La chronique Société et Culture avec Claudia Larochelle

Auteur(e)

Claudia Larochelle

Claudia Larochelle est auteure (Les bonnes filles plantent des fleurs au printemps, Les îles Canaries, Je veux une maison faite de sorties de secours - Réflexions sur la vie et l'oeuvre de Nelly Arcan, la série jeunesse à succès La doudou, etc.) et journaliste spécialisée en culture et société. Elle a animé pendant plus de six saisons l'émission LIRE. Elle est chroniqueuse sur ICI Radio-Canada radio et télé et signe régulièrement des textes dans Les Libraires et Elle Québec. Elle est titulaire d'un baccalauréat en journalisme et d'une maîtrise en création littéraire. On peut la suivre sur Facebook et Twitter @clolarochelle.

La mort, cette très bonne vendeuse

«Lorsque mon père est décédé, j’ai placé quatre objets dans son cercueil. Je n’en ai parlé à personne. Puis j’ai interrogé des personnes qui disent communiquer avec les morts. Découvriront-ils de quels objets il s’agit? C’est le test.»

C’est ainsi que débute Le test – une expérience inouïe: la preuve de l’après-vie?, le fameux livre pour lequel j’ai dû faire quelques appels en librairies en début de semaine avant d’en trouver un de disponible. Le plus récent ouvrage du journaliste et reporter de guerre français Stéphane Allix semble très populaire par les temps qui courent. J’avoue ne pas souvent m’attarder dans les sections «ésotérisme et spiritualité», mais ce coup-ci, le «buzz» autour de ce titre est si fort, ici au Québec, mais surtout en France où, m’a-t-on dit, on se l’arrache, que j’ai succombé.

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Normal, la mort fascine, peut-être même plus de nos jours alors que religion, croyances, foi et rituels sont mis à mal. Ainsi, quand un journaliste qui a couvert des conflits internationaux, et qui, considéré comme sérieux, révèle chez Albin Michel, un éditeur qui l’est tout autant, des résultats stupéfiants en accord avec des recherches scientifiques menées sur le sujet de «la vie après la mort qui serait d’ailleurs devenue une hypothèse rationnelle.» — lit-on sur la quatrième de couverture de la petite bombe de papier —, on a de quoi être titillé. Celui qui a commencé à s’intéresser à la possible communication avec nos défunts à la mort accidentelle de son frère de 30 ans, en 2001, et qui a voulu enquêter ensuite sur la possible vie après la mort, avec la complicité de son père décédé en 2013, m’a donc épaté parce qu’il est clair que l’homme a gardé un sens de l’objectivité en restant lucide et alerte aux propos des médiums. Au plan méthodologique, il avoue avoir été dur et exigeant avec les consultants, et le lecteur le constate d’emblée.

Comment fonctionne ce don de médiumnité? Les capacités des médiums sont-elles réelles? Comment se passent ces consultations? Qui sont les charlatans? Ont-ils réussi le fameux «test» initié par l’auteur? Je ne suis pas restée sur ma faim, prête pourtant à y trouver des non-sens et absurdités. Journaliste moi-même, devenue aussi un peu cynique sur les bords, c’est bien sûr que je me suis tout de suite méfiée d’un tel livre susceptible de tenir des propos facilement aguicheurs, racoleurs, destinés peut-être à faire vendre rapidement à un prix plutôt fort de trente quelques dollars l’exemplaire…

Nos médiums, entre réels pouvoirs et charlatanisme



Et puis, on a tous entendu des histoires de médiums. Par curiosité, je suis moi-même allée en consulter trois au cours des dernières années: l’impressionnante Marjolaine Caron, de Magog, qui ne m’a pas déçue, une dame de Sherbrooke dont j’ai oublié le nom et qui n’avait pas de messages à me transmettre, déclarant au passage que j’avais moi-même des capacités médiumniques (j’en étais sortie troublée, me disant par ailleurs que mes défunts m’avaient oubliée, voire ignorée…) et une autre, la dernière, une dame vulgaire et irrévérencieuse invitée chez ma sœur pour une séance de groupe qui, dans mon livre à moi, devrait être arrêtée pour manipulation et charlatanisme. Le pire, c’est qu’elle pratique encore, profitant de la fragilité des endeuillés pour leur raconter des salades. En lisant les conclusions de l’enquête de Stéphane Allix, je n’étais donc pas dans le brouillard, je pouvais comprendre de quoi il en retournait, être plus éclairée, prête, il me semble, à détecter des failles entre les lignes de son ouvrage.

Je vous rassure donc, je suis restée sur mes gardes tout au long de ces 278 pages denses — que je juge au final bien écrites, claires et limpides — dans lesquelles le journaliste confirme par des enquêtes approfondies et sérieuses menées auprès de six médiums réputés pour la «qualité de leur don» qu’il y aurait non seulement quelque chose après la mort, mais qu’il serait aussi possible de communiquer avec ceux que nous aimons au-delà de la mort.

N’empêche, je n’étais pas dans les bureaux de consultation avec l’auteur et journaliste, je ne peux pas être certaine à 100% de la véracité de ce qu’il avance dans ce livre en tête des palmarès des meilleures ventes. Si les résultats de son «test» sont bel et bien réels, ma foi, je suis sans voix, un peu moins craintive face à ma propre fin et celle de ceux que j’aime. Loin de moi l’idée de mener chez nous, après la chasse aux pitbulls, la chasse au charlatanisme chez nos médiums, mais je pense tout de même qu’un tel ouvrage devrait aussi pouvoir nous aider à faire la différence entre ceux qui ont de réels dons et ceux qui veulent juste nous faire les poches. Ne serait-ce que pour ça, les livres comme celui-là valent la peine d’être lus.

* Stéphane Allix sera à Montréal pour donner une conférence le 28 septembre à l’hôtel Gouverneur du 1415 rue St-Hubert. Réservations auprès de Suneva: info@suneva.ca - 438 494-3857.

JE CRAQUE POUR…

Des fraises en janvier, la fameuse pièce à succès d’Évelyne de La Chenelière créée en 1999 et qui sera interprétée pour la première fois cet été en théâtre musical avec Stéphane Archambault dans le rôle de Robert, Isabelle Blais dans le rôle de Léa, Jean-Philippe Perras dans le rôle de François et Laurence Dauphinais dans le rôle de Sophie. Le texte primé plusieurs fois, traduit en plusieurs langues et joué dans différents coins du monde, sera mis en scène par Frédéric Bélanger, du Théâtre Advienne que pourra, et la musique sera conçue par Ludovic Bonnier ainsi que par Audrey Thériault. Toujours d’actualité, ce texte majeur de notre dramaturgie québécoise sera présenté du 5 au 27 août au Centre culturel de Joliette dans Lanaudière.