La chronique Voyage de Marie-Julie Gagnon

Auteur(e)
Photo: Mélanie Crête

Marie-Julie Gagnon

Auteure, chroniqueuse et blogueuse, Marie-Julie Gagnon se définit d’abord comme une exploratrice. Accro aux réseaux sociaux (@mariejuliega sur X et Instagram), elle collabore à de nombreux médias depuis une vingtaine d’années et tient le blogue Taxi-brousse depuis 2008. Certains voyagent pour voir le monde, elle, c’est d’abord pour le «ressentir» (et, accessoirement, goûter tous les desserts au chocolat qui croisent sa route).

New York et le rêve américain

Le week-end dernier, j’ai eu envie de découvrir New York différemment. Bien que j’aimerai toujours aller me balader sur la High Line, au Chelsea Market et à Central Park, je souhaitais m’attarder aux multiples cultures qui cohabitent dans la Grosse Pomme, plus particulièrement à Harlem et à Brooklyn. Quel meilleur point de départ que la bouffe pour explorer les diverses influences? J’ai ainsi pris part à deux visites guidées, l’une avec Taste Harlem et l’autre avec New York Fun tours.



Ce qui m’a frappé, au-delà des délicieux plats goûtés au cours de cette aventure? L’omniprésence du rêve américain. Un cliché que je croyais grossi par les films, mais que j’ai constaté de visu à moult reprises.

Il y a d’abord cet immigré polonais qui vendait des champignons sur la rue et qui est parvenu à s’acheter un petit commerce dans le Lower East Side. Vous connaissez peut-être son nom: Russ and Daughters. On voit toujours des champignons dans la vitrine, histoire de rappeler les origines modestes de son fondateur. Aujourd’hui, il faut jouer du coude pour s’y frayer un chemin. Anthony Bourdain dit s’y rendre pour y acheter notamment des bialys (similaires à des bagels), du saumon fumé et du fromage à la crème au retour d’un long voyage… On y mange aussi de délicieux rugelach, pâtisserie juive très populaire à New York.

Les champignons accrochés dans la vitrine du Russ and Daughters. Photo: Marie-Julie Gagnon
Les champignons accrochés dans la vitrine du Russ and Daughters. Photo: Marie-Julie Gagnon

Pour célébrer le centième anniversaire de la boutique, un restaurant du même nom a été ouvert en 2014. «Le restaurant propose les mêmes produits qu’à la boutique mais aussi des plats venus d’Europe de l’Est, précise Marie, qui tient le blogue Plus belle New York. Ils servent aussi le petit déjeuner, toute la journée, avec des œufs, des bagels et du saumon fumé.»

Du Sénégal à Brooklyn

L’histoire du chef sénégalais Pierre Thiam est quant à elle digne d’un scénario hollywoodien. Après des études universitaires en chimie dans son pays d’origine, il part pour les États-Unis afin de poursuivre sa formation au Baldwin Wallace College, en Ohio. Un incident malheureux, trois jours après son arrivée, le force à revoir ses plans. «J’ai perdu le sac de voyage dans lequel se trouvaient tous mes objets de valeur et mon argent, raconte-t-il à Xibar.net. […] Tout m’a été volé. Et donc, j’étais coincé à New York au lieu d’aller dans l’Ohio une semaine plus tard comme c’était prévu. Je voulais visiter cette ville avant de continuer sur l’Ohio et voilà que j’y étais coincé sans un sou. Et le premier boulot que j’ai trouvé était dans un restaurant qui se trouvait dans West Village.»

Il débute comme busboy, constatant que là-bas, les hommes sont aux fourneaux, chose qu’il n’avait jusqu’alors pu imaginer. De fil en aiguille, il monte en grade et devient sous-chef, complétant sa formation en dévorant les bouquins de cuisine. Quand il se met à servir des plats traditionnels sénégalais présentés à l’occidentale, les critiques l’encensent.

Après avoir possédé son propre restaurant à Brookyn, il écrit aujourd’hui des livres et est considéré comme l’un des meilleurs ambassadeurs de la cuisine sénégalaise.

Harlem, lieu de légendes

Les belles histoires pullulent aussi du côté de Harlem. Comme celle de Rachid Niang, qui a occupé divers boulots avant de devenir propriétaire d’un petit commerce familial servant de la soul food et offrant un comptoir à salade. On y trouve un mélange de cuisines du Sud des États-Unis, des Caraïbes et de la cuisine continentale.

«C’était le mec qui nettoyait les planchers, raconte Jacqueline, fondatrice de Taste Harlem. Après, il a coupé les pommes de terre, puis s’est occupé de la caisse avant de devenir le gérant. Celle qui est devenue sa femme travaillait là aussi. Après avoir occupé tous les emplois, il s’est dit qu’il pourrait lui aussi ouvrir son propre restaurant.»

C’est ainsi que Jacob Restaurant (Jacob est le nom de son père) a vu le jour. Six mois après l’ouverture, à l’occasion de Thanksgiving, il distribue de la nourriture gratuitement. «Avant même le premier anniversaire de l’établissement, il en avait un deuxième. Avant son quatrième, il en avait trois.» Depuis, la popularité de l’endroit ne se dément pas. Sur les réseaux sociaux, les critiques sont très positives. «Meilleur buffet de soul food de Harlem», écrit Ms. Dee Bell sur Foursquare.

Jacob Restaurant. Photo: Marie-Julie Gagnon
Jacob Restaurant. Photo: Marie-Julie Gagnon

À quelques rues de là, se trouve le théâtre Apollo, où tant de stars ont été découvertes lors des légendaires soirées d’amateurs du mercredi. Ella Fitzgerald, Billie Holiday, Aretha Frankin, Stevie Wonder, Marvin Gaye et The Jackson Five, ça vous dit quelque chose? Oui, tout semble possible à New York…

Merci à IHG, dont les points m’ont permis de dormir au Crowne Plaza Times Square. J’étais l’invitée de New York Fun Tour et j’ai payé seulement une partie de la visite avec Taste Harlem. Toutes les opinions émises ici restent 100% les miennes. À noter que les lieux présentés dans ce texte n’ont pas tous été découverts pendant les visites guidées.


Pour en savoir plus

Un dimanche à Harlem

Hélène Clément

12 mars 2016

Le Devoir