La force tranquille de Manon Asselin
L’architecture n’est pas un sujet de prédilection au Québec. Pour compenser (un peu), Avenues.ca vous invite à découvrir le travail d’architectes méconnus de la province. Aujourd’hui, pleins feux sur Manon Asselin.
Même s’il y a de plus en plus de femmes qui embrassent la profession d’architecte, peu d’entre elles se retrouvent à la tête d’une firme et encore moins se hissent au panthéon des starchitectes. Celles-ci travaillent trop souvent dans l’ombre. Pour preuve, on ne compte que trois femmes parmi les lauréats du prix Pritzker (l’équivalent du prix Nobel pour l’architecture) depuis 1979 et la première l’a reçu… en 2004.
Dans ce milieu encore trop fermé aux femmes, Manon Asselin se démarque. La Québécoise dirige depuis 1997 l’atelier TAG, qu’elle a fondé avec son partenaire Katsuhiro Yamazaki, en plus d’enseigner à l’École d’architecture de l’Université de Montréal. Depuis, la firme a reçu de nombreuses récompenses, dont des médailles du gouverneur général du Canada en architecture et le prix de Rome professionnel du Conseil des arts du Canada. En 2012, l’Architectural League de New York a également souligné le travail du petit cabinet d’une dizaine de personnes en lui décernant le prix Emerging Voices.
Voici trois projets signés Manon Asselin.
Pavillon pour la Paix du Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM)
Le plus récent pavillon du MBAM, réalisé par Manon Asselin et Jodoin Lamarre Pratte, est une ode à la simplicité. Formé de deux volumes, le bâtiment de quatre étages se pare de verre, d’aluminium, de béton et de bois. La transparence et la lumière y occupent une place de choix.
L’imposant «escalier-événement» en chêne blanc permet aux visiteurs de déambuler à leur rythme, tout en admirant les vues sur la ville, la montagne et le fleuve. Les concepteurs ont aussi prévu de nombreux espaces de réflexion au sein du musée. L’espace sobre met en valeur les œuvres d’art. Les bâtonnets d’aluminium qui recouvrent l’édifice modulent quant à eux la lumière à l’intérieur. En soirée, le pavillon se transforme en lanterne dans la métropole. Le nouvel ajout du MBAM est probablement l’un des meilleurs legs du 375e anniversaire de Montréal, un leg qui a été non seulement inauguré dans les temps, mais également sans dépassement de coûts.
Théâtre Gilles-Vigneault
Conçu encore une fois en consortium avec Jodoin Lamarre Pratte, le Théâtre Gilles-Vigneault est un nouveau lieu de rassemblement pour les citoyens de Saint-Jérôme. C’est d’abord l’impressionnant plafond en bois du parvis et du foyer principal qui capte le regard. «L’utilisation du bois dans sa structure célèbre le patrimoine naturel de la région par la mise en valeur de l’imposante forêt des Laurentides, un important matériau identitaire du Québec», explique Manon Asselin.
La salle de spectacles de 875 places est chaleureuse grâce à son enveloppe de chêne blanc. La façade vitrée ouvre l’édifice sur la ville, alors que l’aluminium lui donne une touche moderne tout en permettant au bâtiment de se fondre dans le paysage. Les architectes ont aussi intégré plusieurs éléments de développement durable, comme l’utilisation de l’énergie géothermique.
Dôme de l’oratoire Saint-Joseph
La dernière phase de rénovation de l’oratoire Saint-Joseph a été confiée à Atelier Tag et à Architecture49 plus tôt cette année. Le concept de Manon Asselin et de James Bridger donnera accès au dôme de la basilique, plus spécifiquement entre les dômes inférieur et supérieur. Les architectes ont imaginé une ascension qui se fera par le biais d’un escalier «assez vertigineux» de plus de 1000 marches.
Un drapé en acier guidera les visiteurs jusqu’au sommet. Ce voile métallique, étalé tout au long du parcours, servira de fil d’Ariane et reliera les différents espaces. «On scénarise et on chorégraphie l’émotion avec un matériau très simple», a résumé Manon Asselin au Devoir. Du lanternon, on aura une vue à 360 degrés sur Montréal. La descente se fera pour sa part en douceur, avec une rampe autour du dôme qui conduira au musée de l’Oratoire. La plus haute fenêtre sur la ville s’annonce comme un pèlerinage qui vaudra le détour (et l’effort).