Décrocher aux Îles de la Madeleine
Je vous écris de l’auberge La Salicorne, au village de Grande-Entrée, dans l’est des Îles de la Madeleine. Dehors, le soleil semble à demi-endormi, s’obstinant à se cacher derrière les nuages comme on le ferait avec des couvertures tirées jusqu’au menton. Alors que les Montréalais se liquéfient sous l’effet de la canicule, ici, le mercure atteint à peine les 12 degrés. Hier, j’ai eu l’impression de vivre trois saisons en une journée.
Devant moi, l’île Boudreau me donne envie d’enfiler mes bottes de randonnée pour aller contempler le golfe du Saint-Laurent d’un côté et le bassin aux Huîtres de l’autre. Accessible uniquement à pied, la presqu’île inhabitée fait partie de ces beautés brutes qui séduisent au premier regard. Tout, autour de ses 23 petits hectares, semble dramatique: les vagues qui viennent fracasser les rochers, les falaises rouges sculptées par les éléments, le contraste avec le vert pur de l’herbe folle et le simple fait qu’elle existe toujours, malgré l’érosion, comme un doigt d’honneur brandi en direction du vent.
Beaucoup plus calme que l’île du Cap aux Meules, porte d’entrée de l’archipel, et que La Grave, à Havre-Aubert, secteur très prisé des touristes, l’est de l’archipel convient parfaitement à ceux qui rêvent de détente et de nature. Pas étonnant que l’auberge où j’ai jeté l’ancre propose des cours de yoga et des retraites axées sur le bien-être! Les amateurs de sensations fortes opteront quant à eux pour l’exploration de grottes accessibles en longeant la falaise de la Bluff, expérience unique où les vacanciers flottent en combinaison isothermique. Quand le mercure grimpera de quelques degrés, le yoga sur planche à pagaie devrait faire mouche auprès de ceux qui cherchent une aventure plus douce.
Le bout du monde au Québec
On dit que les Îles se «méritent». J’avais, cette fois-ci, envie de mesurer l’écart entre elles et moi sur roues et sur l’eau. Il a bien sûr fallu que le vent s’en mêle. Son insistance à prouver sa suprématie m’a fait toucher terre sept heures plus tard que prévu, le traversier étant resté au port à cause des mauvaises conditions. Et moi qui tente d’éviter les petits avions dans le secteur précisément pour cette raison! Disons qu’après 35 heures de voyage (en incluant le trajet entre Montréal et Sainte-Foy, où partent les autobus pour les Îles), le «mérite» m’apparaissait bien tangible.
Comme la copine Anne Pélouas l’année dernière, j’ai voulu avoir un aperçu des Sentiers entre Vents et Marées, inaugurés en septembre 2017. Ce parcours inspiré du chemin de Compostelle offre un aperçu de la diversité des Îles sur 230 kilomètres. Il suffit de suivre Carole Longuépée et Fernande Petitpas (ça ne s’invente pas!), deux des instigatrices du projet, pour comprendre pourquoi il remporte un aussi grand succès. Ces deux retraitées passionnées de randonnée continuent de travailler d’arrache-pied pour améliorer l’expérience des marcheurs, repérant tout de suite une balise mal placée ou un logo délavé par la brise marine. «Au début, le chemin passait surtout par les plages, explique Carole. Mais nous avons réalisé que marcher au vent, dans le sable, pouvait être lassant. Alors nous avons voulu varier.» Lors de ma promenade avec elles, nous sommes entre autres passées le long d’un étang, dans la forêt, sur une plage et près d’un phare.
Un autre atout de l’itinéraire? Les pauses qu’il est possible de s’offrir tout au long du parcours, notamment à la microbrasserie À l’abri de la tempête. Ceux qui souhaitent vivre l’aventure peuvent par ailleurs se procurer Le Louvoyeur, carnet qu’on peut faire estamper à la fin de chacune des treize étapes. Vendu au coût de 20$, il permet de financer le développement du circuit.
Je ne compléterai sans doute jamais toutes les étapes de ce sentier qui porte si bien son nom, mais j’aime l’idée de parcourir l’archipel d’un bout à l’autre, lentement. Voilà une autre manière de «mériter» les Îles qui me plaît tout particulièrement.
Un coup de cœur renouvelé
Le Bistro Plongée Alpha du photographe sous-marin Mario Cyr. J’en avais gardé un excellent souvenir d’une visite en 2012 et je n’ai pas été déçue. Avec un peu de chance, c’est lui qui vous servira vos rouleaux au homard ou au crabe!
Plaisirs gourmands
On mange très bien aux Îles. Entre classiques et nouveautés, le Circuit des saveurs est sans contredit une autre route agréable à emprunter. Outre l’incontournable Fromagerie Pied-de-vent, Les biquettes à l’air vaut aussi le détour. Deux fois par semaine, il est même possible de faire une courte randonnée avec les chèvres!
Bon à savoir
Madelinot d’adoption, Stéphane Plante est tombé sous le charme des Îles lors d’un voyage familial alors qu’il avait sept ans. Il y réside depuis maintenant 22 ans et possède sa propre compagnie de visites guidées, Visites guidées VIP. Une belle façon de visiter l’archipel selon ses intérêts, puisqu’il est possible de concocter un itinéraire sur mesure. Un conteur, un pêcheur, un photographe, un professeur d’histoire ou un ornithologue peut également vous accompagner si vous souhaitez approfondir certaines connaissances.
Une super-découverte
L’Auberge de jeunesse Paradis bleu, propriété d’un jeune couple de Madelinots fort sympathique, à Fatima. On y trouve des chambres individuelles en plus des dortoirs, dans un décor qui semble tout droit sorti de Pinterest. On s’y sent tout de suite en vacances!
Un couac
À l’abri de la tempête, trois petits bouts de pain sont servis avec les Assiettes des Îles, composées de viande, poisson fumé et mollusques, et de fromage de producteurs locaux. «Il y a des frais supplémentaires», nous a répondu la serveuse quand nous avons souhaité en avoir deux de plus. De quoi couper l’appétit…
J’étais l’invitée de Tourisme Îles de la Madeleine et des Autobus Les Sillons. Toutes les opinions émises sont 100% les miennes.