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Décès d’Antonine Maillet

Elle voulait écrire jusqu’à 100 ans. Elle était si près du but en s’éteignant 95 ans. Qu’à cela ne tienne, l’écrivaine Antonine Maillet avait de quoi être fière et beaucoup de raisons de nous rendre reconnaissants de l’avoir eue si longtemps près de nous, ne serait-ce qu’en tant que lecteurs de son œuvre, dont nous parlerons encore longtemps.

Antonine Maillet est née à Bouctouche au Nouveau-Brunswick, le 10 mai 1929. C’est certainement sa pièce La Sagouine et son roman Pélagie-la-Charrette qui sont les plus connus de sa bibliographie. Ce dernier, qui s’est écoulé à plus d’un million d’exemplaires en France seulement, lui a d’ailleurs valu de remporter le prestigieux prix Goncourt en 1979. Seule Canadienne à le recevoir, Antonine Maillet est aussi l’une des rares femmes à joindre ces rangs de victorieux, aux côtés notamment des grandes Simone de Beauvoir ou Marguerite Duras, pour ne nommer que ces légendes des lettres françaises.

Antonine Maillet aux côtés de l'écrivain français Yves Navarre. Photo: BAnQ

Souvent qualifiée d’«âme de la littérature acadienne contemporaine», elle a enseigné la littérature au Québec et aux États-Unis. Elle était aussi compagne de l’Ordre du Canada en plus d’avoir été maintes fois primée, honorée, récompensée. Dans Clin d’œil au temps qui passe, son cinquantième livre, sorte de bilan de vie, elle osait pour la première fois le «je» de l’intimité, même si elle s’était «juré de ne jamais entrer elle-même dans la galerie de ses créatures», comme elle le racontait à Dominic Tardif dans Le Devoir en 2022.

Antonine Maillet en 1983. Photo: BAnQ

Comme bien d’autres écrivaines et artistes de son temps, son parcours n’a évidemment pas été exempt d’embûches. Peu prise au sérieux, d’abord parce qu’elle était une femme, parfois méprisée en raison de sa langue, dont il lui arrivait de transgresser les normes linguistiques, à la réception du Goncourt, celle qui avait fait sa thèse de doctorat sur Rabelais, avait d’ailleurs reçu dans sa pile de courrier, qu’une ou deux seules lettres d’autres écrivains.

Antonine Maillet, 1978. Photo: BAnQ

Orpheline tôt dans sa vie après avoir perdu sa mère d’un cancer généralisé alors qu’elle n’avait que 14 ans et son père emporté par le parkinson dix ans plus tard, Antonine Maillet avait placé la famille au cœur de plusieurs de ses histoires en plus de tellement de personnages passés à l’Histoire comme cette Sagouine qui avait fait connaître la comédienne Viola Léger qui l’a précédée dans la mort, le 28 janvier 2023 à 92 ans.

Paix à son âme et nos plus sincères condoléances à ses proches et à tous ceux qui l’aimaient.

Adieu, Fanfreluche!

C'est avec tristesse que nous apprenons le décès de Kim Yaroshevskaya, qu’une génération a connue en tant que Fanfreluche, et qu’une autre a connue en tant que Grand-Mère dans Passe-Partout. Cette grande artiste s’est éteinte à l’âge de 101 ans. Retour sur les grandes lignes de sa vie.

Une inoubliable poupée

Kim Yaroshevskaya naît en 1923 à Moscou, en Russie. Elle immigre au Québec à l’âge de 10 ans, alors qu’elle ne parle ni français, ni anglais. Elle raconte d’ailleurs son périple dans le livre autobiographique Mon voyage en Amérique, publié en 2017 aux Éditions du Boréal. Un très beau livre tout en simplicité qui nous faisait entrer dans le récit de sa vie et voir à travers ses yeux d'enfant puis de jeune artiste un parcours incroyable. Nous en avions d'ailleurs publié une critique fort élogieuse de son livre que vous pouvez lire ici.

Inspirée par les contes de son enfance, Kim Yaroshevskaya crée le personnage de Fanfreluche alors qu’elle prépare un spectacle pour enfants avec la troupe Le Grenier. En 1954, la poupée prend vie pour la première fois au petit écran dans l’émission Fafouin. Kim Yaroshevskaya incarnera Fanfreluche dans l’émission pour enfants La boîte à surprise de 1956 à 1967. En 1968, la désormais célèbre poupée aux joues roses obtient sa propre émission. Une aventure qui dure quatre ans, mais qui, dans le cœur de tous ceux qu’elle a su émerveiller, dure pour toujours.

Photo: museedelhistoire.ca

La grande majorité des Québécois de 45 ans et plus peuvent encore fredonner la chanson thème de Fanfreluche qui «va vous raconter une histoire». Quand son grand livre s’ouvrait, on y croyait, on s’y croyait. En quelques objets à peine, un décor prenait forme, une époque et des personnages. Elle était à toute épreuve, cette poupée qui, toute fille était-elle, était, comme bien des personnages féminins pour enfants de cette époque, une fille affirmée, féministe sans en avoir l’air.

Une célèbre grand-mère

En 1977, une nouvelle aventure télévisuelle commence pour Kim Yaroshevskaya, qui incarne Grand-Mère dans la série pour enfants Passe-Partout. Encore une fois, des milliers d’enfants tombent sous le charme de son talent de conteuse, de sa voix aux intonations berçantes et de son rire unique. Elle était la grand-maman que nous aurions tous voulu avoir. L’aventure prend fin en 1987.

Photo: Facebook

De nombreux autres personnages

Bien qu’elle soit surtout connue pour ses rôles de Fanfreluche et de Grand-Mère, Kim Yaroshevskaya a incarné une foule d’autres personnages. À la télévision, on a notamment pu la voir dans les téléromans Ent’Cadieux et Mon meilleur ennemi.

Au théâtre, elle a joué dans une cinquantaine de pièces, dont Été et fumées de Tennessee William, Le joueur, de Dostoïevski, et La cerisaie d’Anton Tchekhov.

Au cinéma, elle a participé à une quinzaine de longs-métrages, dont Le matou, Simon les nuages et Le sexe des étoiles.

Des honneurs mérités

En 1991, Kim Yaroshevskaya reçoit l’Ordre du Canada, un titre qui souligne sa contribution extraordinaire à la nation. Plus de vingt ans plus tard, la comédienne devient Compagne de l’Ordre des arts et des lettres du Québec en reconnaissance de ses réalisations, qui ont contribué à l’essor artistique et littéraire du Québec.

Photo: Facebook Conseil des arts et des lettres du Québec

L'hommage de Jacques Nadeau

Le photographe bien connu Jacques Nadeau a fait paraître chez Cardinal en 2024 un magnifique livre intitulé Vénérables, dans lequel en photos et en textes il rend un vibrant hommage aux aînés de notre société connus ou moins connus mais dont le parcours, le regard et la portée ont interpellé le photographe. Et pour sa couverture c'est nulle autre que Kim Yorovsheskaya qui apparaît toute souriante, toute en douceur. Nous avions parlé de ce livre vous pouvez lire notre critique ici.

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Dans notre mémoire pour toujours

Kim Yaroshevskaya n’est plus, mais heureusement, son œuvre demeure immortelle. Pour replonger dans le grand livre de Fanfreluche, rendez-vous sur ICI Tou.tv, qui diffuse gratuitement tous les épisodes de la première saison.

Adieu, Fanfreluche. Merci d’avoir bercé notre enfance de tes contes merveilleux.

Décès de Julien Poulin, notre Elvis national n’est plus

C’est avec regret que nous apprenons le décès, samedi, du comédien et réalisateur Julien Poulin qui était âgé de 78 ans. Notre Elvis Gratton national, Bob, de son petit nom, a donc tiré sa révérence. Les causes du décès n’ont pas été dévoilées.

Les Québécois se souviendront, bien sûr, de son interprétation magistrale de Bob Gratton, ce Québécois caricatural aux prises avec son identité, imaginé et filmé par le regretté Pierre Falardeau. Au total, 3 longs métrages et une série auront immortalisé ce garagiste bling bling qui vouait un culte aux Américains et au King. Un rôle qui aura marqué la carrière de Julien Poulin.

Le comédien, très apprécié du public, a débuté sa carrière au théâtre avec Paul Buissonneau, qui lui avait ouvert les portes du théâtre ambulant La roulotte de la ville de Montréal.

Photo: Yves Renaud

Julien Poulin se tourne rapidement vers le cinéma et aura tourné dans plus d’une centaine de films dont Le crime d'Ovide Plouffe, Camion qui lui a valu le Jutra (Prix Iris) du meilleur acteur, Le Matou, Le party, Séraphin, 1839, ou encore Babine.

Il a également tenu de très nombreux rôles dans des téléromans et séries télévisées, comme Minuit le soir, Virginie, Fortier III et Les pays d’en haut. Il aura reçu de nombreux prix au cours de sa carrière, notamment le prix Gémeaux pour le meilleur rôle de soutien dans la comédie Léo. Prix qu’il avait déjà remporté pour Minuit le soir. Figure de proue du milieu culturel, Julien Poulin avait aussi touché à la réalisation, notamment au début des années 1980 avec Pierre Falardeau, dont il était le grand ami, pour Speak White produit par l’ONF.

Ci-dessous Julien Poulin dans son rôle du père Laloge, le père de Donalda dans la série Les pays d'en haut.

Né le 20 avril 1946 à Montréal, Julien Poulin avait de profondes convictions politiques et s’engageait parfois dans les causes sociales. En 2006, il s'était retrouvé bien malgré lui dans une controverse et avait dû essuyer les critiques et présenter ses excuses pour avoir tenu momentanément un drapeau du Hezbollah échangé avec un drapeau du Québec lors d’une manifestation pour un cessez-le-feu au Proche Orient.

Julien Poulin demeurera longtemps dans la mémoire collective pour ses nombreux rôles auxquels il donnait une grande intensité et qu'il savait rendre attachants.

Décès du comédien Edgar Fruitier

Le comédien Edgar Fruitier est décédé des suites d’un arrêt cardiaque, le 29 novembre dernier, à l’âge de 94 ans. La nouvelle de son décès n’a toutefois été communiquée que le 12 décembre.

Pour toute une génération, il fut Loup Garou, le souffre-douleur du Capitaine Maboule dans La boîte à surprises, ou encore le patron un peu guindé de la confiserie Excelsior, M. Lecardeur, dans Les belles histoires des pays d’en haut. Mélomane passionné de musique classique, grand collectionneur de disques, Edgar Fruitier a été tour à tour chroniqueur, animateur et comédien pendant des décennies, mais sa carrière et sa vie publique ont pris fin abruptement lorsqu’il a été reconnu coupable en 2020 d’attouchements sexuels sur un mineur de 15 ans dans les 1970 et condamné à six mois de prison à l’âge de 91 ans.

Au fil des décennies, M. Fruitier a tenu de nombreux rôles dans des téléromans populaires comme La famille Plouffe, Lance et compte, Terre humaine et plusieurs autres. Il a aussi fait la voix de M. Burns dans Les Simpsons. Certains se souviendront aussi de son émission Les grands Esprits dans les années 1980, où il animait une table à laquelle était conviés les grands artistes, philosophes et personnalités de l’histoire.

Photo: BAnQ

Il était aussi connu pour son étonnante collection de plus de 65 000 disques. Cette passion pour la musique classique l’a amené à animer pendant quelques années La collection d’Edgar sur les ondes de la radio de Radio-Canada et d’être aussi chroniqueur musique classique à l’émission phare de Joël Le Bigot Samedi et rien d’autre. Il a d’ailleurs publié quelques titres sur la musique classique et produit quelques disques dans une série de compilations intitulée Les choix d’Edgar.

Photo: BAnQ

Il a transposé cette passion sur scène en 2010 avec son spectacle de théâtre Edgar et ses fantômes, dont la suite, Edgar et ses fantômes 2, avait été présentée dès 2017. La pièce d’une facture unique avait pour but de démystifier les grands maîtres et de populariser la musique classique, un thème qui lui était cher.

Nos condoléances à ses proches.

Décès de Brian Mulroney

C’est par un tweet de sa fille, Caroline, que les Canadiens ont appris le décès de Brian Mulroney, qui fut le 18e premier ministre du Canada de 1984 à 1993. Gravement malade, il avait été hospitalisé au cours des dernières semaines. M. Mulroney est décédé à 85 ans, entouré des siens, en ce 29 février.

Né en 1939 sur la Côte-Nord dans une famille modeste, le «petit gars de Baie-Comeau», comme il se plaisait à le dire, aura été une figure marquante de la vie politique du 20e siècle. Au cours de sa carrière, il aura certes essuyé des défaites comme celle de l’Accord du Lac Meech, dont il avait fait son projet politique phare, ou encore la rupture avec Lucien Bouchard. Il se définissait comme progressiste-conservateur et a tenté en vain à deux reprises de rallier le Québec à la Constitution canadienne. Sans doute son plus grand regret.

Les Canadiens lui doivent la signature de l’Accord de libre-échange avec les États-Unis, qui donnera naissance à l’ALENA. Il  compte à sa feuille de route la victoire (1984) par une des plus grandes majorité de l’histoire politique canadienne. Il a été aussi le premier PM à se préoccuper d’environnement.

Sur la scène internationale, il a joué un rôle important dans la lutte contre l’Apartheid en Afrique du Sud, convainquant  Ronald Reagan et Margaret Thatcher de soutenir cette cause qu’il a défendue âprement malgré les résistances internationales.

On lui doit aussi une mesure fort contestée à l’époque, soit l’instauration de la TPS, mais qu’aucun gouvernement n’a jamais remise en question par la suite.

En 1995, il a été rattrapé par un scandale dans l’achat d’avions Airbus, dévoilé par le Financial Post. Brian Mulroney a eu du mal à essuyer cette tache à sa feuille de route et avait répliqué par une poursuite. L’enquête et les poursuites se sont conclues à l’amiable.

Rappelons qu’après son retrait de la vie politique, il avait rejoint un prestigieux cabinet d’avocats. Il est tout de même rester actif occasionnellement sur la scène publique, allant jusqu’à répondre à l’appel du Libéral, Justin Trudeau, pour mettre à profit son vaste réseau de contacts et son savoir-faire dans certaines négociations avec les États-Unis, alors que l'administration Trump menaçait l'accord de libre-échange. Justin Trudeau a souligné par un tweet que Brian Mulroney a toujours travaillé pour le bien du Canada. Même retraité de la vie active, il n’hésitait pas à donner une opinion non partisane sur le déroulement des dernières élections, entre autres, ou d’autres dossiers.

L’ensemble de la classe politique reconnait en lui un gentleman et un politicien d’envergure. Les médias, collaborateurs et personnalités politiques parlent d’un grand premier ministre au legs politique fort.

Nos sympathies à sa famille et à ses proches.