S’agrandir le cœur
Dans le lot de livres en librairie, si j’en vois un intitulé Méditer à cœur ouvert, je ne le prends pas. Or, tout comme la barbe ne fait pas l’homme, le titre, lui, ne fait pas (toujours) son contenu, surtout quand il s’agit d’un ouvrage de Frédéric Lenoir, auteur du best-seller Le miracle Spinoza, un être charmant, zen (évidemment), qui était de passage à Montréal il y a quelques jours pour promouvoir son nouveau livre sur la m é d i t a t i o n. Hum.
Je sais, il y en a des tonnes de livres sur le sujet. Le matin même de ma rencontre avec Lenoir, je venais d’en recevoir deux en service de presse. Avec des enfants, mille boulots, l’heure des repas, des bains, des devoirs, des virus hivernaux, des rendez-vous… Pffff! Je n’ai jamais eu/pris le temps de méditer, et en plus, ça ne fait pas travailler les muscles. Alors, à quoi bon? J’ai donc toujours remis ça à quand je serai plus grande.
Je dois être devenue grande (vieille) parce qu’en plus de méditer (oui, oui!), j’offre ce livre en cadeau. Ce Français qui a si bien démocratisé la pensée de Socrate ou de Spinoza, entre autres, en les remettant de l’avant de manière hyper-accessible nous montre cette fois, aidé d’un CD de méditations guidées par lui, avec ou sans musique, comment, en quelque huit minutes, harmoniser esprit, cœur et corps pour retrouver le goût de la bienveillance, du pardon et de la gratitude. Disons qu’on n’en a pas de trop par les temps qui courent. Ça ne ressemble à rien d’autre. Personnellement, je le fais en conduisant. Nul besoin de se créer des ambiances à la lueur d’une chandelle, de s’asseoir en indien ou de fermer les yeux en essayant de comprendre comment respirer… Non. Juste écouter et réfléchir un peu. Rien d’exhaustif, je vous rassure. Et vous savez quoi? Ça rend meilleur. Ça donne du cœur, ou plutôt, ça agrandit le cœur.
«Nos grands-parents n’avaient pas besoin de méditer, ils avaient une vie beaucoup plus lente que la nôtre et ils prenaient le temps de faire les choses, de les vivre. Ils étaient attentifs à ce qu’ils faisaient. C’était leur méditation», explique Frédéric Lenoir en ajoutant qu’ils n’étaient pas non plus dans l’ego comme aujourd’hui.
L’ego. Cet animal obsédant qu’il faut rassasier sans cesse, en passant par les réseaux sociaux, notamment. Comme le rythme de vie débile, le désir de briller dans l’œil de l’autre est aussi une affaire d’époque. Et le bonheur factice que cette réussite peut amener ne dure jamais. «Ce n’est pas comme développer l’être profond que la méditation propose», précise le méditant d’une trentaine d’années d’expérience. Pas surprenant donc que l’Association SEVE, présidée par Lenoir et offrant des ateliers de philosophie et de pratique de l’attention pour les enfants et les adolescents, gagne de plus en plus d’adeptes dans les écoles depuis son implantation au Québec en 2017.
La joie de vivre du Québécois
Or, ça a l’air qu’au Québec, justement, nous ne sommes pas si mal doués pour le bonheur. «Pour moi, les Québécois, et je le dis sans flagornerie, je trouve que vous avez pris le meilleur des Français et des Américains. Vous avez, comme les Américains, un goût du bonheur plus facile, vous êtes plus optimistes, vous faites plus confiance à la vie, tout en ayant pris des Français le goût de la réflexion et un certain esprit critique.»
Bien sûr, on s’en réjouit, mais cet hiver, ce climat et cette neige… Mea culpa, je n’ai pas pu m’empêcher de râler un peu, comme disent les Français. Râler pour tester la patience de Monsieur Zénitude, en lui rappelant que nos hivers nous «usaient» tout de même. «Je viens chez vous tous les mois de février depuis 5 ans. Je sais… Et pourtant, je trouve que ça n’enlève rien à la chaleur du cœur. Et si vous vous arrêtiez pour la regarder, cette neige? Vous ne trouvez pas que c’est beau, elle vous aime, cette neige, non?» Bonne Saint-Valentin.
Si vous êtes un cœur à prendre, il restera toujours… la neige. Ne râlez pas. Méditez. Ça marche.
Je craque pour…
Au milieu des vivants de Josée Bilodeau, éditions Hamac
Tout nouvellement arrivé en librairie, ce roman somptueux, doux et douloureux à la fois, porte sur un amour interdit comme il y en a depuis les débuts du monde; celui d’une femme et d’un homme, un homme marié. Hélas, au beau milieu d’une tempête de neige, l’amant meurt. Comment continuer quand l’amour n’est plus et que la souffrance n’est pas légitime à la face du monde entier? Et si la chaleur du Mexique et sa manière de célébrer la mort ramenaient un peu cet homme à la vie de la narratrice endeuillée? Le regard de Josée Bilodeau humanise et rend grâce à ce type d’histoires si fréquentes, mais qu’il faut taire au nom des bonnes mœurs et des conventions. Non, l’amour et le désir ne se domptent pas si facilement. Ça, les vrais passionnés de la trempe de cette écrivaine le savent. Quelques lignes pour vos beaux yeux et votre cœur amoureux:
«Du bout de l’ongle, je trace dans les cristaux délicats les lettres de son nom pour qu’il brille à nouveau dans cette chambre, jusqu’à ce que le soleil les efface. Épitaphe éphémère.»