La chronique Culture avec Claude Deschênes

Auteur(e)
Photo: Martine Doucet

Claude Deschênes

Claude Deschênes collabore à Avenues.ca depuis 2016. Journaliste depuis 1976, il a fait la majeure partie de sa carrière (1980-2013) à l’emploi de la Société Radio-Canada, où il a couvert la scène culturelle pour le Téléjournal et le Réseau de l’information (RDI). De 2014 à 2020, il a été le correspondant de l’émission Télématin de la chaîne de télévision publique française France 2.On lui doit également le livre Tous pour un Quartier des spectacles publié en 2018 aux Éditions La Presse.

Retrouvailles avec Clémence Desrochers à Sherbrooke

Pour reprendre les mots de Clémence Desrochers dans son monologue Les jeudis du groupe, «[…] il peut neiger, grêler, pleuvoir, tomber des bombes sur la ville […]», rien ne devrait vous empêcher d’aller voir l’exposition Clémence. De la factrie au musée présentée au Musée des beaux-arts de Sherbrooke (MBAS) jusqu’au 18 novembre. J’y suis allé la fin de semaine dernière et j’ai fait, franchement Armand, un trèèès beau voyage.



Le 23 novembre prochain marquera le 85e anniversaire de naissance de Clémence Desrochers. C’est une belle idée que le MBAS lui rende hommage. Après tout, la cadette des six enfants de Rose-Alma Brault et d’Alfred Desrochers est originaire de Sherbrooke. Elle a grandi rue du Pacifique, au sud de la voie ferrée et du lac des Nations. L’Estrienne qu’elle n’a jamais cessé d’être se trouve tout à fait dans son élément au deuxième étage du musée de la rue Dufferin.

Crédit: Clémence DesRochers, 2003 © Laurence Labat Gracieuseté du Musée des beaux-arts de Sherbrooke.
Crédit: Clémence DesRochers, 2003. © Laurence Labat. Gracieuseté du Musée des beaux-arts de Sherbrooke.

Dessins, lettres, photos, artéfacts, entrevues, extraits de spectacles et de chansons, l’exposition est ainsi conçue qu’on peut retrouver la Clémence drôle et émouvante qu’on aime et qui fait partie de nos vies depuis des décennies, et celle de l’intimité.

Photo: Claude Deschênes
Photo: Claude Deschênes

J’ai aimé l’entendre raconter qu’on riait beaucoup dans sa famille et que ses parents lui ont laissé énormément de liberté. N’est-ce pas formidable qu’un musée serve à propager une pareille recette du bonheur? Cela m’a fait comprendre encore mieux l’amour débordant qu’elle voue à ses parents. On a beaucoup entendu Clémence sur l’attachement à son père, mais une lettre, très touchante à lire, témoigne du lien extrêmement fort qu’elle a entretenu avec sa mère.

Clémence Desrochers ne s’est jamais vraiment prise au sérieux. L’autodérision a été, on l’imagine, autant une façon de faire rire que de se protéger, car derrière ce personnage très affirmé, il y a un monument de simplicité. Cette simplicité, qui la rend si attachante et accessible, est aussi manifeste dans ses dessins. Avec un style naïf, elle évoque ses années d’école, son entourage familial, ses chats, sa passion pour la nature et la vie quand on est vieille.

Photo: Claude Deschênes
La simplicité de Clémence Desrochers est manifeste dans ses dessins. Photo: Claude Deschênes

Pour ce qui est du personnage public, l’exposition nous rappelle, documents vidéo à l’appui, la longue carrière de cette femme qui a inventé le métier de monologuiste. Cet art, elle l’a utilisé pour traiter de sujets qui ont été tabous jusqu’au jour où elle a décidé de les aborder, qu’on pense à la ménopause, à la santé mentale ou à l’amour entre femmes.

C’est fascinant de la voir parmi Les girls (Diane Dufresne, Louise Latraverse, Chantal Renaud et Paule Bayard) brasser la cage en pleine vague féministe des années 1970. Moi qui croyais connaître ma Clémence, j’ai découvert qu’elle a même déjà partagé la scène avec René Angélil dans un spectacle baptisé La belle amanchure!!!!! Oui, ça vaut quelques points d’exclamation.

Photo: Claude Deschênes
Le saviez-vous: Clémence Desrochers a déjà partagé la scène avec René Angélil. Photo: Claude Deschênes

Clémence n’a jamais cessé de travailler et de prendre toutes sortes de chemins de traverse: Les bozos (avec Claude Léveillée, Jean-Pierre Ferland, Raymond Lévesque, Jacques Blanchet), La grosse tête (avec Gilbert Chénier et Marc Favreau), le téléroman Côte de sable (de Marcel Dubé), l’émission pour enfants Grujot et Délicat où, personnellement, je l’ai découverte dans le rôle de Mlle Sainte-Bénite, le magazine télévisé Les trouvailles de Clémence, le cinéma (La grande séduction qui lui a valu un prix Jutra). Ce côté touche-à-tout à qui tout réussi constitue certainement un des secrets de sa longévité.

Elle peut bien faire partie de nos vies! Et pour les plus jeunes qui ne la connaissent pas, cette exposition est une occasion inespérée de prendre la mesure de sa contribution à la culture québécoise.

Deux autres raisons d’aller à Sherbrooke

Deux raisons supplémentaires de faire le voyage à Sherbrooke: la Ville a développé depuis quelques années un réseau de murales qui mérite le déplacement, auquel s’est ajouté, depuis l’an dernier, un parcours photo.

Il y a 16 murales réparties sur le territoire de la ville et chacune raconte, avec un réalisme déconcertant, un aspect de l’histoire de Sherbrooke. Celle intitulée Destinées et origines, faite en trompe-l’œil, s’avère hallucinante.

Photo: Claude Deschênes
Photo: Claude Deschênes

Dans le cas du Parcours Photo, ce sont des œuvres photographiques d’artistes de la région acquises par la Ville et exposées autour du lac des Nations.

Photo: Claude Deschênes
Photo: Claude Deschênes