La chronique Voyage de Marie-Julie Gagnon

Auteur(e)
Photo: Mélanie Crête

Marie-Julie Gagnon

Auteure, chroniqueuse et blogueuse, Marie-Julie Gagnon se définit d’abord comme une exploratrice. Accro aux réseaux sociaux (@mariejuliega sur X et Instagram), elle collabore à de nombreux médias depuis une vingtaine d’années et tient le blogue Taxi-brousse depuis 2008. Certains voyagent pour voir le monde, elle, c’est d’abord pour le «ressentir» (et, accessoirement, goûter tous les desserts au chocolat qui croisent sa route).

Dernière matinée en Grèce

La semaine dernière, notre chroniqueuse Marie-Julie Gagnon vous a fait rêver avec sa carte postale d’Hydra, en Grèce. Puisque toute bonne chose a une fin, elle partage avec vous ses dernières impressions de l’île.



C’est toujours comme ça. Quand je sens l’imminence du départ, je ressens le besoin de me lever encore plus tôt. Comme si la journée pouvait s’étirer parce que j’écourtais ma nuit. Comme si l’aurore me conférait un quelconque pouvoir sur l’immuabilité temporelle.

J’enfile mes chaussures de course et descends vers le port. Des chants religieux surgissent d’une petite église. Quelques pas plus loin, le Roloi, sous l’horloge, et the Pirate Bar – autrefois O Peiratis –, tous deux fréquentés par Leonard Cohen, sont presque déserts.

The Pirate Bar, autrefois O Peiratis, était fréquenté par Leonard Cohen. Photo: Marie-Julie Gagnon

Une fois sur le quai, l’atmosphère est tout autre. Des marchands déchargent les bateaux. Certains tirent des chariots bien remplis pendant que des ânes agitent la queue à l’ombre des parasols. Quelques rares touristes déambulent devant les boutiques encore fermées.

Des ânes agitent la queue à l’ombre des parasols. Photo: Marie-Julie Gagnon

Sur la route qui ceinture l’île, je croise quelques camions, dont celui qui effectue la collecte des ordures. Les voitures ont beau être interdites, dans ce secteur, des véhicules voués aux services essentiels sont autorisés à circuler. À l’époque où Leonard Cohen vivait sur l’île, des ânes transportaient encore les poubelles du voisinage. Le poète a raconté s’être senti accepté parmi les insulaires le jour où l’âne des vidanges s’est présenté à sa porte. «C’est comme si j’avais reçu la Légion d’honneur.»

Je bifurque vers le fort et passe devant l’ancien abattoir coiffé du soleil de Jeff Koons. Il participe cet été avec une dizaine d’autres artistes à une petite expo de la DESTE Foundation for Contemporary Art, Dream Machines, qui explore l’impact de la technologie sur l’imagination humaine.

L’ancien abattoir coiffé du soleil de Jeff Koons. Photo: Marie-Julie Gagnon

La route tourne autour de l’île, avec quelques montées et descentes. Chemin faisant, j’aperçois de petits promontoires d’où des nageurs viendront sans doute plonger dans les eaux cristallines dans quelques heures.

Plus je m’éloigne du cœur du village, plus les maisons m’apparaissent cossues. Même les cigales semblent avoir plus de coffre. Je profite de la route pour faire quelques pas de course avant de rebrousser chemin pour poursuivre ma balade de l’autre côté de l’île, vers l’ancien moulin. Je repasse par le port, plus animé qu’une heure auparavant. Les ânes aussi m’apparaissent plus réveillés.

Le port animé. Photo: Marie-Julie Gagnon

 

De l’autre côté de l’île, des baigneurs matinaux poussent de grands soupirs de satisfaction. Pas de doute, l’eau est bonne. Après une bonne demi-heure à tenter de trouver comment rejoindre le moulin, je décide d’emprunter des escaliers. Je monte. Je monte. Je monte… Je croise un homme souriant avec cinq ânes à la queue leu leu. Que j’aime cette joie de vivre qui émane des insulaires!

Des baigneurs matinaux poussent de grands soupirs de satisfaction. Pas de doute, l’eau est bonne. Photo: Marie-Julie Gagnon

J’aperçois d’autres villas, dont certaines avec un panonceau indiquant où trouver les infos pour en faire la location. Je m’imagine un instant vivre la vie de pacha au-dessus des collines. Je me ravise rapidement: je préfère nettement le cœur du village.

Je décide de m’enfoncer dans les dédales des escaliers, vers l’intérieur de l’île. J’aime particulièrement les ruelles étroites entre deux bâtiments. Ce qui se trouve au bout est toujours une surprise.

J’aime particulièrement les ruelles étroites entre deux bâtiments. Photo: Marie-Julie Gagnon

Je regarde ma montre. Merde. Dans une heure et demie, le traversier me ramènera à Athènes. J’aurai à peine le temps de prendre une douche et d’attraper quelque chose à manger au buffet de l’hôtel. Je ferais mieux de revenir sur mes pas, histoire de ne pas me perdre encore davantage.

Je regarde ma montre. Merde. Dans une heure et demie, le traversier me ramènera à Athènes. Photo: Marie-Julie Gagnon

Surprise: Google Maps m’indique que mes zigzags aléatoires dans la montagne m’ont ramenée à sept minutes de mon hôtel. J’ai l’impression d’avoir gagné à la loterie du temps. J’en profite pour prendre de énièmes photos de paysages encadrés de lauriers roses et de bougainvilliers. Je veux tout imprimer dans ma mémoire, des sillons des bateaux à l’horizon aux crottes d’ânes bien fraîches que j’évite de justesse. Le chant des cigales m’apparaît plus invitant que celui de n’importe quelle sirène.

Lauriers roses et bougainvilliers. Photo: Marie-Julie Gagnon

En tentant de suivre la route tracée par Google pour me rendre à mon hôtel, je réalise que je suis déjà passée par ici. Je reconnais les volets et les portes jaunes de l’atelier de Panagiotis Tetsis, que je n’ai pu visiter à cause des heures d’ouverture réduites.

Les volets et les portes jaunes de l’atelier de Panagiotis Tetsis. Photo: Marie-Julie Gagnon

C’est là que je tourne la tête et l’aperçois: la maison de Leonard Cohen.

Photo: Marie-Julie Gagnon

Pratico-pratique:

  • J’ai logé dans deux hôtels à Hydra: le Miranda et la nouvelle section de l’hôtel Orloff.
  • Air Transat propose des vols vers Athènes de la fin de mai à la fin d’octobre. Juillet et août sont les mois les plus occupés.
  • Du port du Pirée, à Athènes, il faut compter environ deux heures avec Hellenic Seaways pour se rendre à Hydra.

J’étais l’invitée d’Air Transat et de Discover Greece. Merci!