’est tellement moins excitant, tellement moins romantique) et vous achetez un ou plusieurs livres écrits par un écrivain québécois. Vous prenez un selfie avec votre acquisition, ou le bon de commande en main, et vous diffusez l'image sur Internet. Ça changera ces jours-ci des photos de bedaines à la plage ou des chics épluchettes de blé d'Inde au soleil couchant...

Aussi, les motivés organisateurs invitent les gens à se rendre sur la page Facebook créée pour l'occasion – et qui compte déjà plus de 9 000 participants – afin de partager des suggestions, question de se mettre en appétit. Parlant de faim, ce n'est pas pour tourner le couteau dans la plaie du grand débat sur les livres de recettes qui se vendent plus que les autres genres, mais faut-il le rappeler: il n'y a pas que ça...  OK. J'ai fini.

Pour ma part, c'est en me rendant directement chez mes libraires préférés que je trouve l'inspiration (tout en me ruinant financièrement). Je les adore. Il y a celle qui connaît mon penchant pour les écrivaines au destin tragique à la Sylvie Plath ou Virginia Woolf et qui m'entraîne toujours à l'écart, complice d'on-ne-sait-quel-vice, pour me glisser un bouquin pas joyeux entre les mains, il y a cet autre, l'air moqueur, sait assouvir mon plaisir coupable pour les faits divers en me recommandant des titres liés à des affaires criminelles glauques et scabreuses, sans parler de l'incontournable Marie-Charlotte, la pétillante rousse, aussi bonne pour dénicher les meilleurs livres jeunesse que pour calmer l'ardeur des petits tannants semant le bordel dans ses rayons. Comment fait-elle pour garder son beau sourire?

À leur manière, les libraires sont des nounous, des psys, des pushers, des profs, des médecins qui prescrivent des titres apaisants (sans le salaire qui va avec), bref, profitez de leurs connaissances, ils en savent beaucoup, et quand ils ne savent pas, ils vous dirigent vers leurs collègues.

Le 12 août, on s'ouvre l'esprit

Quant aux livres d'ici, oui, il y a les romans des écrivains plus connus: d'Anne Hébert à Michel Tremblay, en passant par Dany Laferrière ou Marie Laberge, or, n'oubliez pas d'aller fouiner du côté des moins grandes vedettes, les émergents ou les plus obscurs qui ne font pas nécessairement parler d'eux dans ce qui reste d'espace consacré aux livres dans les journaux.

Chez les nouveaux, en fiction, notons Mikella Nicol (Les filles bleues de l'été), Clara B. Turcotte (Demoiselles-cactus), les filles de deux autres écrivains de talent et dont on ne parle pas assez, selon moi : Patrick Nicol (La nageuse au  milieu du lac) et Élise Turcotte, fort attendue à l'automne avec Le Parfum de la tubéreuse.

Gros coup de coeur aussi pour ce que fait Daniel Grenier (Malgré tout on rit à Saint-Henri), moins nouveau, mais dont j'attends impatiemment le roman L'année la plus longue, prévu lui aussi à la rentrée. Sans oublier l'expérimentée Abla Farhoud (Toutes celles que j'étais), l'exaltant Alain Farah dont j'ai dévoré le Pourquoi Bologne, que je relirais, et le surprenant Alexandre Soublière qui avait fait réagir avec sa voix unique, déjà en commençant, avec Charlotte before Christ.

Puis, il y a aussi ceux qui donnent dans la BD, la nouvelle ou la poésie. Oui, la poésie. C'est fabuleux, la poésie, ça émeut, ça ébranle, ça choque et ça garde vivant.

Cet été, j'ai relu les vers de «chez la psy», poème de la jeune Chloé Savoie-Bernard dans son récent recueil Royaume scotch tape. Je ne me lasse pas de la lire. Voici un aperçu:

«ainsi on pourrait dire que votre
manière d'en rire
de dire ce n'est pas grave
ça va aller
vous sauve littéralement
la vie
mademoiselle»

C'est beau, hein?