La chronique Culture avec Claude Deschênes

Auteur(e)
Photo: Martine Doucet

Claude Deschênes

Claude Deschênes collabore à Avenues.ca depuis 2016. Journaliste depuis 1976, il a fait la majeure partie de sa carrière (1980-2013) à l’emploi de la Société Radio-Canada, où il a couvert la scène culturelle pour le Téléjournal et le Réseau de l’information (RDI). De 2014 à 2020, il a été le correspondant de l’émission Télématin de la chaîne de télévision publique française France 2.On lui doit également le livre Tous pour un Quartier des spectacles publié en 2018 aux Éditions La Presse.

Ma rentrée sans sortie

Le congé de la fête du Travail passé, septembre bien entamé, on peut maintenant parler rentrée, et même rentrée culturelle! L’activité a tranquillement repris, notamment dans les théâtres. Mais comme la COVID rôde toujours, c’est de mon salon que j’ai vu Zebrina. Une pièce à conviction, la première production de la nouvelle saison du Théâtre du Nouveau Monde.



Cette pièce de l’auteur américain Glen Berger créée en 2001 s’ouvre sur un clin d’œil à notre époque. Le personnage débarque dans un théâtre qui a été vacant pendant un bon moment et s’étonne de ne pas y trouver plus de monde. Commence alors le long monologue de ce bibliothécaire hollandais qui nous raconte une quête insensée, celle de retrouver la personne qui a osé rapporter un livre avec 133 ans de retard, pour lui imposer l’amende de sa vie.

«Zebrina. Une pièce à conviction» est la première production de la nouvelle saison du Théâtre du Nouveau Monde. Photo: Yves Renaud

Une à une, il nous présente les pièces à conviction qui lui ont permis de mener son enquête. Cela va du nom de l’abonné (A.), à son adresse postale en Chine, en passant par un coupon pour récupérer un pantalon chez un nettoyeur à Londres oublié dans le livre, à un ticket de tramway berlinois trouvé dans la poche du pantalon.

En tirant le fil de son écheveau, le bibliothécaire nous mène jusqu’en Judée en l’an 33. On y apprend alors que «zebrina» est une plante rampante connue aussi sous le nom de «juif errant». Et voilà que notre bibliothécaire repart pour nous amener en Australie et aux États-Unis, pour finir dans le cosmos à se demander ce qu’on fait dans cet univers.

Me suivez-vous encore? Moi, j’ai perdu intérêt en cours de route. Pas que Emmanuel Schwartz ne soit pas bon, au contraire, la prestation du comédien, qui s’adresse à nous avec un accent hollandais prononcé de manière soutenue et de façon convaincante du début à la fin, a permis que je ne sois pas largué plus tôt.

Le comédien Emmanuel Schwartz s’adresse à nous avec un accent hollandais prononcé de manière soutenue et de façon convaincante du début à la fin. Photo: Yves Renaud

Probablement que si j’avais été dans la salle du TNM plutôt que sur mon divan, j’aurais réagi autrement. Le syndrome de Stockholm joue parfois au théâtre. On est otage de ce qui se passe sur scène et on finit par s’attacher aux personnages et vaincre l’ennui s’il nous gagne. La captation à laquelle j’ai assisté s’apparente à de la bien pauvre télévision. Un comédien de plain-pied en plan large pendant une heure trente-cinq, sans bien distinguer les expressions de son visage, voilà les raisons qui ont eu raison de mon intérêt.

À coup d’idées nouvelles et de compromis, le milieu du théâtre fait de grands efforts pour survivre dans le contexte de la pandémie. Cela me désole de ne pas pouvoir être plus enthousiaste à l’égard de ce spectacle, mais je ne me ferai quand même pas accroire que j’aime regarder une pièce dans mon salon. Le théâtre est un art vivant. Le TNM l’a compris en présentant Zebrina. Une pièce à conviction à la fois en salle devant public (billet autour de 45$) et en webdiffusion en direct (17$).

Reste à décider si on prend le risque d’aller voir le spectacle avec 150 personnes dans une salle de 700 places malgré toutes les précautions prises par les producteurs. Comme je suis immunosupprimé, j’ai tenté, sans conviction, je dois le dire, l’expérience de la webdiffusion, et ouais, sans sortie, j’ai raté ma rentrée.

La pièce est présentée à la fois en salle devant public et en webdiffusion en direct. Photo: Yves Renaud

Ce qu’il y a à voir dans les autres théâtres

Chez Duceppe

Comme au TNM, la compagnie Duceppe commence sa saison avec une pièce à un personnage. Dans le contexte pesant que nous vivons tous, on a pensé offrir un spectacle positif.

Toutes les choses parfaites de Duncan Macmillan met en vedette le comédien François-Simon Poirier dans le rôle d’un garçon qui tente de donner du bonheur à sa maman malade en lui parlant des belles choses de la vie.

La capacité de l’immense salle du théâtre Duceppe a été réduite, même chose pour la scène, question de créer plus d’intimité tout en respectant la distanciation physique. Le spectacle, d’une durée d’une heure dix, est à l’affiche jusqu’au 27 septembre. Signe des temps? Toutes les représentations en matinée sont à guichets fermés. Avec les jauges réduites, les salles se remplissent vite.

«Toutes les choses parfaites» de Duncan Macmillan met en vedette le comédien François-Simon Poirier. Photo: Facebook Théâtre Duceppe

À La Licorne

À La Licorne, il n’y a déjà plus de billets disponibles pour Je suis mixte de Mathieu Quesnel avec Yves Jacques, Benoit Mauffette et Navet Confit, présenté jusqu’au 26 septembre. Si vous habitez la région de Québec, Je suis mixte sera jouée avec la même distribution au théâtre Le Périscope du 1er au 10 octobre, et déjà deux séances sont complètes.

À La Licorne, il n’y a déjà plus de billets disponibles pour Je suis mixte de Mathieu Quesnel. Photo: Facebook Théâtre La Licorne et Théâtre de La Manufacture

Au Théâtre du Rideau Vert

Au Rideau Vert, les billets s’envolent aussi pour Adieu Monsieur Haffmann, une pièce de Jean-Philippe Daguerre couronnée de plusieurs prix Molière, mise en scène ici par l’infatigable Denise Filiatrault. La production commence le 29 septembre et déjà plusieurs supplémentaires ont été ajoutées, ce qui nous mène en novembre.

Au théâtre du Trident

À Québec, le théâtre du Trident, qui célèbre ses 50 ans d’existence, a eu l’idée de multiplier l’offre. La programmation, intitulée Les grandes retrouvailles, propose chaque jour quatre pièces d’un peu plus d’une heure. Deux à 18h30 et deux à 20h, notamment une reprise de la célèbre Sagouine d’Antonine Maillet avec Lorraine Côté.

Au Théâtre Français

Dans la région de l’Outaouais, c’est bien précautionneusement que le Théâtre Français du Centre national des arts renoue avec le public. Le projet Prologue(s) consiste en une série de microperformances théâtrales présentées dans des lieux publics et enregistrées pour diffusion ultérieure sur le web. Le Théâtre Français se cherchait cette semaine des spectateurs consentants pour interagir avec ses artistes lors des enregistrements, les 18 et 19 septembre.