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19 décembre 2017Auteure : Marie-Julie Gagnon

Location d’une chambre d’hôtel: quelle option privilégier?

Les options pour louer une chambre d’hôtel sont nombreuses. Entre les applications mobiles, les sites d’hôtels à rabais et les outils de comparaisons, les voyageurs ont parfois du mal à savoir quelle option privilégier.



À priori, pouvoir magasiner sa chambre d’hôtel sur un site à rabais apparaît comme une bonne idée. Les avantages semblent nombreux: possibilité de faire ses recherches et ses réservations à n’importe quel moment, prix affichés réduits (du moins, en théorie) et même parfois des bonus, comme la nuitée gratuite après la dixième nuit réservée avec Hotels.com.

Le hic – ou plutôt les hics? Comme on a pu le voir dans différents reportages publiés au cours des derniers mois, la réalité est parfois trafiquée. Les «offres exclusives» ne le sont pas toujours, tout comme les rabais affichés. «Les plateformes de type Expedia, Booking ou Hotels.com, affichent des prix barrés et autres comparaisons avantageuses, mais cela est pratiqué avec "des tarifs fantaisistes ou non comparables" afin de "faire croire à une fausse économie"», a rapporté L’Obs en mai 2017.

Où vont les «taxes» ?

À l’instar de l’industrie culturelle, l’hôtellerie souffre aussi du traitement fiscal inéquitable. «Les deux piliers mondiaux du voyage en ligne, Expedia et Priceline, bénéficient eux aussi du laxisme fiscal canadien pour le paiement des réservations d’hôtel qui sont faites par l’entremise de leurs services à travers le pays», rapportait La Presse le 11 décembre dernier. Cofondatrice et coprésidente de Groupe Germain Hôtels, Christiane Germain dénonce le fait que les taxes perçues pour le montant correspondant à leur commission dans les formules «payées d’avance» ne sont pas remises au gouvernement. 

Bien que l’Association hôtelière de la région de Québec (AHRQ) ait fait pression pour dénoncer ce traitement fiscal inéquitable en 2015, à l’époque, personne n’avait semblé prêter attention à la question.

Faut-il rappeler qu’Expedia et Priceline dominent le marché de la réservation en ligne et sont responsables de près de 90% des transactions effectuées? «Expedia gère une douzaine d’enseignes, dont Trivago et Hotels.com, tandis que Priceline possède pour sa part une dizaine de sites de référencement, dont Booking.com et Kayak».

Photo: Carli Jeen, Unsplash
Photo: Carli Jeen, Unsplash

Tricheries?

Dans La Presse, en août dernier, la journaliste Isabelle Dubé s’est amusée à faire une recherche sur les différents sites de réservation en ligne pour un hébergement à Saint-Ours. Les messages du genre «Très populaire! Seulement 1 disponible» ont fusé comme s’il se fût agi de Paris ou New York. «L’algorithme ne fait aucune différence entre les villes glamour et les destinations plus discrètes», écrit-elle.

Le pouce en l’air de Booking indique-t-il vraiment un établissement exceptionnel? Pas forcément, a observé la journaliste. «Plusieurs hôteliers nous ont confirmé qu’ils payaient 3% de commission supplémentaire à Booking pour avoir droit au pouce levé.»

En France, la Répression des fraudes (DGCCRF) a relevé plusieurs infractions l’été dernier, à commencer par les publicités trompeuses. Autre aberration: quand un voyageur tape le nom d’un hôtel sur un moteur de recherche, le site de ce dernier arrive bien souvent quatrième ou cinquième, après Booking, etc. Selon le magazine de consommation de juin d’UFC-Que choisir, Booking.com serait le premier client de Google dans le monde, par l’entremise de sa maison mère Priceline, qui détient également Kayak.com.

Il est par ailleurs faux de croire que parce qu’un hôtel affiche complet sur un site, il l’est réellement, puisqu’il s’agit seulement des chambres disponibles sur ledit site. En contactant l’hôtel directement, il est facile d’avoir l’heure juste.

Et pour les hôteliers?

Nous en avons déjà fait mention: les centrales de réservation en ligne gardent une commission pouvant aller jusqu’à 30% sur le tarif des chambres vendues aux Booking et Expedia de ce monde. Au Québec, les hôteliers qui font affaire avec ces groupes sont aussi tenus de ne pas proposer de tarifs plus bas. «Les contrats avec ces agences exigent la parité tarifaire», a expliqué Xavier Gret, directeur général de l’Association Hôtellerie Québec.

En Europe, la question a fait l’objet de débats, notamment en Suisse et en France. Certaines mesures ont été prises pour corriger certaines absurdités, comme la parité des prix. «Une négociation pour baisser le tarif de la chambre peut même être possible lors d’une discussion directe avec l’hôtelier, ce qui n’est pas le cas lors d’une réservation par Internet, explique Le Figaro. Une disposition facilitée par la loi Macron, elle permet aux hôteliers de pratiquer des prix inférieurs à ceux des plates-formes de réservation.»

Photo: Elizabeth Greene, Flickr
Photo: Elizabeth Greene, Flickr

Tout n’est pas noir ou blanc

La plupart des hôteliers, dont Christiane Germain, reconnaissent de bons côtés au référencement hôtelier. C’est une manière d’aller chercher de nouveaux clients, notamment. Par contre, il est clair que les désavantages actuels peuvent devenir des irritants majeurs.

Comment convaincre les voyageurs de passer par les services de réservations de l’hôtel plutôt que par un intermédiaire comme Booking quand il est impossible d’offrir des prix concurrentiels? Certains proposent des «extras», comme le petit déjeuner gratuit. Le Groupe Germain Hôtels permet pour sa part aux clients qui ont réservé directement de libérer la chambre au moment désiré le lendemain plutôt qu’à l’heure habituelle de départ.

Oui, l’idée de contacter l’hôtelier pour tenter d’obtenir le prix aperçu sur un site de réservation à rabais reste excellente. Le problème, c’est que tous les employés ne sont pas au courant de la situation et démontrent parfois bien peu d’ouverture.

Bref, vous l’aurez compris: c’est compliqué. Retenons simplement que pour le moment, utiliser les sites de vente à rabais comme outils de recherche, avant de réserver directement auprès de l’hôtel repéré s’apparente comme le meilleur compromis pour le consommateur comme pour l’hôtelier.


Pour en savoir plus

Chambre d'hôtel à rabais: 8 choses à garder en tête

Marie-Julie Gagnon

21 décembre 2015

Avenues.ca

Les géants de la réservation de chambres en ligne doivent payer des taxes, disent les hôteliers

Isabelle Maltais

11 décembre 2017

Radio-Canada