Photo: Ishan Seefromthesky, Unsplash
4 février 2019Auteure : Marie-Julie Gagnon

Il faut qu’on parle du plastique

On n’a jamais autant entendu parler de plastique qu’au cours des derniers mois. À la fin de 2018, la société portugaise Hi Fly, qui loue des appareils aux compagnies aériennes ou aux institutions, a réalisé le premier vol sans plastique à usage unique. Exit les gobelets, assiettes et autres ustensiles à jeter après usage! Des emballages compostables et des couverts en bambou ont notamment été choisis pour les remplacer.



D’autres compagnies emboîteront-elles le pas? s’est demandé The Telegraph. Déjà, on constate que plusieurs initiatives ont été prises dans les mois précédant ce coup d’éclat relayé par tous les médias du monde, mais aussi après. Delta Air Lines a retiré les emballages de plastique des couverts au printemps 2018 et annoncé que «les agitateurs à café, les emballages, les ustensiles et les pailles en plastique» seront bannis, a rapporté Aeromorning. Air New Zealand et Alaska Airlines ont également commencé à diminuer progressivement l’utilisation de certains produits faits du même matériau.

La semaine dernière, Air Canada a annoncé sa décision de réduire l’utilisation du plastique à usage unique à bord de ses avions et dans ses lieux de travail. Dès l’été 2019, les bâtonnets servant à mélanger les boissons seront remplacés par d’autres en bois. Un petit pas qui pourrait faire bien du chemin. La première phrase du communiqué de presse émis par Air Canada frappe d’ailleurs l’imaginaire: «Des économies d’un océan à l’autre: lorsqu’on met tous les bâtonnets utilisés pendant un an bout à bout, on obtient suffisamment de plastique pour relier Vancouver à Halifax

À la fin de 2018, la société portugaise Hi Fly a réalisé le premier vol sans plastique à usage unique. Photo: Facebook Hi Fly

Du côté des hôtels

En Asie, Akyra Hotel Group prévoit bannir tout plastique à usage unique de ses établissements d’ici 2020. L’un de ses nouveaux hôtels boutiques, Akyra Sukhumvit, qui a ouvert ses portes en mai 2018 à Bangkok, a d’ailleurs été l’un des premiers du continent à ne pas utiliser de plastique à usage unique. Dans chaque chambre se trouvent une bouteille réutilisable et un sac à emplettes, que les voyageurs peuvent aussi acheter s’ils le désirent. Sur tous les étages, on trouve des distributeurs d’eau propre à la consommation en verre.

En 2018, la chaîne espagnole Melià a aussi éliminé tous les plastiques à usage unique de ses propriétés. En 2017, un total de 22 millions de bouteilles en plastique avait été jeté dans les établissements de Melià Hotels International.

Au Mexique, Xcaret Mexico Hotel, premier hôtel des Amériques à avoir obtenu la certification EarthCheck Certification for Planning and Design, utilise des pailles conçues par une compagnie mexicaine qui crée des polymères avec des noyaux d’avocat, un matériau 100% biodégradable.

L’agence Thomas Cook a pour sa part promis en novembre 2018 de supprimer 70 millions de produits faits de plastique à usage unique de ses établissements, ce qui équivaut à 3500 valises remplies.

Sur tous les fronts

Partout sur la planète, nous assistons à une réelle prise de conscience collective. Lancée en 2017 par l’ONU, la campagne «Clean Seas» vise à lutter contre les plastiques non réutilisables. À ce jour, 60 pays l’ont rejointe.

Une dizaine de catégories de produits qui représentent près de 70% des déchets échoués dans les océans et sur les plages seront interdites dans l’Union européenne dès 2021, si le Parlement et le Conseil de l’UE donnent leur assentiment officiel. Élisabeth Köstinger, ministre autrichienne du Développement durable, dont le pays préside actuellement l’UE, y est allée de cette phrase-choc, rapportée par l’AFP: «Mesuré en poids, il y aura plus de plastique que de poissons dans les océans du monde d’ici 2050 si nous continuons à rejeter du plastique dans la mer au rythme actuel. Nous ne pouvons pas laisser cela se produire».

En Indonésie, où un cadavre de cachalot a été découvert sur une plage en novembre dernier avec six kilos de plastique dans l’estomac, dont 115 gobelets, la situation est aussi prise très au sérieux. Le pays produit chaque année 3,22 millions de tonnes de déchets de plastique, ce qui en fait le deuxième plus gros pollueur de la planète après la Chine. Heureusement, des mesures concrètes ont été prises depuis que le ministre des Affaires maritimes s’est engagé à réduire les déchets de plastique de 70% à l’horizon 2025, lors de la dernière conférence des Nations unies sur les océans à New York en 2017. Plusieurs villes ont interdit l’utilisation de sacs de plastique à usage unique.

La campagne «Clean Seas» de l'ONU vise à lutter contre les plastiques non réutilisables. À ce jour, 60 pays l’ont rejointe. Photo: Facebook UN Environment

#Iamnotplastic

À Bali, où différents organismes et compagnies tentent de sensibiliser la population, il est désormais interdit d’avoir recours à des sacs de plastique dans les commerces de type supermarchés et supérettes. Dans certains restaurants et cafés, on remarque l’inscription #iamnotplastic sur les pailles, qui ressemblent en tous points à celles faites de plastique. C’est le cas au COMO Uma Canggu, inauguré en février 2018.

En creusant un peu, on découvre que l’entreprise qui les crée, Avani, a développé différents produits écoresponsables pour remplacer le plastique à usage unique: sacs faits de manioc, ustensiles et pailles à base d’acide polylactique, communément appelée fécule de maïs (cornstarch)… De bonnes idées qui donnent un peu d’espoir.

Comme voyageur, on n’obtiendra jamais 100% à l’examen du parfait écolo, mais on peut certainement obtenir la mention «très bien» en prenant conscience de l’impact de chacun de nos choix.

Les pailles à base d'amidon de maïs de la compagnie Avani. Photo: Facebook Avani

Quelques chiffres qui font bondir:

  • Huit millions de tonnes de plastique sont en effet déversées chaque année dans les océans, selon une étude de la revue Science.
  • Certaines espèces, comme les tortues, confondent les sacs de plastique avec les méduses et les mangent.
  • Plus de 700 espèces sont touchées par le problème du plastique.
  • Selon une estimation publiée en 2015 par l’organisme environnemental Ocean Conservancy, cinq pays d’Asie, soit la Chine, l’Indonésie, les Philippines, la Thaïlande et le Vietnam, contribuent à eux seuls à 55 ou 60% des déchets de plastique qui finissent dans les océans.
  • «Selon une étude de la revue Science Advances, sur les 8,3 milliards de tonnes de plastique produites entre 1950 et 2015, 6,3 milliards de tonnes sont devenues des détritus très peu biodégradables, dont seulement 9% ont été recyclés.»

(Sources: TVA Nouvelles, Le Petit Journal, L’Express)


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