La chronique Culture avec Claude Deschênes

Auteur(e)
Photo: Martine Doucet

Claude Deschênes

Claude Deschênes collabore à Avenues.ca depuis 2016. Journaliste depuis 1976, il a fait la majeure partie de sa carrière (1980-2013) à l’emploi de la Société Radio-Canada, où il a couvert la scène culturelle pour le Téléjournal et le Réseau de l’information (RDI). De 2014 à 2020, il a été le correspondant de l’émission Télématin de la chaîne de télévision publique française France 2.On lui doit également le livre Tous pour un Quartier des spectacles publié en 2018 aux Éditions La Presse.

Réversible des 7 doigts: beau en dedans et en dehors

Depuis que je suis entré par la porte de leur frigo en 2002, c’était dans Loft, le premier spectacle des 7 doigts de la main, j’ai une affection particulière pour cette compagnie de cirque montréalaise.



Loft, Psy, Traces, Séquences 8 et maintenant Réversible en première mondiale à la Tohu, il y a de la personnalité dans les spectacles de création des 7 doigts! J’aime cette manière de faire du cirque en partant de ce qui se trouve à l’intérieur des acrobates.

Gypsy Snider, cofondatrice de la compagnie et metteure en scène de Réversible, n’est pas psychanalyste, mais peu s’en faut. Pour nourrir le processus de création, elle a amené sa troupe sur le terrain de l’introspection. Elle a convié chacun de ses huit artistes à remonter dans leur généalogie et à définir leur personnage de scène en fonction de leurs origines.

Le spectacle s’ouvre donc sur quelques bribes de leurs découvertes. Au micro, chacun évoque une caractéristique d’un aïeul plus ou moins lointain qu’il ne connaissait pas. Ce faisant, le spectateur sait mieux à qui il a affaire. Il n’a plus devant lui un acrobate anonyme.

Photo: Alexandre Galliez
Photo: Alexandre Galliez

Un ballet réglé au quart de tour

Commence alors l’enchaînement des numéros. Dans Réversible, la danse sert de liant entre les performances acrobatiques. C’est un ballet réglé au quart de tour dans lequel les éléments du décor (portes, fenêtres, soupiraux, murs) participent aux chassés-croisés des personnages. La scénographie et les accessoires imaginés par Ana Cappelluto sont une des grandes réussites de ce spectacle. Ils apportent beaucoup de rythme et de mouvement.

Du côté des numéros, encore une fois Les 7 doigts amènent de la nouveauté dans des disciplines qu’on a souvent vues, comme les mâts chinois ou la planche coréenne.

Dans le premier cas, on verra Julien Siliau se tenir en croisant les jambes sur le mât et porter à bout de bras sa partenaire Émilie Siliau qui fait toutes sortes de figures en équilibre. Grâce et force en hauteur.

Photo: Alexandre Galliez
Photo: Alexandre Galliez

Pour ce qui est de la planche coréenne, Jérémi Lévesque et Vincent Jutras l’utilisent pour faire des cabrioles spectaculaires, mais aussi pour se propulser sur un des murs du décor comme on le fait en trampo-mur. De véritables cascadeurs qui nous mettent sur le qui-vive.

À souligner aussi, le numéro de jonglerie de Natasha Patterson. Elle manipule des ballons rouges et ça se complexifie lorsqu’elle doit composer avec les murs qui bougent autour d’elle. Même chose lorsque Julien Siliau voit sa roue allemande encerclée par ces mêmes murs mobiles qui deviennent pratiquement des personnages.

Photo: Alexandre Galliez
Photo: Alexandre Galliez

Corde lisse, diabolo, équilibre sur cannes, cerceaux complètent ce programme aux accents poétiques. À part l’apparition d’une mariée empêtrée dans sa robe, et qui suscite l’hilarité, ce spectacle est plutôt sérieux. À considérer si l’on compte s’y rendre en famille. Cependant, la belle finale avec les ancêtres qui dansent dans un environnement qui évoque à la fois le ciel et les nuages pourrait être un bon prétexte pour parler de vos grands-parents ou de vos arrières grands-parents à vos enfants. Réversible nous révèle qu’il y a beaucoup à apprendre à connaître nos origines.

Finalement, comme toujours chez Les 7 doigts, on est ravi par la trame sonore. Il y a entre autres une magnifique chanson en français d’Ines Talbi qu’on a juste le goût de réentendre en sortant de la Tohu. Eh bien, bonne nouvelle, la musique du spectacle est disponible sur BandCamp.

Réversible est à l’affiche jusqu’au 30 décembre.

Photo: Alexandre Galliez
Photo: Alexandre Galliez

Mon coup de cœur

Paloma de Daniel Bélanger

Le dernier disque de Daniel Bélanger, Chic de ville, sur fond de rockabilly, m’avait laissé complètement froid. Quel ne fut pas mon bonheur d’apprendre que l’auteur-compositeur-interprète le plus discret du showbizz québécois avait préparé dans le secret un nouvel album! Paloma est un pop up album en ce sens qu’il nous arrive sans crier gare. Comme un cadeau. Daniel Bélanger l’a pratiquement fait tout seul. Il joue les guitares, les claviers, la batterie, le banjo, l’udu, l’harmonium. Il s’est même fabriqué un chœur d’hommes sur Il y a tant à faire, le premier extrait du disque. C’est formidable de faire entrer dans nos vies des chansons dont on sait qu’elles nous accompagneront pour le reste de notre existence quoi qu’en disent les titres de ces nouveaux airs à fredonner: Tout viendra s’effacer, Perdre, Le fil, Un deux trois je l’aurai oublié.alt="paloma-daniel-belanger"