La chronique Voyages en images

Valérie Deltour

Valérie Deltour a d'abord découvert les pays méditerranéens, à la rencontre des cultures qui ont façonné son arbre généalogique, des héros mythologiques de son enfance et des monuments qui habitent l’Histoire qui l’intéresse tant. Puis, son amour de l’ailleurs et son désir de transmettre sa passion de la planète l’ont incitée à changer de carrière et à faire du voyage son univers quotidien. Depuis, chaque escapade se transforme en coup de cœur dont elle prend plaisir à parler.

Voyage dans les Pouilles, en Italie

Mon rendez-vous tant attendu avec les Pouilles, en Italie, a eu lieu en mai dernier. À la fois touristique et méconnu, le talon de la botte italienne s’est révélé surprenant, d’une richesse et d’une beauté incroyables, autant pour son histoire millénaire que pour ses paysages intacts. Trois mots pour résumer la région? Traditions, fierté et lumière.


1- Les perles blanches

Les petites villes dans les Pouilles ressemblent à des perles blanches déposées le long du bord de mer ou nichées au milieu des champs d’oliviers. Se donnant tour à tour des airs de casbahs nord-africaines ou de villages grecs des Cyclades, elles sont comme les sœurs d’une même famille: elles ont des traits communs, mais chacune a sa personnalité.

Dans le village de Locorotondo. Photo: Valérie Deltour

2- Au rythme des Pouilles

Au plus fort du soleil d’après-midi, les maisons affichent un blanc éclatant, presque cru, incitant tout le monde à se mettre à l’abri le temps d’une pause pour ne ressortir qu’au moment où les façades deviennent crémeuses avec les derniers rayons adoucis. La sieste, c’est sacré dans les Pouilles! Le temps semble s’arrêter, et on traverse des villes momentanément fantômes.

Castro à l'heure de la sieste. Photo: Valérie Deltour

Il est vrai que la chaleur en milieu de journée devient vite écrasante dans cette région. Seuls quelques chats somnolents font mine de vous regarder passer d’un air blasé, en se disant que vous n’êtes pas un local…

(Presque) pas un chat à Presicce. Photo: Valérie Deltour

3- Les châteaux du passé

Témoins d’un passé tumultueux, plusieurs forteresses dominent encore le cœur des vieilles villes dans les Pouilles. Celles entourées de remparts incitent à s’y balader sereinement pour contempler les paysages des alentours, à perte de vue. Pourtant, un petit air nostalgique se dégage des murs de ces châteaux. Après avoir résisté aux assauts d’ennemis pendant des siècles, ils ont fini par céder, stoïques, devant les voyageurs envahissant leurs murailles à la recherche d’un bon angle photo ou d’un souvenir à rapporter. Ironie de l’histoire…

Château aragonais à Otranto. Photo: Valérie Deltour

4- Les églises

Omniprésentes, les églises sont le symbole de l’histoire catholique du pays. Chaque ville, même de petite taille, compte plusieurs bâtiments religieux presque toujours ouverts aux visiteurs. On remarque vite que le style baroque, chargé et parfois lourd, a été à la mode dans les Pouilles. On se surprend à chercher un petit coin sans décoration afin de se reposer les yeux. Au point qu’on a parfois, comme à Lecce, l’impression de marcher dans un décor d’opéra grand format.

Basilica di Santa Croce à Lecce. Photo: Valérie Deltour

Malgré tout, dans la plupart des églises et cathédrales, l’architecture parvient à créer une impression de verticalité, et curieusement de simplicité, probablement due à la prépondérance du blanc. Comme si toute la construction tentait de s’élever vers le ciel à la rencontre des nuages.

Chiesa di San Mateo à Lecce. Photo: Valérie Deltour

5-Les pumi

En levant la tête, on remarque vite de curieux objets en céramique aux coins des balcons. Très prisées depuis des siècles par les habitants, ces petites boules colorées sont des pumi, symboles de renouveau et de bon augure.

Des pumi sur un balcon à Grottaglie. Photo: Valérie Deltour

En forme de bouton de fleur sur le point d’éclore, entouré de quatre feuilles, les pumi sont souvent plutôt simples et unicolores bien que certains affichent un peu plus d’excentricité. L’important, c’est qu’ils soient faits à la main, comme la plupart des objets symboliques en Italie. Si c’est usiné, ce n’est pas un porte-bonheur qualifié!

Des pumi pour tous les goûts! Photo: Valérie Deltour

6- Alberobello, au pays des géants

Des maisonnettes blanchies à la chaux avec de drôles de toits coniques s’alignent le long des rues. Le doute s’installe… on est bien toujours en Italie ou est-ce qu’on vient d’entrer dans une illustration de conte pour enfants? Ces constructions, dont même les origines se confondent avec la légende, se retrouvent un peu partout dans la vallée d’Itria, mais c’est Alberobello qui en possède le plus grand nombre. Bienvenue dans le monde des trulli, classés à l’UNESCO.

Rue à Alberobello. Photo: Valérie Deltour

Pour les archéologues amateurs, la mission est de décoder les symboles sur les toits des fameux trulli. Tout d’abord, les dessins peints à la chaux sur les tuiles en calcaire gris qui, tracés à main levée, servaient probablement à conjurer le mauvais sort. Environ 200 ont été répertoriés par les chercheurs. Quant aux boules, croix ou étoiles déposées au sommet des maisons, leur signification reste énigmatique.

Dessins et pinacles sur les trulli. Photo: Valérie Deltour

7- La mer, rien que pour soi

Les paysages côtiers sont très variés dans les Pouilles. Si quelques plages offrent une longue étendue de sable fin, on trouve le plus souvent de petites criques de galets entrecoupées de rochers, voire de hautes falaises. Certaines ne se dévoilent qu’après que l’on ait traversé une pinède, le long d’un sentier ombragé et odorant. Le décor se complète avec une série de grottes ponctuant le littoral, parfois cachées et uniquement accessibles par la mer.

Punta della Suina. Photo: Valérie Deltour

Quelques rarissimes installations proposent la location de chaises et de parasols, mais la plupart des endroits donnent plutôt l’impression d’avoir découvert un bout de planète tant ils sont déserts et sauvages. Pour ceux qui préfèrent tout de même un peu de confort, certaines villes balnéaires proposent des aménagements en plein centre historique, à deux pas de votre apéro du soir!

Plage à Otranto. Photo: Valérie Deltour

8- La gastronomie au jour le jour

Quand il s’agit de manger, au goût et à la présentation les habitants des Pouilles ajoutent la notion de fierté. On s’arrête, on prend le temps de bien choisir, on s’interroge sur la provenance des aliments. Vous commandez du poisson dans un restaurant? On vous l’apporte entier à table avant de le préparer, en quête de votre approbation. Vous préférez un plat de pâtes? On vous parle du producteur de tomates.

Poissons et fruits de mer à Gallipoli. Photo: Valérie Deltour

Les éléments principaux au menu sont toujours fraîcheur et qualité, et aucun compromis ne semble possible. Puisqu’il y a généralement peu d’ingrédients dans les recettes, ils se doivent d’être irréprochables. C’est vous dire le bonheur de goûter aux différents plats pendant un voyage! Un concentré de saveurs et de soleil dans l’assiette, avec l’assurance de déguster des produits locaux.

L’apéro à Lecce. Photo: Valérie Deltour

9- Histoire d’oliviers

Après le blanc des maisons et le bleu de la mer, place au vert des oliviers! L’histoire de la région est intimement liée à celle de la production d’huile d’olive, réputée mondialement. D’ailleurs, certains arbres plantés par les Romains sont encore debout et produisent une quantité impressionnante de fruits. Debout, certes, mais pas tout à fait droits… Deux millénaires de vent ont sculpté leur tronc en quasi-spirale et leurs branches en labyrinthe feuillu.

Un océan d’oliviers à Cisternino. Photo: Valérie Deltour

L’or vert des Pouilles n’a pas toujours été comestible, les premiers moulins servant à produire de l’huile pour l’éclairage. Preuve de l’importance de cette industrie, on retrouve de nombreux anciens pressoirs, des trappeti souterrains et creusés à la main dans la pierre locale, autant dans les villes que dans les campagnes. Plusieurs sont ouverts aux visiteurs et racontent les processus de fabrication et les conditions de vie difficiles des travailleurs de l’époque.

Ancien pressoir souterrain à Gallipoli. Photo: Valérie Deltour

10- Du soleil et des fleurs

Sans surprise, le climat si favorable aux centaines de milliers d’oliviers l’est tout autant au reste de la végétation. D’abord, les cactus. Immenses! Ils se permettent le luxe de pousser dans quelques centimètres cubes de terre, à l’ombre d’un mur blanchi à la chaux. D’ailleurs, leur omniprésence dans les Pouilles est à ce point qu’on les retrouve en décoration sur la vaisselle en céramique.

Cactus. Photo: Valérie Deltour

Il y a aussi toutes ces fleurs qui envahissent chaque recoin et se déversent en cascades des balcons, avec une certaine nonchalance. Ici, la nature a tout son temps pour fleurir le territoire à profusion. En marchant dans les rues, on se surprend souvent à chercher des yeux l’origine du parfum qui nous enveloppe. Il suffit de lever la tête pour apercevoir un énorme «nuage» de jasmin étoilé aussi odorant qu’impressionnant.

Jasmin étoilé. Photo: Valérie Deltour

11- Les pâtisseries: l’ultime tentation

Alors là, c’est très, très difficile de ne pas succomber! Appétissantes, toujours de confection artisanale et pas trop sucrées, certaines pâtisseries sont à ce point des spécialités qu’on ne peut les trouver que dans une seule ville ou village. La définition même du carpe diem gourmand! Bocconotti aux cerises, pasticciotti remplis de crème pâtissière, taralli aux pistaches… bonne chance dans vos objectifs de modération! Petit avertissement concernant le babà: beaucoup plus gros que son cousin français, il nage littéralement dans une bonne rasade de rhum pur qu’il peine à absorber. Un c’est bon, deux c’est meilleur, mais on ne passe pas un alcootest par la suite!

Pâtisserie à Lecce. Photo: Valérie Deltour