Photo: Diane Turcotte

Tour des Combins: longue randonnée sur les hauteurs de la Suisse et de l’Italie

Parmi les grands treks alpins d’Europe, le tour des Combins n’est pas le plus connu, mais il vaut à coup sûr l’effort fourni pour profiter de panoramas grandioses, notamment sur le mont Blanc, et s’approcher des derniers grands glaciers de la chaîne alpine, ceux des Combins.



97,4 km, 11 755 m de dénivelé. C’est à ces conclusions mathématiques que Alain Niermarechal, l’un de nos compagnons d’équipée pour ce tour des Combins avec Altitude Mont Blanc, spécialiste des treks d’envergure en Europe, est parvenu au terme d’un périple de six jours de marche dans les Alpes suisses et italiennes. Nos jambes et nos pieds en mesuraient la portée même si la tête s’en étonna au jour final! 

Précautions d’usage 

Dire que ce genre de longue randonnée est à la portée de tous serait hasardeux, mais toute personne – quel que soit son âge – qui pratique une activité physique régulière et d’intensité modérée peut le faire et y trouver plaisir.

La haute montagne se mérite et ce tour des Combins n’échappe pas à la règle d’une bonne préparation physique et mentale. La longue randonnée impose cependant surtout de l’endurance, ce qui s’acquiert relativement facilement en marchant plusieurs heures et souvent, si possible en alternant de bonnes montées et descentes.

À titre de préparation, on peut aussi opter pour une séance quotidienne d’exercices à la maison, incluant montées et descentes de marches d’escalier. Altitude Mont Blanc suggérait pour sa part dans ses recommandations pour ce trek d’être «capable de faire aisément 20 km de marche en plaine en quatre heures maximum».

Un bon équipement fait aussi toute la différence. Vêtements techniques pour la marche, bottes de randonnée confortables, sac à dos adapté à votre morphologie, bâtons télescopiques, contenants totalisant deux litres d’eau pour une hydratation adéquate, en constituent l’essentiel. 

Au jour le jour et pas à pas dans le Valais suisse et le Val d’Aoste italien

Bienvenue au royaume des cimes enneigées, des tapis de fleurs colorées, des marmottes siffleuses et des vaches curieuses, plus quelques bouquetins et chamois!

Notre marche au long cours ne sera pas de tout repos. Il faudra se lever tôt, remballer son stock tous les matins, faire face aux aléas de la météo et marcher plusieurs heures d’affilée – rarement sur le plat –, mais c’est à ce prix que la haute montagne se dévoile sous ses plus beaux atours. 

Jour 1: au cœur d’un barrage, au-dessus d’un lac majestueux

Notre longue randonnée débute dans le Valais suisse, à 1850 m d’altitude, sous l’impressionnant barrage de Mauvoisin, et nous conduira jusqu’au pied du tout aussi étonnant glacier de Corbassière, coiffé des Grand et Petit Combin.

Face au plus haut barrage à voûtes d’Europe (250 m), on se sent tout petit. Encore plus lorsque l’on entre dans une galerie souterraine, avec panneaux expliquant la construction dans les années 1950 de cet ouvrage d’art d’exception. Elle conduit sur la partie haute du barrage, qu’on traverse à pied en se gorgeant de la vue en abîme à gauche et de l’immense lac de retenue qu’encadrent à droite les flancs du Tourmelon et des Combins. On est déjà conquis par ce cadre d’exception.

Galerie du barrage de Mauvoisin. Photo: DianeTurcotte

Le sentier prend ensuite de la hauteur tout en longeant le lac de Mauvoisin vers le sud. La vue est sur le lac de couleur laiteuse est grandiose, avec plusieurs chutes d’eau l’alimentant. La montée en prairie alpine se fait encore progressive jusqu’au col et au lac de Tsofeiret, dans une profusion de fleurs dont les noms et les caractéristiques nous sont dévoilés par notre guide (au titre français d’accompagnateur en montagne), expert en botanique alpine. Joubarbes mauves, silènes acaules en forme de coussin végétal couleur lilas, premiers edelweiss, gentianes, rhododendrons nains, orchidées vanillées, anthyllides vulnéraires couleur jaune, saxifrages à feuilles rondes… La liste est bien incomplète.

Jour 1. Au-dessus du lac de Mauvoisin. Photo: Diane Turcotte

On finira la journée par une longue descente en pierrier et prairie jusqu’à la cabane Chanrion, refuge isolé où nous attendent un premier dortoir confortable et un solide repas.

Jour 2: passage en Italie et découverte des «bisses» alpines

La journée s’annonce longue et difficile sur le plan du dénivelé (+1100 m et -1100 m) sur 23 km. La première montée à la Fenêtre de Durand (2797 m) est agrémentée de superbes vues sur les montagnes alentour, dont le mont Gelé et le mont Avril. Passé un col absolument lunaire, marquant la frontière avec l’Italie, on descendra dans les alpages fleuris surplombant la vallée d’Ollomont et le Val d’Aoste, saluant au passage le Grand Vélan, sommet cousin des Combins.

Au bord d'un premier lac d'altitude. Photo: Diane Turcotte

De courtes descentes abruptes en raidillons tout aussi verticaux, on aboutit sur un sentier en balcon pour se faufiler dans une surprenante faille rocheuse. En plus basse altitude, on retrouve une forêt de mélèzes dans laquelle un long trottoir de bois cache une conduite d’eau, comme nous en verrons plusieurs ensuite.

Notre guide Alain sorti d'une faille rocheuse. Photo: Anne Pélouas

Ces «bisses» sont une curiosité pour nous. Construites et entretenues à la main, elles constituent de petits canaux dérivatifs de torrents plus élevés dont la fonction est d’irriguer de nombreux alpages en contrebas, où paissent l’été des troupeaux de vaches.

Parmi les beautés de cette randonnée. Photo: Anne Pélouas

Après ce parcours italien bucolique à souhait, il faudra payer son tribut final par une bonne montée jusqu’au refuge Champillon.

Jour 3: en route vers le Grand-Saint-Bernard

Une bonne heure de montée via de grands lacets à flanc de montagne nous conduit tôt le matin au col de Champillon, qui domine la vallée du Grand-Saint-Bernard. On reprend son souffle en se gorgeant du paysage – une ribambelle de hauts sommets qui tutoient les nuages –, avant d’entamer une descente vertigineuse, assouplie par de grands lacets à flanc de montagne. Après un sol bien minéral, on retrouve les mélèzes, les torrents et les «bisses», les vaches et leurs lourdes cloches.

Col de Champillon. Photo: Anne Pélouas

Une dernière descente vers le village de Saint-Oyen, dans le Val d’Aoste, achève nos cuisses et nos pieds.

En descente vers le Val d'Aoste. Photo: Anne Pélouas

Par chance, c’est par quelques minutes en bus qu’on finit la journée sur une route montant au col du Grand-Saint-Bernard, à cheval sur la frontière italo-suisse.

Arrivée au col du Grand-Saint-Bernard. Photo: Anne Pelouas

Nous passons soirée et nuit dans le célèbre Hospice du Grand-Saint-Bernard, où les chanoines élèvent encore les fameux chiens saint-bernard et accueillent à l’année les visiteurs pour la nuit.

Jour 4: fenêtre suisse sur les Combins, le mont Blanc et les Grandes Jorasses

Retour en Suisse aujourd’hui par un joli sentier partant de l’Hospice du Grand-Saint-Bernard et surplombant un grand lac. Le sentier grimpe ensuite en zigzag vers la Fenêtre de Ferret, col superbe, tout en grandes roches plates inclinées et d’où nous verrons pour la première fois ces fameux glaciers des Combins dont nous faisons le tour.

Pause au col Fenêtre de Ferret. Photo: Diane Turcotte

Le sentier descend alors dans la caillasse aux trois lacs Fenêtre, dans un décor hautement verdoyant qui contraste avec les couches minérales des approches de cols. Surtout, la pause près de ces lacs d’altitude nous permet de voir le mont Blanc et les Grandes Jorasses sous un angle inédit, ainsi que le glacier de la Brenva.

Un col de plus! Photo: Anne Pélouas

Le reste de la journée se fera en passant par le col du Bastillon (avec passage étroit entre des roches), en longue descente et large courbe vers le lac des Toules et son barrage, puis par un chemin forestier bordant un torrent. Il nous conduit au vieux village de montagne de Bourg-Saint-Pierre, où nous passons la nuit en gîte après une longue journée de marche.

Vaches en spectacle. Photo: Anne Pélouas

Jour 5: nature brumeuse et fleurs aux pieds

Au matin, changement de décor: une brume épaisse recouvre le paysage. Un chemin monte en forêt vers les alpages, qu’on rejoint en moins d’une heure. Les nappes de brouillard laissent alors échapper quelques trouées qui autorisent à mesurer notre progression vers les hauteurs. On se concentre sur le «paysage» floral de la prairie alpine que nous traversons. Dans ce tableau chatoyant, c’est la valse des campanules barbues, des fleurs d’arnica, anémones pulsatilles et autres fleurs dont le nom nous échappe.

Notre guide Alain nous parle de botanique. Photo: Anne Pélouas

Au col de Mille, à 2470 m, le vent souffle fort, mais la brume se dissipe, dévoilant au loin le massif du mont Blanc et un formidable arc de cercle rocheux sur lequel nous cheminerons après un pique-nique à l’extérieur du refuge du Mille, bien emmitouflés.

Col de Mille. Photo: Anne Pélouas

La descente suivante nous revigorera autant que le parcours en balcon à flanc de montagne qui mène sur une crête d’où le regard plonge sur le fond de la vallée. Une autre longue descente nous attend en direction d’un joli lac d’altitude dans le val de Bagnes. Après une pause méritée, la traversée des alpages fleuris ravira les plus fatigués, avant l’arrivée au refuge Brunet pour le souper et la nuit au chaud.

Photo: Anne Pélouas

Jour 6: encore des surprises avant la fi

Pas de répit pour ce dernier jour de randonnée qui s’avérera plein de surprises. Nous remontons d’abord sur un versant de montagne par un sentier qu’emprunte aussi un troupeau de vaches d’Hérens à la robe bien noire. On négocie les pas entre les bouses, puis entre les vaches elles-mêmes, avant de poursuivre notre chemin.

Photo: Diane Turcotte

La verdure disparaît pour laisser place à un paysage très rocheux. Nous grimpons vers le glacier de Corbassière, coiffé du glacier du Grand Combin (4313 m). Dans sa moraine latérale, en surplomb du torrent alimenté par son dégel, il faut s’arrêter pour prendre la mesure de ce majestueux paysage.

Au pied du glacier de Corbassière. Photo: Diane Turcotte

Le clou du spectacle viendra avec la traversée sur 210 m de l’impressionnante passerelle de Corbassière, en contrebas du glacier, à 70 m du sol, puis pour les plus valeureux, par une dernière grimpette pour approcher la base du glacier de Corbassière.

Photo: Anne Pélouas

L’euphorie a gagné le groupe, qui descend ensuite allègrement le long d’une nouvelle bisse sous la Becca de Corbassière, puis en lacets serrés et pentus jusqu’aux portes de Fionnay, en fond de vallée. L’heure est à libérer pour de bon nos pieds des bottes de randonnée et à se réjouir de ce magnifique périple alpin, accompli avec un guide et un groupe hors pair.

Infos pratiques

 Altitude Mont Blanc : 

- Dernier départ de l’année le 20 août; premier départ de 2024, en juillet.

- Transport des bagages, sauf pour les deux premiers jours.

Ce reportage a été rendu possible grâce à l’aide d’Altitude Mont Blanc et d’Air Transat.