Restaurant de L'Île-de-France. Vue intérieure © Ministère de la Culture et des Communications 1999
27 mars 2023Auteure : Emilie Laperrière

Le « WOW ! » de la semaine

Nouveau départ pour le 9e étage du magasin Eaton

Fermé depuis près de 25 ans, le restaurant L’Île-de-France, au 9e étage de l’ancien magasin Eaton à Montréal, rouvrira ses portes à la fin de 2023. La nouvelle a de quoi réjouir les amateurs d’art déco (et les nostalgiques!). Retour sur l’histoire de ce lieu emblématique.

Au début du 20e siècle, les grands magasins font des pieds et des mains pour attirer la clientèle, ajoutant des salles de spectacle, des salons de coiffure et d’autres services pour se démarquer. La compagnie Eaton, propriétaire d’un magasin sur la rue Sainte-Catherine depuis 1927, suit la tendance.

Lady Eaton, veuve de sir John Craig Eaton, fait appel à l’architecte Jacques Carlu pour la conception d’un restaurant au 9e étage. Formé à l’École des Beaux-Arts de Paris, ce maître de l’architecture art déco s’est surtout illustré en réalisant le Palais de Chaillot, à Paris.

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La légende veut que lady Eaton, impressionnée par son voyage sur le navire L’Île-de-France, ait désiré une réplique de sa salle à manger. Que ce soit vrai ou pas, l’intérieur s’inspire des paquebots transatlantiques de l’époque. Les grandes fenêtres offrent une vue magnifique sur Montréal et ajoutent à l’expérience. Il s’agit d’ailleurs de l’un des plus remarquables exemples de l’art déco au Québec.

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Avec sa nef centrale arrondie, ses piliers de marbre importé, son sol en linoléum bicolore et son foyer qui fait office de salon de thé, le nouveau point de rendez-vous des gens d’affaires évoque le raffinement et l’élégance. La palette de couleurs, les bas-reliefs et les murales (dont deux sont l’œuvre d’Anne Carlu, l’épouse de l’architecte) se côtoient avec brio. Presque tous les détails sont préservés au fil des ans. En 1981, le buffet et les socles lumineux sont ajoutés au centre de la nef, dans le respect du style de l’endroit.

The Journal of the Royal Architectural Institute of Canada, mai 1931

L’immense établissement peut accueillir jusqu’à 600 personnes. Les repas offerts aux employés à la cafétéria de même que la nourriture vendue aux étages inférieurs sont mitonnés dans sa cuisine.

Le 9e sombre en même temps que les magasins Eaton, qui font faillite en 1999. Depuis, l’espace accumule la poussière, attendant silencieusement qu’on lui redonne une seconde vie.

Restaurant de L'Île-de-France. Vue d'angle. Mark Ramsay Elsworthy 2016, © Ministère de la Culture et des Communications

Le restaurant ainsi que le mobilier, un ensemble de 839 objets regroupant des meubles, mais aussi des luminaires, des pièces de vaisselle et des objets utilitaires conçus en 1930 dans le style art déco, en plus de quelques pièces d’argenterie anglaise datant de la fin du 19e siècle, sont classés patrimoniaux par le gouvernement du Québec en 2000. Quelques œuvres d’art font également partie du lot.

Restaurant de L'Île-de-France. Vue intérieure. © Ministère de la Culture et des Communications 1999

Ivanhoé Cambridge, propriétaire du bâtiment, entend restaurer le tout pour lui redonner son lustre d’autrefois. Comme le mentionne la firme EVOQ Architecture, chargée du projet, dans Le Devoir, des travaux de mise aux normes seront nécessaires avant d’accueillir à nouveau les visiteurs. La formule, qui combinera restauration et espace multifonctionnel, reste à peaufiner, mais la volonté de rendre les lieux accessibles au public est là.

Chose certaine, la réouverture de L’Île-de-France risque d’attirer une foule de curieux et d’anciens clients. Serez-vous du nombre?