Photo: Facebook The Village Langley
26 mai 2020Auteure : Emilie Laperrière

Repenser le design des CHSLD

La crise actuelle de la COVID-19 démontre bien que les CHSLD n’étaient pas prêts à faire face à une telle pandémie. Comment peut-on mieux équiper les résidences pour personnes âgées d’un point de vue architectural? Réflexion et pistes de solution.



Des 3858 personnes mortes de la COVID-19 au Québec (en date du 21 mai), 2660 habitaient en CHSLD et 674 en résidences privées pour aînés. Ces chiffres alarmants ne s’expliquent évidemment pas qu’en raison de défauts architecturaux.

Le secteur des soins de longue durée fait en effet souvent figure de parent pauvre de notre système de santé, qui semble favoriser les hôpitaux. Sous-financé et mal desservi, il peine également à se rendre attrayant auprès de la main d’œuvre et manque donc de personnel. Sa clientèle était déjà vulnérable, et elle l’est encore plus dans ce contexte. À ce sujet, le texte de Jean-Benoît Nadeau s’avère d’ailleurs fort éclairant.

Malgré tout, le design des CHSLD doit être repensé. Voici quelques idées pour résoudre le problème.

Adieu, les chambres partagées

Il faut se l’avouer: les infrastructures des CHSLD ne sont pas pensées pour répondre aux besoins d’aujourd’hui. Les établissements de santé plus anciens sont souvent conçus comme des mini-hôpitaux, où les résidents doivent partager chambre et salle de bains. À l’Institut universitaire de gériatrie de Montréal, pourtant ultraspécialisé, les lavabos ont été installés dans le fond de la chambre, qu’il faut retraverser au complet après s’être lavé les mains. Difficile, dans ces conditions, de limiter la propagation d’un virus.

Comme proposé dans le projet gouvernemental de Maisons des aînés et de Maisons alternatives en novembre 2019, les résidences pour aînés devraient se composer uniquement de «chambres individuelles plus grandes, avec une salle de toilette privée et une douche adaptée».

À Québec, la résidence Humanitae propose un milieu de vie différent. Photo: Facebook Humanitæ

Plus d’espace, moins de résidents

Évidemment, les résidents ne peuvent pas rester confinés dans leur chambre tout le temps. Pour leur permettre de sortir tout en limitant la transmission des virus et autres infections, les CHSLD devraient être de plus petite taille et accueillir moins de personnes âgées par bâtiment.

Les quelques villages Alzheimer présents au pays, comme celui de Langley en Colombie-Britannique ou la résidence Humanitae à Québec, le font déjà. Bâtis sur le modèle néerlandais, ces derniers sont conçus à la manière d’un quartier: les résidents habitent par groupes de 12 personnes ou moins dans des maisonnées placées sur un grand terrain avec espaces verts. Ils ont chacun leur chambre et leur salle de bains, et les espaces communs ressemblent plus à ceux d’une maison unifamiliale qu’à ceux d’un centre de soins longue durée. On n’y retrouve pas de grande cafétéria éclairée aux fluorescents, par exemple.

Le village Alzheimer, en Colombie-Britannique, conçu à la manière d'un quartier. Photo: Facebook The Village Langley

Même s’ils ont été imaginés spécialement pour les gens atteints de troubles de la mémoire, ces centres ont de quoi inspirer les futurs CHSLD. Le modèle communautaire de quartier peut plus facilement se plier aux exigences de confinement.

Le cabinet d’architecture Snøhetta a aussi réfléchi à la question de l’aménagement idéal en concevant le Maggie’s Cancer Caring Center en Écosse et un ensemble de chalets en pleine nature pour les patients des plus importants hôpitaux de Norvège. Ces deux projets permettent aux résidents de recevoir les soins nécessaires sans être exposés inutilement aux virus, mais sans être isolés non plus. Leurs proches peuvent ainsi les visiter sans problème.

Plus de technologie

La pandémie de COVID-19 a forcé le système de santé à adopter plus largement la télémédecine. La technologie pourrait aussi servir dans les CHSLD. Au New Jersey, par exemple, le Jewish Home Family Facilities utilise des tablettes et des applications de vidéoconférence pour aider les résidents à garder le contact avec leurs proches. Les administrateurs se rendent d’ailleurs compte que les familles prennent plus fréquemment des nouvelles de cette façon.

Évidemment, toutes ces solutions ont un coût. Un coût que les centres de soins de longue durée, qui jonglent déjà avec des budgets insuffisants, ne peuvent souvent pas se permettre. Il faudra peut-être redéfinir les priorités de notre société pour régler le problème.